Toyota HDJ 80 ou KDJ 150 ?
Une vie après le 80
C’est une évidence, nos légendaires Land Cruiser muent au rythme du marché et s’embourgeoisent au fil des générations. Si le dernier-né des Toyota s’achète par nécessité ou bien par passion, force est de constater qu’il commence tout juste à pointer son nez sur les pistes les plus reculées. A contrario, l’ancêtre présenté ici jouit d’une cote impressionnante, pour ne pas dire insolente.
Soixante ans d’histoire
Le positionnement marketing du Land Cruiser est identique depuis le BJ de 1951 : « Du coeur de la ville aux grands espaces sauvages, ce 4x4 reste un véhicule conçu et sans cesse amélioré pour relever les défis de conduite les plus extrêmes », dixit Toyota. Sa réputation de fiabilité en a fait une référence du domaine. Mais soyons plus précis. La famille des 4x4 Toyota est nombreuse et ces deux représentants sont issus de branches bien distinctes. D’une part, le HDJ 80 qui appartient à la lignée des station wagons née en 1967 avec le FJ 55. Si son actuel descendant, le VDJ 200 à moteur V8, comble ses occupants par une débauche de luxe ; il agace certains pilotes par trop d’assistance électronique. Et d’autre part, le KDJ 150 qui s’inscrit, quant à lui, dans une autre lignée, celle des Light Duty (ou Prado) apparue en 1986 avec le LJ 71.
Gabarit : un Light aux dimensions de SW…
Bonne nouvelle pour les raiders, le petit neveu est maintenant pratiquement aussi volumineux que son grandoncle. Empattement, voies avant et arrière sont quasi identiques, ce qui permet d’offrir au KDJ 150 une habitabilité proche de celle du HDJ 80. Avantage tout de même au station wagon pour la taille de sa soute arrière.Une fois à bord, le jeune met une claque à l’ancien. Equipements de sécurité et d’agrément, qualité perçue, finition et précision des assemblages sont incomparables. Bien que les plastiques et les moquettes du HDJ 80 restent des modèles de longévité, ils ne
peuvent soutenir la comparaison avec ce que proopose un 4x4 récent.A bord du KDJ 150, on se sent comme dans un cocon. Les commandes sont douces et agréables ; silence de fonctionnement et confort supérieur sont au rendezvous. Avantage au KDJ 150 qui marque des points.
Des surprises côté moteur
Le station wagon est moins puissant de vingt chevaux, malgré une cylindrée bien supérieure. Sur le papier, il est également moins coupleux malgré ses deux pistons de plus.Avec un supplément de deux cents kilos sur la balance, le rapport poids/puissance bascule nettement en faveur du KDJ 150. Pourtant, au volant, le 6 cylindres du SW conserve l’avantage en agrément. Plus rond et parfaitement équilibré, le bloc Yamaha n’a pas pris une ride pour un écart de conso qui n’est que de 2 l/100. Fiabilité, onctuosité et musicalité du 4,2 litres sont sans commune mesure avec celles du 4 cy-lindres, dont les montées en régime apparaissent ternes et étouffées par l’échappement et le FAP. Dommage.
Comportement routier : l’ancien s’incline
Si les longues distances à bord d’un Toyota HDJ 80 restent un vrai plaisir, il marque en toute logique le pas face au dernier-né des Japonais qui place la barre très haut. Les progrès réalisés, notamment sur l’aérodynamique, rendent le KDJ 150 moins sonore et plus confortable sur les grands trajets. Bien aidé par son train avant plus précis, il jouit de surcroît d’une meilleure agilité. Mieux, son comportement devient joueur lorsque le rythme s’accélère. Stable et efficace, le KDJ 150 s’inscrit bien dans les courbes et revient parfaitement en ligne à chaque sortie de virage. Certes, le changement de suspensions y est pour beaucoup, puisqu’il s’agit des modèles haut de gamme de P2S conseillés par Frédéric Bertrand, de Modulauto qui a réalisé la préparation de ce KDJ 150.
Verdict en tout-terrain
Chaud devant… Le KDJ 150 se retrouve dans une situation à la fois favorable et ambiguë. Sa conception à deux roues avant indépendantes le prédispose à coller aux pistes et à se venger dans le sinueux. Là encore les progrès réalisés sur les liaisons au sol du Light Duty sont impressionnants. Sur les pistes rapides, la suprématie du HDJ 80 est mise à mal. Plus pataud, le SW souffre de son inertie et le condamne au roulis. Il est moins réactif et parfois capricieux en rappel de direction. C’est la rançon de son architecture à deux ponts rigides, qui avaient fait de lui un solide pistard. Sur terrain meuble, la motricité du série 15 se disperse et les anitpatinages finissent par ralentir sa progression. Attention aux excès d’optimisme, sous peine de laisser ses deux pare-chocs au fond d’un trou. Dommage car, dans sa version Le Cap, le KDJ 150 boîte « méca » est bien disposé. Ici, peu d’assistance électronique : le Toy conserve son âme de pur et dur avec son châssis échelle séparé, sa boîte courte et son blocage arrière manuel. Si son poids contenu et son agilité lui autorisent quelques franchissements dignes de sa lignée, il ne peut égaler son aïeul qui pourra toujours compter sur ses deux ponts rigides et ses trois blocages en cas de coup dur. Le KDJ 150 gagne en performances pures mais devra s’incliner en off-road intensif. Au final, ces deux plaisanciers de l’aventure s’opposent mais offrent des kilomètres de voyages en première classe. De son côté, le HDJ 80 tient son rang malgré ses vingt ans et ses 400 000 km de plus. Il reste un pilier du monde du tout-terrain et nous donne encore rendez-vous dans vingt ans pour fêter son million de kilomètres. Digne héritier malgré les apparences d’un endimanché, le KDJ 150 est un vrai Land Cruiser bon pour le service. Hyper-polyvalent, il revendique la dynamique d’un gros SUV tout en allant taquiner le HDJ 80 sur le terrain. Le KDJ 150 remporte ce match, mais un stop à la case « préparation » est incontournable pour qui souhaite sortir des sentiers battus. Il devient alors redoutable et constitue une vraie alternative au raider qui se pose la question du remplacement de son vieux HDJ 80.