Grossesse et alcool, un interdit pas toujours clair
Si le message « zéro alcool durant la grossesse » est passé, des questions demeurent
La nouvelle est plutôt bonne. Une enquête sur des forums de discussion publiée ce mardi par Santé publique France dévoile que le message de prévention « zéro alcool durant la grossesse » est passé auprès des femmes enceintes. De nombreuses questions restent toutefois en suspens. D’autant que, selon la sociologue Stéphanie Toutain, auteure de l’enquête, « le discours des gynécos est très hétérogène. Les plus âgés ont tendance à dire qu’un verre de temps en temps ce n’est pas bien grave. » Qu’en est-il réélement ?
Quand faut-il s’arrêter de boire ? Philippe Deruelle, secrétaire général du Collège national des gynécologues et obstétriciens, relève un paradoxe : « On dit zéro alcool, mais, souvent, les femmes s’aperçoivent qu’elles ont bu un verre ou deux avant de se savoir enceinte. » D’autres, qui n’en sont encore qu’au projet de grossesse, ne veulent pas s’abstenir. « Elles concentrent les soirées de “binge-drinking” [alcoolisation massive] sur la première période de leur cycle menstruel », indique Stéphanie Toutain. Espérant ainsi ne pas prendre de risque, même si elles tombent enceintes… Malheureusement, « une femme ne fait pas du “binge-drinking” seule, souligne Philippe Deruelle. L’exposition du père à la cigarette, à l’alcool, qui a des effets négatifs sur les spermatozoïdes, et à l’obésité a aussi un impact sur l’avenir du bébé. » Et le professeur de rappeler que des problèmes peuvent intervenir très tôt durant la grossesse : « Pendant les trois premiers mois, le foetus peut développer des malformations d’organes et du cerveau. A partir du 4e mois, il risque d’avoir un retard mental et de croissance. Or, l’échographie, qui permet de voir certaines malformations, ne dévoile pas le retard mental. » Ainsi, pour Stéphanie Toutain, « le mieux serait d’arrêter de boire dès qu’on a un projet de conception ».
Y a-t-il des alcools plus dangereux que d’autres ? Pas du tout, car c’est l’éthanol, présent dans tous les alcools, qui est en cause. « Le vin n’est pas mieux que la bière ! » tranche le médecin.
Jusqu’à quand s’abstenir ? L’abstinence doit durer jusqu’à l’accouche- ment, et après s’il y a allaitement, « parce que le cerveau du bébé va continuer à se former jusqu’au dernier mois de grossesse », insiste Philippe Deruelle. Mais, si l’on n’arrive pas à décrocher, mieux vaut se faire aider. « Il faut en discuter avec un praticien qui ne va pas juger. Et le sport peut aider. Contrairement à ce qui a été longtemps dit, en faire pendant la grossesse ne provoque pas de fausse couche ! »