Logistique épique
Alors que le calendrier de la mise à disposition des vaccins se précise, la question de leur déploiement s’annonce complexe.
La vaccination contre le Covid-19, saison 2. Le premier volet, celui de la recherche, n’est pas encore terminé, étant donné qu’aucun vaccin n’a obtenu de feu vert de la Commission européenne, préalable au lancement de la campagne en France. Mais se profile déjà «un défi logistique immense », a prévenu le ministre de la Santé, Olivier Véran, jeudi, lors de la présentation de la campagne sur la vaccination (lire ci-contre). L’équation est triple : il va falloir transporter énormément de doses, le faire rapidement, et avec des contraintes rares : le vaccin de Pfizer-BioNTech se conserve à –70 °C, celui de Moderna à –20 °C. Pfizer a confirmé à 20 Minutes que « l’approvisionnement de la France sera assuré par [le] site de production de Puurs, en Belgique ». Mi-novembre, l’entreprise de sous-traitance pharmaceutique française Delpharm, établie à Saint-Rémy-sur-Avre (Eure-etLoir), annonçait qu’elle se chargerait de la mise en forme du vaccin. En clair, conditionner le produit, le contrôler et le réfrigérer. Avant d’acheminer les doses sur l’ensemble du territoire. « Nous utiliserons les modes de transport routier pour la France hexagonale, et aérien pour l’outre-mer, via Fedex et DHL dans l’Union européenne », détaille Pfizer. Pour faciliter et sécuriser ce transport et ce stockage à -70 °C, le groupe américain a conçu un contenant thermique spécifique, à température contrôlée, utilisant de la neige carbonique. Il pourra servir de stockage et être rechargé avec de la neige carbonique pendant quinze jours maximum, précise Pfizer.
C’est surtout par route que les vaccins seront transportés jusqu’aux usines de conditionnement. Pour les entreprises de camions frigorifiques, la question de la température reste complexe. En effet, la plupart des remorques frigorifiques conservent les produits à –20 °C, une température optimale pour le vaccin de Moderna. Pour celui de Pfizer-BioNTech, soit les conteneurs prévus suffiront, soit il faudra produire une grande quantité de neige carbonique. L’aviation ne sera pas en reste. Face à la chute vertigineuse des vols touristiques, Air France-KLM, habitué depuis trente ans à transporter ce type de marchandises délicates, se tient prêt à mobiliser les appareils cloués au sol pour participer à la bataille de la vaccination.
Jeudi soir, le Premier ministre, Jean Castex, a précisé la stratégie de vaccination en France. Il a d’abord annoncé que c’est la Haute Autorité de santé (HAS) qui évaluera les vaccins. Si tout se passe de façon optimale, le gouvernement table sur un début de vaccination en janvier. Il a choisi de suivre les recommandations de la HAS sur la priorisation des publics. Cela commencera donc par les résidents et personnels d’Ehpad, soit 1 million de personnes. La vaccination sera ensuite élargie en février aux personnes de plus de 75 ans (puis plus de 65 ans) et à celles présentant des pathologies à risque, soit 14 millions de personnes. Enfin, elle sera ouverte au printemps à l’ensemble de la population. D’ici là, le gouvernement devra convaincre les Français de se faire vacciner. Un collectif de citoyens sera piloté par le «monsieur vaccination», Alain Fischer, professeur d’immunologie pédiatrique. Par ailleurs, «la France aura un potentiel de 200 millions de doses, ce qui permettra de vacciner 100 millions de personnes [il faut deux injections], a annoncé Jean Castex. C’est plus que nos besoins, mais c’est la marge que nous prenons car des vaccins en cours de développement pourraient ne pas obtenir de feu vert. Nous ne paierons à la fin que ce qui nous sera effectivement livré. »
« Nous utiliserons le transport routier pour la France hexagonale. » Pfizer
Budget de 1,5 milliard d’euros
Enfin, la vaccination sera gratuite. Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2021 prévoit 1,5 milliard d’euros pour cette campagne vaccinale. « Il est souhaitable que le généraliste soit au coeur du dispositif, et en particulier le médecin traitant, a précisé Jean Castex. Chacun doit pouvoir se faire vacciner par un professionnel de santé à côté de chez lui qu’il connaît et en qui il a confiance. »