20 Minutes

« Le patrimoine doit venir au secours de la collectivi­té»

Chaque vendredi, un témoin commente un phénomène de société

- Propos recueillis par Benjamin Chapon

« Mettre la fibre optique n’abîme pas les vieilles pierres. »

« Il faut maintenir les sorties scolaires. »

A quelques heures du début des vacances d’été, Stéphane Bern a présenté mardi les 18 lieux de la mission patrimoine 2020. Cette opération (lire l’encadré) permet, avec une loterie nationale de la Française des jeux, de récolter des fonds pour la restaurati­on de lieux patrimonia­ux en péril.

Comment voyez-vous cet été postconfin­ement ?

2020, c’est l’été du patrimoine, assurément. L’occasion nous est donnée, plus que jamais, de redécouvri­r les merveilles et les trésors de notre pays. Parce que les voyages à l’étranger sont compliqués, parce que les touristes étrangers n’encombrero­nt pas les lieux, hélas, et parce que c’est l’occasion d’un tourisme patriotiqu­e, en soutien à l’économie française.

La liste des lieux de la mission patrimoine est-elle une invitation au voyage ?

C’est un appel, un apéritif. Il y a des lieux totalement inconnus, certains fermés au public depuis très longtemps. C’est compliqué de faire cette sélection parce qu’il faut qu’elle soit représenta­tive de toutes les régions, y compris l’outremer, et de tous les types de patrimoine. La sélection est très variée : il y a des ponts, des lieux du patrimoine industriel, des parcs et jardins…

Mais pensez-vous que les Français vont faire leur valise pour aller visiter le séchoir à tabac de Lipsheim, parce que Stéphane Bern leur aura dit que c’était joli ?

J’espère avoir un impact, oui. Que ce soit un peu ou beaucoup ou pas du tout grâce à moi, peu importe. Ce que je constate et qui me rend très heureux, c’est que, de plus en plus souvent, les gens décident de leurs lieux de vacances ou de week-end en fonction du patrimoine.

Lors de la conférence de présentati­on, vous avez aussi appelé à ce que ces lieux, une fois restaurés, ne soient plus seulement des lieux de tourisme. Pourquoi ?

Il faut assigner une seconde vocation à ces lieux pour qu’ils ne restent pas des coquilles vides. A Tréguier (Côtes-d’Armor), le couvent restauré va devenir un centre d’accueil pour les autistes. Et puis tous les châteaux ne sont pas Versailles, on peut modifier les lieux. Les sites patrimonia­ux sont souvent adaptés pour devenir des lieux de coworking, parce que mettre la fibre optique n’abîme pas les vieilles pierres. Le patrimoine doit évoluer et venir au secours de la collectivi­té, qui évolue elle aussi.

Mais il faut d’abord investir pour sauver ces lieux patrimonia­ux. Or l’ambiance n’est pas aux investisse­ments…

Tout le monde sait que le patrimoine peut revivifier, économique­ment, les territoire­s, grâce à des circuits touristiqu­es dans des villes de moins de 2 000 habitants, qui concentren­t l’essentiel des monuments. Je suis très heureux que la SNCF soit partenaire de la mission patrimoine cette année, pour permettre au plus grand nombre d’aller visiter les lieux.

On a tous des souvenirs… contrastés de visites patrimonia­les quand on était enfants. Pour un coup de coeur, combien d’heures d’ennui mortel ? Il faut un accompagne­ment, une éducation au patrimoine, c’est évident. D’ailleurs, les Journées du patrimoine [les

19 et 20 septembre] auront cette année pour thème l’éducation. C’est tout le sens de mon travail à la télévision et de mon engagement personnel, par exemple avec l’associatio­n Les Enfants du patrimoine. Il faut absolument maintenir les sorties scolaires, parce que l’étincelle peut jaillir n’importe où, n’importe quand.

Pour évoquer ces combats, vous parlez de croisade. Pourtant, vous n’êtes pas seul sur ce sujet…

Aujourd’hui, mon discours est beaucoup repris, pas forcément à la télévision, où je suis un peu tout seul, avec Jean-Pierre Pernaut, à parler de patrimoine. Je suis un passeur de patrimoine, mais je ne suis pas seul, c’est vrai. Les guides-conférenci­ers, par exemple, qui ressortent exsangues de la crise du coronaviru­s, sont des relais vitaux. Il faut les aider à tout prix, pour sauver ce réseau.

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«Cet été, l’occasion nous est donnée, plus que jamais, de redécouvri­r les merveilles et les trésors de notre pays», assure l’animateur.

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