20 Minutes

Les pros sans pitié pour de téméraires amateurs

Des joueurs écument les tournois pros sans marquer un seul point

- Bertrand Volpilhac

«Je menais 40-15, j’ai servi, il a tout renvoyé, puis a fini par avoir le dernier mot. Ça se passe toujours comme ça.» Cette fois, Ramy Ezat y a vraiment cru. Opposé au Malgache Lofo Ramiaraman­ana au premier tour des qualificat­ions du tournoi de tennis Future de Nevers (Nièvre) fin septembre, ce Français de 26 ans assure avoir «bien fait galérer son adversaire».

C’est relatif : 6-0, 6-0 pour le Malgache et seulement dix points marqués par Ezat, rapporte Le Journal du Centre. Un mauvais jour? Pas vraiment. C’est la sixième fois depuis 2017 qu’il prend la double bulle, 6-0, 6-0, au premier

« Je prends ces risques peutêtre parce que je suis fou. »

Ramy Ezat

tour des qualifs de ce type de tournoi. Son dernier adversaire en date, Quentin Gueydan, a même réussi le «golden match», gagner sans perdre le moindre point. «Il n’a pas du tout le niveau pour jouer à ce niveau-là, raconte Gueydan. Il arrive avec une raquette, un sac Louis Vuitton et une casquette Ralph Lauren, pas exactement la dégaine d’un tennisman.»

Pour qu’un joueur aussi mal classé que lui (30/3, l’un des plus faibles classement­s) se retrouve à affronter des pros dans des tournois Futures, il faut s’accrocher : d’abord s’offrir la licence internatio­nale IPIN, s’inscrire sur la liste d’attente des tournois et espérer que des joueurs mieux classés que lui se désistent. Et tout ça représente un sacré budget : comptez 50 € la licence, 50 € la nuit Airbnb, le train, l’inscriptio­n… « C’est ma vie, ma passion et j’essaie de faire de mon mieux. C’est dommage que je galère, explique Ezat. Je prends ces risques peut-être parce que je suis fou, parce que je suis malade. »

Notre amateur est loin d’être le seul à vivre cette vie. Quentin Gueydan confirme avoir déjà rencontré un Britanniqu­e, «un tout petit peu meilleur », et un Russe dans le même genre. « Attendez, moi je sais jouer, coupe Ramy Ezat. Une fois, j’avais une mauvaise raquette et une autre fois j’ai tellement stressé la nuit d’avant que je n’ai pas dormi. Je préfère jouer contre des pros. Ça me procure des sensations inexplicab­les. Ce n’est pas donné à tout le monde de vivre ça. Je suis capable d’aller jusqu’en Australie prendre un 6-0, 6-0. Tant que je joue le match, ça va.»

Avant de traverser le Pacifique, Ezat a d’autres ambitions : «Vous allez rire, mais je veux jouer à Roland-Garros, c’est mon rêve ultime. Une fois, j’étais sur place pour voir les matchs, et j’ai croisé le président de la fédération de tennis. Je lui ai demandé si je pouvais jouer. Il m’a dit que ce n’était pas possible, qu’il fallait avoir un bien meilleur classement. »

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Certains joueurs amateurs n’hésitent pas à tenter leurs chances chez les pros.

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