L’Arménie, son autre terre
Charles Aznavour a représenté et soutenu le pays de ses parents après le séisme de décembre 1988
En plus d’être devenu un monstre sacré de la culture française, Charles Aznavour était aussi l’un des plus ardents porte-drapeaux de la diaspora arménienne. Il aura entretenu avec l’Arménie, pays de ses parents, des liens étroits tout au long de sa vie. La manifestation la plus tangible de ces liens date de décembre 1988, après le tremblement de terre qui dévaste le nord du pays et fait 25 000 morts dans la seule ville de Spitak. Le chanteur crée alors le comité «Aznavour pour l’Arménie» pour collecter des fonds. Avant de se rendre sur place, il écrit la chanson «Pour toi Arménie». Elle est enregistrée début 1989 avec 90 artistes (dont Gilbert Bécaud, Johnny Hallyday et Renaud) et se vendra à plus d’un million d’exemplaires. Né en 1924 à Paris Charles Varenagh Aznavourian, Aznavour aurait dû porter le prénom arménien de Shahnourh, finalement francisé en Charles par la sage-femme, révèle une biographie parue en 2006. En 2008, Charles Aznavour se voit octroyer la nationalité arménienne. Un an plus tard, il est nommé ambassadeur permanent d’Arménie en Suisse par l’Unesco et représentant du pays à l’Organisation des Nations unies. « Jusqu’ici, je disais toujours : “Je suis français d’origine arménienne”, confiait à Paris Match celui qui mit les pieds en Arménie vers 1963-1964, dans le cadre d’une tournée mondiale. Après le choc, je me suis rendu compte que j’étais vraiment d’origine arménienne. » L’ancien président arménien Serge Sarkissian voyait en lui « l’Arménien le plus célèbre de la planète». «Charles Aznavour essaie de servir les intérêts de politique étrangère de notre pays et d’être utile à notre patrie », affirmait-il à propos du chanteur, décoré en 2004 de la médaille de « héros national ». Pour le 60e anniversaire du génocide arménien, Aznavour avait interprété en 1975 à la Salle Pleyel à Paris « Ils sont tombés » : « La mort les a frappés sans demander leur âge / Puisqu’ils étaient fautifs d’être enfants d’Arménie », disait le texte. La musique était signée par son beau-frère Georges Garvarentz (fils du poète Kevork Garvarentz, auteur de l’hymne national révolutionnaire arménien). Vingt-trois ans plus tard, Aznavour s’était déclaré « soulagé » après le vote de l’Assemblée nationale reconnaissant « politiquement » au nom de la France « le génocide arménien de 1915 », car « tout peuple a le droit d’écrire son histoire et les Arméniens ont été gommés de la face du monde ».
«Après le choc, je me suis rendu compte que j’étais d’origine arménienne. » Charles Aznavour