La Seine-Saint-Denis voit rouge
Faute d’accord national, les candidats de La France insoumise et du PCF s’affronteront
«Nous ne sommes pas des aventuriers qui réalisons des carrières individuelles. Nous formons une équipe », a lancé, mardi, Jean-Luc Mélenchon, devant la mairie de Saint-Ouen. Le patron de La France insoumise (FI) est venu apporter sa verve et sa notoriété à ses lieutenants de Seine-Saint-Denis, où il a obtenu ses meilleurs scores au premier tour de la présidentielle, avec 34, 03 % des voix. « Dans ce département né rouge, l’influence communiste n’a fait que décroître à partir des années 1980, retrace l’historien Roger Martelli. L’affaiblissement local du PCF a d’abord bénéficié à la droite, qui a récupéré des villes, et, dans les années 1990, le PS a pris la relève. Jean-Luc Mélenchon a redonné des couleurs à cette partie de l’ancienne banlieue rouge. » Eric Coquerel, candidat FI dans la 1re circonscription, abonde : « Il a réussi à repolitiser les quartiers populaires. Cette France nouvelle, diverse, jeune, de toutes origines, qu’est le 93 (…) aurait pu se tourner vers l’abstention, mais elle a été sensible [à son] discours d’émancipation. » L’élan du premier tour sera-t-il toutefois suffisant pour retapisser de rouge la Seine-Saint-Denis lors des législatives? La partie s’annonce serrée.
Mauvais « paternalisme »
Faute d’accord national, PCF et France insoumise s’affrontent dans neuf des douze circonscriptions du département. « On a fait un gros travail pour la campagne de Mélenchon (…). Et, derrière, on n’a pas été traité de manière très juste… Pour nous qui vivons ici toute l’année, qui nous battons au quotidien contre la droite, on ressent ça comme du paternalisme de mauvais aloi », s’agace Frédéric Durand, élu à Saint-Ouen opposé à Eric Coquerel. « Personne ne fera le plein de voix et nous pouvons perdre, car la droite, voyant nos divisions, s’est pleinement engagée dans la campagne », craint-il. La partie sera d’autant plus compliquée que les anciens du Front de gauche auront à affronter des candidats La République en marche, mais aussi des socialistes et des écologistes. Marie-George Buffet, candidate PCF à sa réélection dans la 4e circonscription, sans candidat insoumis face à elle, « regrette profondément que la négociation ait échoué ». « Les gens ne comprennent pas. Pour eux, le vote Mélenchon nous englobait. Le naturel était qu’on soit uni à la sortie. » L’ex-ministre tente de garder espoir : « Il faut se parler, car il y aura un second tour. Partout où il y aura un candidat communiste ou FI, il faudra se rassembler. »