20 Minutes

Le graff vandale, tout un art

« 20 Minutes » a passé une soirée avec deux graffeurs

- Emilie Petit

Seuls quelques néons jaunâtres éclairent cette longue avenue de Paris. Exposée, mais pas trop. Juste ce qu’il faut. Miaou2 traîne derrière elle son chariot bourré à craquer de bombes de peinture et de rouleaux. Inxy, son acolyte, ouvre la marche. C’est lui qui s’est occupé d’organiser la soirée. Rendez-vous est fixé à 22h30, près d’un arrêt de tram. Quelques bières avalées histoire de s’ambiancer, puis direction le mur. Celui sur lequel ils vont assouvir la passion qui les anime depuis l’adolescenc­e : le graffiti. Mais « à la vandale ». Celui réalisé sur des murs non autorisés. « Plus excitant », affirme Miaou2. Mais si la police passe par là, les deux graffeurs risquent gros. « Le vandale, ça vaut cher maintenant. Les amendes, ça rigole pas », reconnaît la jeune femme. Aujourd’hui, le montant de la contravent­ion pour un tag ou un graff classique est de 3 750 €. Il peut grimper jusqu’à 30 000 € et deux ans d’emprisonne­ment si la surface recouverte est importante et qu’il s’agit de peinture indélébile.

De la rue aux galeries

Pas de quoi faire remballer aux deux graffeurs leur rouleaux et leurs caps (les embouts interchang­eables pour bombes de peintures). « Le graffiti, c’est l’un des cinq piliers du hip-hop. C’est une discipline, tout comme le rap, la breakdance, le Djing et le beatmaker », assènent-ils. C’est aussi du partage et beaucoup de tolérance. Quant à leur terrain de jeu, Paris, ils sont unanimes, « c’est quand même une super-ville. Tu peux peindre partout, même sous la pluie ! » Ce soir-là, ce sera du classique : leur blaze (leur surnom), en gros, sur toute la hauteur du mur, et l’incontourn­able nom de leur crew (leur bande) – MCT – pour marquer leur appartenan­ce. Ils peindront avec la même rage et la même passion qu’à leurs débuts, il y a vingt ans. « Le graff, c’est une invitation. Une connexion. Moi, quand on m’a proposé d’entrer à MCT, j’étais super fière. Le crew, il est aussi vieux que moi [MCT a été formé en 1983] ! » se souvient Miaou2. Ces dernières années, le graffiti a gagné ses lettres de noblesse. En témoignent les artistes comme Marko 93 (aka Dark Vapor), ou encore Zenoy et Vision qui, reconnus pour leur art, exposent aujourd’hui dans des galeries. Une tendance dont s’amuse Inxy : « Les gens ont du mal à comprendre que ces artistes, qu’ils voient dans les galeries, ce sont les mêmes qui, il y a vingt ans, faisaient des tags dans le métro. »

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Graffer la nuit, sur un mur non autorisé, « c’est plus excitant », note Miaou2.

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