Montfermeil en haut de l’affiche
En lice pour les Oscars, « Les Misérables » de Ladj Ly met en lumière la ville de Seine-Saint-Denis, lieu de tournage du film.
« Mais vas-y ! Regarde, Abi, elle a hésité à aller au casting des Misérables et elle s’est retrouvée à Cannes ! » Inscrite au casting d’une série d’Arte sur le hiphop, la jeune fille hésite, puis se résout à y participer, encouragée par les encadrants de l’espace J, centre culturel pour la jeunesse à Montfermeil (SeineSaint-Denis), mercredi après-midi. Le film Les Misérables, en course dimanche pour l’oscar du meilleur film étranger, « a lancé une dynamique positive », explique-t-on à l’espace J, où une partie du casting du film de Ladj Ly s’est déroulée. « Des jeunes veulent faire du cinéma leur métier, constate un encadrant. Avec ce film, ils ont découvert quelque chose. »
« Il y a une fierté, car c’est une production locale, un gars local, des acteurs locaux, ajoute le maire Xavier Lemoine [Parti chrétien-démocrate]. C’est un film juste, car il n’est pas manichéen, et vrai, parce que c’est comme ça que c’était il y a quinze ans. » Il y a quinze ans, c’était le décès de Zyed Benna et Bouna Traoré dans la commune voisine de Clichy-sous-Bois et les émeutes, qui ont, entre autres, enflammé l’ensemble des Bosquets à Montfermeil.
« C’est un film d’espoir, poursuit le maire, car on peut regarder il y a quinze ans ce qu’étaient les choses et comment, collectivement, nous avons pu changer la situation. » Aujourd’hui, la résidence des Bosquets, où est censé se dérouler Les Misérables, a presque disparu. Ne reste plus que le bâtiment B5, dont la destruction est prévue pour l’été prochain. Les grandes barres ont été remplacées par de petits immeubles en locatif social. C’est dans l’un d’entre eux qu’habite Mousba Harb. Cette figure du quartier fait une apparition dans Les Misérables. « Tous les jeunes veulent jouer dans ses films », raconte-t-elle. Intarissable sur Ladj Ly, «ce fils qui a réussi» et qui vient toujours discuter avec elle dans son salon, Mousba Harb rappelle « cette fierté » qu’a procurée le film qui fait « tellement chaud au coeur ».
Vingt-cinq jeunes à Hollywood
Pour porter haut les couleurs de Montfermeil et soutenir Ladj Ly aux Oscars, le club de foot local a monté un projet afin d’envoyer un groupe de jeunes à Hollywood. « On a ouvert une cagnotte en ligne et on a récupéré 23 000 € pour payer les billets, raconte Ahmed Hadef, président du FC Montfermeil. On a aussi eu un peu d’aide de divers partenaires et de la municipalité. » Cette délégation parrainée par Ladj Ly s’est envolée jeudi pour Los Angeles. « C’est un groupe mixte de 25 jeunes, détaille Ahmed Hadef, avec parmi eux cinq jeunes filles de l’école de Ladj Ly, qui viennent pour filmer et produire une minisérie. » Au programme, des visites culturelles, un match de foot face à un club de Los Angeles, une réception au consulat… Avec, en point d’orgue, une éventuelle victoire des Misérables aux Oscars. Mousba Harb y croit très fort : « Tout ce qui est dans le film est vrai, et il n’y a que la vérité qui paie. »