Un photographe suspecté d’avoir violé des modèles
Le trentenaire a été placé en détention provisoire
«Quand il m’a contactée, j’étais presque flattée qu’il s’intéresse à moi », se remémore Solène*, jolie liane de 24 ans. Un message sur Facebook d’un photographe de mode, cela n’arrive pas tous les quatre matins. Yannick D. est relativement connu dans le milieu, il a « shooté » des pubs, des stars de téléréalité, a travaillé avec des agences… En octobre 2016, l’artiste propose à Solène de l’aider à constituer son book « mode » contre une séance de nu artistique. « Je lui ai envoyé un texto pour lui dire ce que j’étais prête à faire, rien de trash, de trop suggestif. Il m’a immédiatement rassurée », précise-t-elle. La séance, dans un studio de SaintOuen (Seine-Saint-Denis), commence par la série mode. « L’ambiance était un peu oppressante, mais la mode est un milieu sexiste. » Solène reste sur ses gardes, sans pour autant s’alarmer. Mais à peine se déshabille-t-elle que la situation dégénère. Selon son récit, Yannick D. aurait tenté de lui toucher le sexe. « Je me suis levée et j’ai voulu partir, mais la porte du studio était fermée. Et j’avais oublié mon téléphone… » Elle se sent prise au piège. Yannick D. l’aurait ensuite forcée à « prendre la pose dans des positions très dégradantes ». « J’étais persuadée qu’il allait me violer, plus je le suppliais d’arrêter, plus il rigolait », raconte-t-elle. Au bout d’une demi-heure, une « éternité » à ses yeux, le « calvaire » s’arrête. L’enquête sur ce photographe de 37 ans a démarré en novembre 2016 à la suite de la plainte d’une mannequin. Selon des sources proches du dossier, neuf femmes, de 18 à 33 ans, se disent victimes des agissements de Yannick D. Le parquet de Nanterre a ouvert une information judiciaire pour viols (sur deux jeunes femmes) et agressions sexuelles en décembre 2016. Le photographe, mis en examen, a été placé en détention provisoire. Il nie fermement. Selon les premiers éléments de l’enquête, les faits se seraient à chaque fois déroulés lors de séances photos, entre 2014 et 2016. Agathe*, 33 ans, est l’une des premières femmes du dossier à avoir croisé sa route. Comme Solène, le photographe lui propose de l’aider à constituer son book contre des photos de nu. Elle accepte de faire du « porno chic ». Pour les clichés osés, « il a voulu que je pose nue avec une arme à feu », se souvient-elle. Aujourd’hui encore, elle ignore si ces dernières étaient factices. Le photographe lui aurait repris l’arme avant de se déshabiller à son tour. Il aurait ensuite exigé d’elle une fellation puis lui aurait imposé un rapport sexuel. « Quand il m’a demandé de m’allonger, je l’ai fait. J’étais pétrifiée, je pleurais comme une enfant. » Pendant des années, elle n’en parle à personne. Elle évoque, pêle-mêle, le sentiment de honte, de culpabilité, la crainte de ne pas être crue ou d’être traînée dans la boue. « C’était quelqu’un de connu, les gens l’auraient défendu. » Solène et Agathe ont tourné le dos au mannequinat. L’une comme l’autre désirent que leurs témoignages servent à d’autres. Depuis plusieurs mois, des affaires similaires ont défrayé la chronique. La dernière en date met en cause un photographe de renommée mondiale, David Hamilton, qui s’est suicidé alors que la polémique enflait. * Les prénoms ont été changés.
« J’ai voulu partir, mais la porte du studio était fermée. » Solène, l’une des victimes supposées du photographe