Que reste-t-il du Temps des cerises?
Quelque cent cinquante ans après, nombreux sont ceux qui se posent en héritiers de la Commune
Il y a cent cinquante ans, une brève expérience politique et sociale naît sur les cendres de la défaite contre la Prusse : la Commune de Paris. Alors qu’à partir du 18 mars, et durant soixantedouze jours, la Mairie de Paris va organiser près de 50 événements (lire ci-dessous) pour célébrer l’anniversaire de cette insurrection populaire, cet événement historique divise encore les élus.
A l’époque, un véritable programme politique, social et démocratique sur fond de liberté est mis en place : la séparation de l’Eglise et de l’Etat est votée, les logements vacants sont réquisitionnés, l’enseignement est valorisé, tout comme l’égalité hommes-femmes ou encore l’ouverture de la citoyenneté aux étrangers. Laurence Patrice (PCF), adjointe d’Anne Hidalgo (PS) chargée de la mémoire et du monde combattant, soutient que l’alliance rose-vert-rouge d’Anne Hidalgo se place en héritière des idées et valeurs de la Commune : «Il y avait une grande modernité des sujets. Notamment la place des femmes, la liberté d’aimer, l’amélioration des conditions de travail et de vie pour les plus modestes, l’accueil des étrangers… Beaucoup des valeurs que nous portons aujourd’hui étaient au coeur de celles de la Commune.»
De son côté, la droite parisienne ne considère pas la Commune comme une référence politique clé, «sans être dans le déni» de cette époque qui «fait partie de l’histoire de Paris», rappelle le conseiller de Paris Rudolph Granier (Les Républicains et Indépendants). Mais d’autres groupes politiques se revendiquent du mouvement révolutionnaire parisien et le défendent encore. Fin janvier, les écologistes de la capitale ont demandé au gouvernement de reporter le classement du Sacré-Coeur comme « monument historique » car « construit avec le sang des communards». Quelques mois auparavant, le préfet d’Ile-de-France avait décidé d’inscrire la basilique au rang de monument historique à l’été 2021. Finalement, son classement ne devrait se faire qu’en 2022. A gauche de la gauche, la Commune résonne toujours. Danielle Simonnet, conseillère de Paris (LFI), se pose, elle aussi, en héritière : «Même cent cinquante ans après, on voit encore des dérives versaillaises au Conseil de Paris, et un mépris de classe dans les rangs de la droite, mais aussi chez les socialistes. Pendant les ‘‘gilets jaunes’’, ils étaient surtout solidaires des familles des vitrines.»
A la différence de la Commune de 1871, on ne trouve au Conseil de Paris 2021 aucune trace d’élus anarchistes d’obédience proudhonienne dans l’assemblée. La fédération anarchiste se tient en dehors de l’institution politique, mais continue d’en diffuser les idées libertaires et autonomes.
«On voit encore des dérives versaillaises au Conseil de Paris.» Danielle Simonnet, LFI