« Plus proches du point de bascule »
Pour le réalisateur Cyril Dion, notre façon de voir le monde et la transition écologique ne cesse d’évoluer, dans le bon sens
Coauteur de Demain, film-tour du monde des solutions individuelles et collectives pour engager la transition écologique (il est sorti en 2015), Cyril Dion revient avec Après demain. Dans ce nouveau documentaire, coréalisé avec la journaliste Laure Noualhat et qui sera diffusé sur France 2 le 11 décembre, le militant écologiste fait le point sur l’avancée des solutions présentées trois ans plus tôt. Un sujet d’autant plus d’actualité que la COP24 a commencé dimanche en Pologne (lire p. 3 et p. 6).
Qu’attendez-vous de cette nouvelle conférence sur les changements climatiques ?
Je ne demande qu’à être surpris… Mais je ne fonde pas de grands espoirs dans cette COP24. Non pas que ce ne soit pas un moment politique important. Mais parce que, pour mener à bien la transition écologique, nous aurons besoin de quelque chose de plus profond encore, de plus révolutionnaire. Or je doute de la capacité des gouvernements en place à engager ces changements radicaux.
Dans Après-Demain, vous tirez un bilan des initiatives présentées en 2015… Quel est-il ?
Ces initiatives se développent et de nouvelles se créent. Est-ce que cela va assez vite? Evidemment, non. Rien qu’en France, les émissions annuelles de gaz à effet de serre (GES) sont reparties à la hausse en augmentant de 3% en 2017. Dans mon travail, je m’intéresse surtout à la question du changement culturel, à ce point de bascule qui, lorsqu’il est atteint, fait que nous changeons notre façon de voir le monde. Et je pense que l’on en est aujourd’hui plus proche qu’en 2015. Il suffit de voir le nombre de papiers des médias sur le réchauffement climatique. En parallèle, il y a cette grogne sociale qui monte contre les inégalités qui se creusent. La révolte des «gilets jaunes» en est, quelque part, l’illustration.
Justement, les « gilets jaunes » ne sont-ils pas la preuve que l’on se mobilise plus aisément pour défendre le pouvoir d’achat que pour défendre l’environnement ? Dans une enquête Ifop pour le JDD (le 17 novembre), 62 % des sondés considéraient que la politique à mener pour ces prochaines années devait être de « donner la priorité au pouvoir d’achat, quitte à aller moins rapidement sur la transition énergétique». En posant la question ainsi, il n’est pas étonnant que les répondants optent pour le pouvoir d’achat, pour ce qui a une incidence directe sur leur quotidien. Mais, si l’on propose aux « gilets jaunes » de descendre dans la rue pour une meilleure répartition des richesses ou pour mettre fin à la non-taxation du kérosène, on obtiendra alors très certainement un «oui» massif. Encore plus même si on s’assure que l’argent ainsi généré servira à la transition énergétique.