«Des réseaux exploitent la toxicomanie de ces jeunes»
Le sociologue Olivier Peyroux analyse la situation d’adolescents à la Goutte-d’Or
En octobre 2016, une trentaine d’enfants et adolescents marocains ont élu domicile dans un square de la Goutted’Or (18e). Accros à la colle, ils multiplient les vols et les agressions de plus en plus violentes. Sociologue à l’association Trajectoires, Olivier Peyroux a participé en 2018 à un rapport commandé par la Mairie de Paris sur la situation de ces mineurs.
Quatre ans après l’arrivée de ces enfants et adolescents, la situation a-t-elle évolué ?
Leur nombre est stable depuis quatre ans. Ils sont toujours une trentaine dans le quartier de la Goutte-d’Or. Certains sont de jeunes mineurs de 13 ou 14 ans, d’autres sont tout juste majeurs. Contrairement à ce qui avait été envisagé à leur arrivée, il ne s’agit ni d’orphelins ni d’enfants de rue. Beaucoup ont une famille avec laquelle ils restent en contact. Il n’y a pas de profil type.
Comment expliquer leur présence ? Appartiennent-ils à des réseaux ?
Certains sont effectivement exploités par des réseaux de traite des êtres humains. Ces derniers ne sont pas très structurés, mais ils exploitent et entretiennent la toxicomanie de ces jeunes pour les pousser à voler pour eux.
Aujourd’hui, ces mineurs sont dans de nombreuses villes…
On a constaté assez rapidement l’installation de groupes de mineurs marocains à Rennes, Lyon, Toulouse ou Nantes. Leur arrivée en banlieue, notamment en Seine-Saint-Denis, est plus tardive.
Comment expliquer qu’aucune prise en charge adaptée n’ait été trouvée ?
La situation de ces mineurs est à la croisée de plusieurs problématiques – la protection de la jeunesse, la justice, la police, la toxicomanie –, mais elle est également relativement nouvelle. Il faudrait des services de police spécialisés et une protection adaptée, car la prise en charge classique ne fonctionne pas. La plupart s’enfuient des foyers dans lesquels ils sont placés.