20 Minutes

Bonnevaux, le village qui résiste au vote FN

A Bonnevaux, dans les Cévennes, presque aucune voix n’est donnée à l’extrême-droite

- De notre envoyé spécial à Bonnevaux (Gard), Julien Laloye

D’où que l’on vienne, Bonnevaux est un endroit qui se mérite. Il faut monter depuis l’Ardèche, le Gard, la Haute-Savoie ou la Lozère, pour enfin distinguer ces maisons en roche de schiste typiques du plateau cévenol. Nous y sommes venus pour comprendre comment ce dernier village d’irréductib­les résiste encore et toujours au vote Front national. Presque 100 inscrits sur les listes électorale­s, et jamais un bulletin en faveur du parti d’extrême-droite. Aurélia et Fabien, un couple de touristes alsaciens venus profiter des sentiers de randonnée pour les vacances, ne savaient pas : « On pourrait penser au contraire que dans un village qui a su conserver une telle qualité de vie, des gens soient tentés de voter FN pour garder leur chez-eux. » Un habitant de Bonnevaux a bien glissé un bulletin frontiste dans l’urne lors des dernières élections européenne­s. Peut-être le même qu’en 2007, la seule fois où on avait aussi relevé un vote FN. La nouvelle a fait jaser dans les chaumières. « Une mauvaise blague pour qu’on arrête de parler de Bonnevaux dans les médias », résume Sabine, une retraitée installée définitive­ment il y a deux ans. L’insolent a eu le mérite de décomplexe­r les nouveaux arrivants, dont certains n’osaient pas s’inscrire sur les listes de peur qu’on les regarde de travers en cas de montée soudaine du vote Marine. On a vérifié auprès des derniers immigrés, Magalie et Franck, un couple d’agriculteu­rs qui a repris la bergerie du col de Péras, à la sortie du bourg, sans rien savoir de sa couleur politique. La parole à Magalie : « C’est sûr qu’il ne faudrait pas deux voix Le Pen dans quinze jours, sinon on va nous mettre dehors (rires). » On s’était aussi bêtement imaginé un village idyllique, où tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil. Sourire entendu de Roseline Boussac, maire sans étiquette depuis 2004 : « On a nos tensions aussi, vous savez. La vie à Bonnevaux n’est pas un long fleuve tranquille. » Ils sont beaucoup à avoir découvert Bonnevaux dans leur jeunesse hippie au début des années 1970, au moment où les habitants descendaie­nt dans la vallée pour travailler dans les mines de charbon. « Je cherchais un coin sauvage, préservé de la pollution. Ici, tout le monde est écolo, et ça nous réunit bien plus que la politique », témoigne Michel. « Je ne vois rien qui a changé dans la vie du village pour que le FN sorte du bois », conclut la maire, qui reçoit des courriers en nombre après chaque élection. Un jour, une anonyme a même offert 50 € aux habitants pour qu’ils fêtent ça autour d’un apéro. A Bonnevaux, tout le monde reprendrai­t bien une tournée le 8 mai.

« La vie ici n’est pourtant pas un long fleuve tranquille. » La maire Roseline Boussac

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Un seul vote FN a été relevé aux européenne­s en 2014, comme déjà en 2007.
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