Une nuit d’ultraviolence
Léa, escort girl de 21 ans, a porté plainte pour un viol dont elle accuse un de ses clients, à Villeneuve-la-Garenne
En France, 13 % des victimes de viol portent plainte, et ce chiffre est probablement plus bas chez les travailleuses du sexe. Sans son petit ami, Léa* ne serait sans doute pas allée au commissariat. Principalement par peur de ne pas être prise au sérieux ou, pire, d'être considérée comme en partie responsable du viol qu'elle venait de subir. «Comme j'étais escort, forcément, je me disais que ça allait être mal vu», raconte la jeune femme de 21 ans. D'autant que personne, parmi ses proches, n'est au courant de ses activités, pas même son petit ami qui, aujourd'hui encore, pense qu'elle s'est fait agresser alors qu'elle rendait visite à une amie. Cela faisait deux ans que Léa se prostituait. Ce soir de janvier, vers 3 h, un trentenaire la contacte sur un site de petites annonces. Il souhaite s'offrir ses services pour une demi-heure, contre 100 €. Une heure plus tard, Léa arrive à Villeneuve-la-Garenne (Hauts-deSeine), où son client lui a donné rendez-vous. «Je préfère aller chez les gens, je trouve ça plus sécurisant puisque je sais où ils habitent », explique-t-elle. Mais, ce soir-là, Léa s'inquiète : celui qui l'attend à l'entrée de la résidence ne correspond en rien à la description qu'il a donnée sur le site.
La jeune escort le suit quelques instants puis décide de faire demi-tour. L'homme tente alors de se faire passer pour un policier pour l'obliger à le suivre avant de la traîner vers un local désaffecté. Selon son récit, son agresseur lui a frappé la tête contre les murs, l'a poussée dans les escaliers avant de la violer sous la menace d'un couteau. « J'ai vraiment cru mourir, que c'était fini pour moi», confie Léa aux enquêteurs. L'homme la laisse partir à condition qu'elle le conduise jusqu'à son sac à main, qu'elle a fait tomber devant le local. « J'ai couru, je n'avais plus mon téléphone, je ne me souvenais plus du chemin avec le stress, je pleurais », poursuit-elle.
En dépit de ses réticences à déposer plainte, ses propos ont immédiatement été pris au sérieux par les enquêteurs. Et pour cause, le récit de
Léa ressemble, presque mot pour mot, à celui de deux autres escorts, mineures, agressées quelques jours auparavant. L'une d'elles n'a pas 15 ans. L'auteur soupçonné, Bilel Y., 24 ans, a été interpellé cinq jours plus tard, mis en examen et placé en détention provisoire. Il nie les faits, s'estimant victime d'une campagne de diffamation lancée par ses accusatrices, qui pourtant ne se connaissent pas. Une information judiciaire a été ouverte par le parquet de Nanterre pour tenter d'identifier d'éventuelles victimes qui n'auraient pas osé franchir les portes d'un commissariat.
« J’ai vraiment cru que c’était fini pour moi.» Léa, escort girl