Les retraites, l’autre grand chantier du gouvernement
Il aura la délicate mission de mettre en oeuvre la réforme voulue par le président
Sa tâche s’annonce ardue. Le haut-commissaire chargé de mettre en oeuvre la réforme des retraites voulue par Emmanuel Macron doit être officiellement nommé ce jeudi. Comme expliqué dans son programme, le chef de l’Etat ambitionne de créer un « système universel » de retraite, pour remplacer les nombreux dispositifs qui cohabitent aujourd’hui. Il aura à trancher entre un système à points, comme c’est déjà le cas pour les retraites complémentaires, et les « comptes notionnels » du modèle suédois. Un terme obscur décrypté par JeanMarie Harribey, ancien coprésident des Economistes atterrés : « On crée, pour chaque salarié, un compte virtuel sur lequel sont inscrites les cotisations retraites prélevées chaque mois. A l’âge de la retraite, on regarde la somme des cotisations versées et l’espérance de vie de la classe d’âge. Ensuite, on divise le total des cotisations par cette espérance de vie. » Selon le programme présidentiel, cette réforme a plusieurs avantages : garder un régime par répartition (les cotisations des actifs financent les pensions des retraités), connaître ses droits à la retraite « en temps réel » (une application doit être développée) et « choisir son âge de départ », a fortiori le montant de sa pension.
Espérance de vie, pénibilité
Pour Frédéric Bizard, professeur à Sciences Po et auteur de Protection sociale : pour un nouveau modèle (Dunod),la philosophie de la réforme va dans le bon sens. « Le régime actuel fonctionne en considérant que les actifs ont des carrières professionnelles relativement homogènes. Or, aujourd’hui, les gens sont de plus en plus nombreux à changer fréquemment d’employeur, ou à cumuler plusieurs métiers en même temps. Le système de protection sociale, basé sur les statuts, n’est plus adapté à cette nouvelle forme d’organisation du travail. » Le haut-commissaire devra toutefois écouter les arguments des opposants au futur système. Pierre-Yves Chanu, spécialiste du sujet au pôle économique de la CGT, pointe le problème de l’espérance de vie, différente selon que l’on a été cadre ou ouvrier dans le bâtiment. Le programme d’Emmanuel Macron affirme que la pénibilité « sera toujours prise en compte », sans donner plus de détails. Les débats sur la manière de quantifier la pénibilité et les compensations à prévoir en matière de retraite ne manqueront donc pas de ressurgir. En mai, Emmanuel Macron avait déclaré que le nouveau système « monterait progressivement en charge ». « Les Suédois ont mis douze ans pour installer le leur », rappelle Pierre-Yves Chanu.