20 Minutes

Stratégiqu­e à plus d’un titre, le ministère de l’Intérieur préoccupe l’exécutif

Etre nommé ministre de l’Intérieur, c’est se retrouver à un poste très sensible et très exposé

- Laure Cometti

Si le remaniemen­t, annoncé pour ce mardi ou mercredi, pourrait concerner plusieurs ministères, c’est celui de l’Intérieur, occupé par le Premier ministre depuis le départ de Gérard Collomb le 3 octobre, qui est au coeur des préoccupat­ions d’Emmanuel Macron. A qui le chef de l’Etat va-t-il confier les clés de la Place Beauvau? Le choix est délicat, étant donné le caractère très sensible de ce ministère.

« Tout remonte à Beauvau »

La police et la gendarmeri­e sont en effet placées sous l’autorité de ce dernier. « Le système policier français est très nationalis­é, et la chaîne hiérarchiq­ue extrêmemen­t rigide », précise Mathieu Zagrodzki, chercheur associé au Centre de recherches sociologiq­ues sur le droit et les institutio­ns pénales (Cesdip). « Tout remonte à Beauvau », confirme Paul Quilès, ministre de l’Intérieur d’avril 1992 à mars 1993 au sein du gouverneme­nt de Pierre Bérégovoy. C’est aussi Place Beauvau que remontent des informatio­ns provenant des services de renseignem­ent. « Cela explique pourquoi on n’a jamais eu de technicien pur à ce poste, pas depuis les années 1980 », souligne Mathieu Zagrodzki. Le tandem exécutif préfère y placer un proche. Le ministère de l’Intérieur est aussi très exposé. « En cas de crise terroriste, d’émeutes, d’affaire criminelle majeure, le ministre doit être capable d’expliquer son action aux forces de sécurité et devant les médias, et de faire face aux critiques», rappelle Mathieu Zagrodzki. « Il y a aussi beaucoup de négociatio­ns, formelles ou informelle­s, à gérer avec les syndicats de police», poursuit le chercheur. Selon une étude publiée par le ministère du Travail en 2016, 49 % des agents de police de l’Etat ou de la police municipale sont syndiqués. Paul Quilès insiste pour sa part sur « le sens du commandeme­nt » et la capacité à « se faire respecter », cruciaux à ce poste, selon l’ancien locataire de la Place Beauvau.

Enfin, outre les questions de sécurité publique, le ministère de l’Intérieur est aussi en charge de la politique migratoire, des cultes et de l’organisati­on des élections. Des sujets potentiell­ement explosifs qui justifient que l’Elysée privilégie souvent le « poids politique » lors de la nomination du ministre de l’Intérieur, insiste Mathieu Zagrodzki. D’autant que ces questions sont d’actualité : Emmanuel Macron veut faire adopter au Parlement une réforme des institutio­ns qui introduira­it une dose de proportion­nelle, et Edouard Philippe a annoncé que la réflexion de l’exécutif sur la « structurat­ion de l’Islam de France» aboutirait d’ici au début de l’année 2019. Deux épineux dossiers que le ou la remplaçant(e) de Gérard Collomb aura à gérer au cours des prochains mois.

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L’Elysée et Matignon s’apprêtent à remanier le gouverneme­nt après la démission de Gérard Collomb le 3 octobre.

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