20 Minutes

L’amertume des jeunes électeurs

Etudiants, travailleu­rs... Trois témoins confient leur crainte en l’avenir à quelques jours du premier tour de la présidenti­elle

- A São Paulo et Rio de Janeiro, Amélie Perraud-Boulard et Corentin Chauvel

Dimanche, Nataly, Isaura et Igor iront voter pour la première fois à une élection présidenti­elle. A quelques jours du premier tour, comme beaucoup de Brésiliens issus d’un milieu modeste, ces trois jeunes de 18 à 21 ans, perdus ou sans aucune foi en la politique, n’ont pas encore fait leur choix parmi les 13 candidats.

« Je suis à moitié perdu »

« J’ai vu beaucoup d’hommes politiques promettre des choses et ne rien faire, donc cela ne donne pas envie d’y croire», soupire Isaura, qui vit dans une favela de Rio. Nataly, de Sao Paulo, est plus radicale : « Je pense que les hommes politiques volent notre argent et la révélation des différents scandales de corruption n’a fait qu’aggraver l’opinion que j’avais de la classe politique. » Et Igor, développeu­r de 21 ans de Vitoria (Espirito Santo), de s’interroger : « Je suis à moitié perdu, aucun de ces candidats ne me représente. »

« Ce que l’on constate dans cette campagne, c’est que le discrédit de la classe politique est très fort, y compris chez les jeunes, analyse Frederico de Almeida, professeur de sciences politiques à l’université de Campinas (Unicamp). Cela en conduit certains à faire le choix d’un candidat antisystèm­e, Jair Bolsonaro [en tête des intentions de vote], mais pas nécessaire­ment. Il y a eu ces dernières années des mouvements intéressan­ts dans la jeunesse brésilienn­e, notamment chez les étudiants, avec une perspectiv­e anti-partisane, apolitique, le sens d’une action collective, mais pas forcément dans un sens autoritair­e et conservate­ur comme ce que propose Jair Bolsonaro. » Le candidat d’extrême droite est en effet le seul pour lequel nos trois jeunes sont certains de ne pas voter, rejetant son « discours de haine », son racisme, son homophobie ou encore sa misogynie. Alors, comment et, surtout, qui choisir d’autre ?

« On souffre principale­ment d’un grand manque d’informatio­n. Je sais qui est candidat, mais je ne suis pas forcément capable de vous parler de leur programme », regrette Nataly, qui, comme ses deux homologues, utilise Internet pour tenter de trouver chaussure à son pied. Isaura, elle, s’en remettra sans doute au choix de sa mère, plus au fait des programmes. Malgré cela, leur conscience politique n’est pas inexistant­e. Mais, avec 26,6 % des 18-24 ans au chômage au Brésil (contre 12,4 % pour l’ensemble de la population), les grands discours des candidats sur l’économie et l’emploi ne leur parlent pas. Igor travaille le jour pour l’équivalent de 250 € par mois et étudie le soir. Isaura, elle, termine difficilem­ent ses études secondaire­s. Ainsi, qui que soit le prochain dirigeant du Brésil, nos témoins ne se font pas trop d’illusions.

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Isaura, Igor et Nataly ne savent toujours pas pour qui voter dimanche.
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