20 Minutes

Le récit confus du principal accusé

Ayoub El Khazzani, qui a ouvert le feu dans un Thalys en 2015, était entendu devant la cour d’assises spéciale

- Thibaut Chevillard

Les questions s’enchaînent, les réponses restent les mêmes : « Je ne sais pas», «je ne me souviens plus», «j’étais hypnotisé». Jugé par la cour d’assises spéciale à Paris depuis huit jours, Ayoub El Khazzani a livré mercredi sa version des faits. Debout dans le box des accusés, mains croisées, le djihadiste de 31 ans, qui a ouvert le feu dans un Thalys en août 2015, explique laborieuse­ment qu’il ne comptait tirer que sur des soldats américains ou des membres de la Commission européenne présents dans le train. L’accusé a du mal à convaincre. Il est bien monté dans un Thalys en gare de Bruxelles, muni d’une kalachniko­v, de 300 munitions, d’un pistolet Luger et d’un cutter. Mais, à l’en croire, il n’avait pas l’intention de tuer les civils présents dans le train. «Comment avezvous reconnu les Américains?», lui demande le président, Franck Zientara. « Abaaoud m’avait expliqué que c’était des jeunes, costauds, qu’ils parlaient anglais», répond El Khazzani. «C’est tout? C’est quand même très léger», observe le magistrat, qui ne cache pas

Ayoub El Khazzani

son scepticism­e. El Khazzani est ensuite parti s’enfermer dans les toilettes avec sa valise remplie d’armes. En sortant, il se retrouve nez à nez avec Mark Moogalian, un passager franco-américain qui a saisi sa kalachniko­v, et lui tire dessus avec son pistolet. Mais c’est sa main, jure-t-il, qu’il visait.

Puis il est parti en direction des Américains. Mais il n’a « pas pu tirer » et a «laissé» l’un d’eux l’attraper. S’il ne comptait s’attaquer qu’à eux, comment expliquer qu’il soit monté dans le train avec neuf chargeurs de kalachniko­v? «J’ai dit à Abaaoud que c’était trop, et il m’a dit : “Nous, on sort comme ça au Sham [Syrie]. Toi aussi, tu dois sortir comme ça”», clame l’accusé qui assure, à l’époque, avoir été “hypnotisé” par le tristement célèbre djihadiste. C’est lui qui décidait pour moi de ma vie, je répondais pas, c’est comme si j’étais là et pas là. J’étais trop naïf.» «A chaque fois qu’on vous pose des questions gênantes sur les faits, sur votre parcours, sur votre relation avec Abaaoud, ma conviction, c’est que vous êtes tout sauf sincère », lance l’un des deux avocats généraux. Il rappelle que l’accusé a été interrogé par la juge d’instructio­n une semaine avant les attentats qui ont ensanglant­é Paris et Saint-Denis. « Si vous aviez dit qu’Abdelhamid Abaaoud n’était pas en Syrie, mais dans une cachette à Bruxelles avec des complices et des armes, il n’y aurait pas eu 130 morts à Paris. » L’intéressé répond : « Oui, je sais. Je le regrette. » Le procès doit durer jusqu’au 17 décembre. El Khazzani encourt la réclusion criminelle à perpétuité.

«C’est Abaaoud qui décidait de ma vie. C’est comme si j’étais là et pas là. »

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Ayoub El Khazzani a livré sa version des faits de l’attaque, mercredi.
##JEV#171-54-https://tinyurl.com/y3m8dy9x##JEV# Ayoub El Khazzani a livré sa version des faits de l’attaque, mercredi.

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