Retour à la case départ en Espagne
Privé de Mondial, le XV de Leon rejoue son premier match depuis l’énorme scandale d’arbitrage lors du match face à la Belgique
«J’en étais presque à me dire que les gens s’acharnaient sur moi. C’était un cauchemar.» Lucas Guillaume risque de vivre un drôle de samedi. Pour la première fois depuis « le match de la honte », il va enfiler le maillot de l’Espagne, pour affronter la Namibie. Comme si de rien n’était, ou presque. Depuis le 18 mars, et l’élimination grotesque du XV de León au Mondial, à cause d’un arbitre roumain très contesté, ce qui a engendré quelques débordements en fin de match, Guillaume a été suspendu 14 semaines, sans aucune preuve, licencié par son club de Narbonne et recueilli par les amateurs de l’Alcobendas Madrid. « Durant tout ce temps, la Fédération espagnole de rugby ne m’a jamais abandonné, témoigne Lucas Guillaume. Ils ont sans doute fait des erreurs au niveau de l’inéligibilité de certains joueurs [le motif choisi par les instances pour disqualifier l’Espagne du Mondial], mais ils nous ont toujours soutenus. Je suis logé et nourri, c’est déjà pas mal. Au moins, je n’aurai pas de problèmes pour me libérer pour aller jouer avec la sélection.» Comme samedi, donc, face à la Namibie. Autour du troisième ligne, tout a changé. Des 15 titulaires en Belgique, il est le seul «survivant». Capitaine le 18 mars, Gautier Gibouin explique son absence samedi : «Avec l’objectif de qualif pour le Mondial, j’avais fait de gros efforts vis-à-vis de mon club [Nevers] pour me rendre disponible. Maintenant qu’il n’y a plus cet objectif, je reste avec le club. C’était entendu comme ça avec le sélectionneur.» Beaucoup sont dans ce cas. D’autres, avec la jurisprudence de la nouvelle règle sur la nationalité sportive, se retrouvent «apatrides», comme Mathieu Bélie. Forcément, c’est tout le rugby ibérique qui est secoué. ««a a été un printemps et un été difficiles, reconnaît Jean-Michel Aguirre, ambassadeur pour la fédération espagnole en France. On est sorti bien mâché de cette affaire. Vous savez comme c’est difficile de se mettre d’accord entre les clubs et le XV de France. Imaginez les envies de rétention des clubs, quand il s’agit de lâcher un joueur qui veut aller avec l’Espagne. » Désormais privés de ses meilleurs joueurs et d’objectif Coupe du monde, les Leones vivent un retour de «dix ans en arrière».
« Le ciel nous est tombé sur la tête, ça a tué tout le travail, tout l’engouement qui avait été créé en Espagne, reprend Gautier Gibouin. J’ai l’impression que World Rugby [la fédération internationale] essaie de compenser en nous donnant des super test-matchs en novembre. L’an passé, on avait une très bonne équipe et on jouait le Brésil. Là, il n’y a plus personne, et on joue les Samoa et la Namibie…»
« Le ciel nous est tombé sur la tête. Ça a tué tout le travail. » Gautier Gibouin