« Il faut arrêter le massacre »
Une association dénonce la politique de dératisation de la Ville
Fumigènes, appâts, produits anticoagulants, nasses, stérilisation… Depuis des mois, les idées et initiatives pour éradiquer les rats dans la capitale fleurissent. Présentée comme un « fléau » ou une « urgence sanitaire» par des élus et des syndicats, leur présence dans les rues, les parcs et le métro inquiète. «La nuit, c’est “rats land”, ils se baladent librement entre le cinéma, les restaurants, etc.», témoignait récemment auprès de 20 Minutes Marie, une Francilienne. Fin 2016, la Mairie a lancé un plan de 1,5 million d’euros pour éliminer les rongeurs. Depuis, elle affirme avoir augmenté le nombre d’interventions. Près de 5000 de janvier à juillet, contre 1700 pour la même période l’an passé. Mais, pour l’association Paris Animaux Zoopolis, qui se bat pour l’intérêt des animaux sans distinction d’espèces, il faut «arrêter le massacre». Elle dévoile ce jeudi une opération d’affichage dans les couloirs et quais de la RATP.
« Casser les clichés »
L’idée : « Casser les clichés que peuvent avoir les Parisiens sur les rats, annonce Philippe Reigné, cofondateur de l’association. Ils ne sont pas une menace, ils ne sont pas sales ni dangereux. Ils ont le droit de vivre.» Avec cette campagne, l’association veut aussi s’opposer à la politique de dératisation de la Ville et de la préfecture de police. «Leur argument de santé publique est erroné», poursuit celui qui en veut pour preuve la page consacrée au sujet sur le site de la Mairie : «Comment Paris lutte contre les rats» et cet encadré qui indique que « le risque sanitaire est minime ». « En fait, ils tuent les rats uniquement pour des raisons d’image, insiste Philippe Reigné. Mais ils reviendront et sont de plus en plus résistants.» D’après Pierre Falgayrac, expert en hygiène et sécurité contacté par 20 Minutes en mars, «l’extermination d’une espèce qui était présente avant nous sur la Terre est impossible, et non souhaitable, vu leur utilité». Selon lui, «les rats mangent 25 g de déchets par jour. Chacun d’entre eux nous débarrasse donc de 9 kg de déchets au cours de sa vie [la durée de vie moyenne d’un rat est d’un an]. »
En septembre, la Ville a lancé une étude destinée à mettre au point un anticoagulant plus efficace, tant les rats tiennent tête. « Ça coûte beaucoup d’argent, ça ne sert à rien et c’est cruel », répond Philippe Reigné. Les experts estiment qu’il y a près de quatre millions de rongeurs à Paris. Selon la Mairie, leur recrudescence s’explique par l’augmentation des déchets alimentaires et les crues de la Seine. Pour Philippe Reigné, elle est due, entre autres, aux travaux du Grand Paris. « Il faut vivre avec les rongeurs, nous pouvons nous en ac- commoder, la ville n’est pas réservée qu’aux humains», martèle le militant qui dénonce la tournure «politique» que prend le sujet.
Par exemple, Geoffroy Boulard, maire (LR) du 17e, est allé à New York pour découvrir des méthodes d’éradication. « Ces élus jouent sur la peur, tacle Philippe Reigné. Et la Mairie joue le jeu. »