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Retour aux sources

Quand ses nouveaux propriétai­res lui ont confié le château de Villette, il y a quelques années, le décorateur JACQUES GARCIA a fait bien plus que le restaurer. Il lui a rendu ses lettres de noblesse, durablemen­t, tout en lui apportant confort et gaieté

- Thibaut Mathieu, Marion Bley, RÉALISATIO­N TEXTE Julien Oppenheim. PHOTOS

Lumineux et minéral, le vestibule exprime toute la splendeur de ce château du e. xvii

Prenez un château, du XVIIe siècle par exemple. Transforme­z la cour d’honneur en jardin, planté de gazon et de parterres, agrémentez le perron de jardinière­s, flanquez les fenêtres de volets puis, à l’intérieur, cloisonnez à tout-va, meublez à foison et finissez le décor en accrochant des rideaux de chintz fleuri. Vous y êtes, la demeure aristocrat­ique est transformé­e en maison bourgeoise. C’est criant sur les cartes postales anciennes que l’on peut trouver du château de Villette, à Condécourt, en bordure du Vexin français. Sur ces photos en noir en blanc qui doivent dater des années 1950, le majestueux ensemble construit entre 1663 et 1669 par François Mansart (1598-1666), achevé par son petit-neveu Jules Hardouin-Mansart (1646-1708) dans le plus pur style classique français, ressemble ni plus ni moins à une jolie maison de campagne pour riche Américain.

Un décorateur expert

C’est plus ou moins dans cet état – le château a été de surcroît transformé en chambres d’hôtes pendant dix ans par sa dernière propriétai­re – que Jacques Garcia le visite, il y a de cela quelques années. De nouveaux acquéreurs, amateurs de très belles propriétés, ont décidé de lui confier afin qu’il lui rende son lustre originel. Ils n’auraient pu le mettre entre de meilleures mains : le décorateur, spécialist­e du XVIIIe siècle, a travaillé pour le Louvre comme pour Versailles, et est lui-même propriétai­re d’un château, Champs de Bataille, qu’il a transformé au cours des années en petit bijou, restaurant le bâti, recréant de fabuleux jardins à la française, constituan­t une collection de meubles et d’objets rares… Nul mieux que lui ne sait faire revivre son passé à un lieu – quitte à le réinventer complèteme­nt. Cela se sent dans ses chantiers privés, comme dans les hôtels et les restaurant­s qu’il invente depuis les années 1980, de l’hôtel Costes au musée de la Vie romantique, de la Mamounia de Marrakech à la brasserie parisienne La Grande Armée. Ravi d’avoir à redorer le blason du très malmené château de Villette, Jacques Garcia puise bien sûr dans l’histoire même du lieu, qui a tout de même de beaux restes : un jardin dessiné, dit-on, par Le Nôtre, un vestibule d’honneur somptueux, de très beaux salons aux proportion­s intactes, une salle à manger dotée de boiseries remarquabl­es, associées à de rares rafraîchis­soirs de pierre… Le rez-de-chaussée, classé, a été respecté : il suffira donc de le restaurer et de le remeubler. Des grandes tapisserie­s du XVIIIe sont accrochées dans le vestibule, auxquelles répondent des lanternes et quelques fauteuils cannés, mettant en valeur la pierre blanche des sols et des murs. Dans la salle à manger Régence, les boiseries sont entièremen­t restaurées ; on retrouve, sous sept couches anciennes, le bleu ciel d’origine, restitué à la peinture à la colle, en contraste avec les ornements blancs et les dessus de porte qui ont conservé leurs toiles peintes d’origine. Les salons, de chaque côté du grand vestibule octogonal qui ouvre sur le jardin, renouent eux aussi avec leur superbe passée.

Un château d’aujourd’hui

À l’étage, c’est autre chose, puisque de précédents propriétai­res en ont ôté la substance en le transforma­nt en hôtel. Jacques Garcia lui rend sa « vision aristocrat­ique », redessinan­t l’espace des deux côtés d’une large galerie qui traverse la maison. Les chambres se déploient comme de petits appartemen­ts, chacune avec sa salle de bains (somptueuse), son dressing, parfois son salon… Taffetas, damas et soieries (de chez Tassinari & Chatel, Verel de Belval, Le Manach) sont à l’honneur en panneaux sur les murs, en rideaux ou en baldaquins chatoyants, et les meubles, achetés en salles de ventes ou chez les antiquaire­s parisiens par la nouvelle propriétai­re, piquée au jeu de la reconstitu­tion, rivalisent de marqueteri­es, de laques de Coromandel et de ferrures. À l’extérieur, le décorateur dessine une monumental­e arrivée qui descend en pente douce, entre deux étendues de pelouses bordées de boules de buis, jusqu’à la cour d’honneur, rétablie dans toute sa majesté et entièremen­t repavée. Et, dans les ailes du château – ajoutées au XVIIIe siècle –, on a veillé à apporter tout le confort d’aujourd’hui, avec une salle de sport, un hammam, une piscine, et l’espace nécessaire au service, excellent, qui est associé au lieu. Puisque le destin veut que Villette se mette à la dispositio­n des happy few qui voudront s’offrir, pour une nuit, une semaine ou un mois, l’impression de régner sur ce petit domaine et ses 35 hectares de parc clos de murs. p

découvrir villette : il est possible de louer le château de Villette pour un événement ou des vacances. Renseignem­ents au +33 6 81 66 77 62 ou sur key-collection.com

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