Au nez et à la barbe de la droite
Député-maire LR du Havre et proche d’Alain Juppé, Edouard Philippe a été désigné Premier ministre, lundi. Une nomination qui, à moins d’un mois des élections législatives, porte un coup aux Républicains.
Edouard Philippe, 46 ans, n’est pas que le sosie du comédien JeanPierre Darroussin (quand il porte la barbe). Le député-maire LR du Havre est aussi, depuis lundi, le nouveau Premier ministre d’Emmanuel Macron. Comme il le raconte dans Edouard, mon pote de droite, de Laurent Cibien, son grand-père a été docker, son père a été le premier à avoir le bac dans sa famille… avant que lui ne tutoie l’élitisme à la française avec Sciences Po Paris puis l’ENA. « Fier de l’avoir faite », il refuse que cette scolarité le marque à jamais auprès de ses détracteurs.
« Mascotte juppéiste »
Après avoir milité deux ans au PS durant ses années d’études, Edouard Philippe se tourne à droite avec Antoine Rufenach, figure du Havre. Il prend l’option Alain Juppé en 2002. Un homme avec qui il travaille à l’UMP, puis en cabinet ministériel, avant d’être l’un de ses porte-parole durant la campagne de la primaire de la droite. Alain Juppé est d’ailleurs le seul homme politique qu’il juge à sa hauteur intellectuellement, rapporte Gaël Tchakaloff, dans son ouvrage Lapins et merveilles. Un chapitre est d’ailleurs consacré à la « petite mascotte juppéiste et grand chef de l’organisation de la primaire » : « Look de gendre idéal, brutalité vallsienne, liberté de ton façon Jean-Louis Borloo, Edouard se joue d’un déguisement d’énarque le jour, d’allures de rocker désinhibé la nuit. » « Bête de communication », « girouette attachante », Edouard Philippe peut offrir un visage beaucoup moins avenant : « Une arrogance, un excès de confiance en soi » pour « un audacieux dont les ambitions étranglent la témérité ». Comme le rapporte Mediapart, la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) lui a adressé un blâme à propos de sa déclaration de patrimoine de 2014 : il a systématiquement répondu « aucune idée » au sujet de l’évaluation de ses biens. Quant à ses honoraires dans un cabinet d’avocat, il écrit : « Vous voulez connaître mon taux horaire au jour de l’élection ? » Malgré une relance de la HATVP, Edouard Philippe aurait refusé d’estimer la valeur de ses propriétés. Outre cette phobie administrative, il a une « peur absurde » des requins ou du dentiste. En revanche, il nourrit un amour des lettres. Il a coécrit un polar, Dans l’ombre. Le pitch ? Une campagne présidentielle hystérisée par des morts suspectes et des rumeurs de fraude. Autre pépite : Edouard Philippe imite ses collègues. Il a livré sur Europe 1 une imitation plutôt réussie de Valéry Giscard d’Estaing. Et quand il ne tape pas sur ses adversaires politiques, il enfile des gants de boxe trois fois par semaine, rapporte L’Opinion en août 2015. Le noble art « m’a probablement rendu plus calme », indiquait-il alors.