20 Minutes

Des regrets aux Tarterêts

La rénovation du quartier ne fait pas que des heureux

- Camille Anger

La préparatio­n du carnaval de Corbeil-Essonnes, qui s’est déroulé samedi, a été l’occasion de réunir Koumba, arrivée dans cette commune de l’Essonne à l’âge de 21 ans, et son amie Fatimata. Cette dernière n’aurait manqué pour rien au monde l’événement qui lui a permis de retrouver les Tarterêts, un quartier qu’elle a quitté il y a bien longtemps et qui est désormais en pleine mutation. Depuis 2004, 13 tours y ont été détruites. Et, selon le plan de renouvelle­ment urbain de la commune, il reste encore à déloger les locataires des quatre tours des rues Paul-Gauguin et Paul-Cézanne, soit un millier de personnes. Fatimata a vécu dans ces immeubles hauts de 15 étages. Elle regrette cette époque où, selon elle, « le loyer était parfait ». Aujourd’hui, elle verse 300 € de plus pour son logement, qui est « une fausse maison sociale. Les loyers modérés ne sont pas à la portée de tout le monde », décrit la quadragéna­ire. Guylain, 40 ans, habite dans l’une des tours rénovées de l’avenue Léon-Blum. Ce père de deux enfants s’en sort parce que le loyer qu’il verse à la la CroixRouge est calculé en fonction de ses revenus, « 15 % » de ceux-ci.

Loyers plus élevés

Des surfaces moindres pour un loyer plus cher : Eric Breton, adjoint au maire chargé de la politique de la ville, admet cette réalité. Le directeur de l’école Jacques-Prévert a aussi remarqué le désarroi d’un couple réinstallé en centre-ville. « Ils n’ont pas retrouvé le lien social tissé sur des années avec leurs voisins et commerçant­s des Tarterêts. » L’élu, conscient de devoir « reconstrui­re des logements avant d’en détruire », aimerait rassurer « les 90 % des locataires désireux de rester dans le quartier ». Or, à ce jour, il n’a aucune garantie de pouvoir le faire : « Le nouveau programme national de renouvelle­ment urbain (NPNRU) prévoit le désenclave­ment du quartier et cela suppose un relogement dans d’autres secteurs. » Zahia, qui habite l’une des tours menacées de destructio­n, regrette déjà le futur déménageme­nt. « L’école, les transports, les amis, tout est là pour les enfants », lance-t-elle. Arrivée d’Algérie dans les années 2000, cette employée de restaurati­on collective n’a « jamais eu de souci aux Tarterêts ». D’autres, en revanche, n’attendent qu’une chose : partir. Danielle a déchanté depuis le temps où, nourrice, elle guettait la fin de la constructi­on des tours de la rue Paul-Gauguin, dans les années 1970. Cette mère de famille ne jouit plus de son petit jardin en rez-dechaussée de l’immeuble où elle ramasse de nombreux détritus jetés depuis les étages. Outre les « serviettes hygiénique­s, voire des culottes », elle a constaté la présence de rats. La quinquagén­aire en est à sa 24e demande de logement auprès de la mairie de Corbeil-Essonnes, en vain. « S’il fallait bouger à Juvisy-sur-Orge, j’irais », confiet-elle.

 ??  ?? L’une des quatre tours destinées à être démolies dans le quartier.
L’une des quatre tours destinées à être démolies dans le quartier.

Newspapers in French

Newspapers from France