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Collages de styles

C’est dans la maison moderniste de ses parents que l’artiste Peter Shire et son épouse Dona se sont installés. En y apportant leurs propres inspiratio­ns : couleurs vives, style Memphis, art africain… Et en faisant preuve d’un art certain pour le compromis

- Jonathan Griffin TEXTE Tim Street-Porter PHOTOS

En Californie, le designer Peter Shire a revitalisé une maison moderniste fi Ž ies à coups de couleurs pétulantes, d’art africain et de butin de brocante.

Une photo est accrochée dans la salle à manger. « La fameuse photo », comme la qualifie l’artiste californie­n Peter Shire, celle du moment où sa mère, Barbara, et son père, Henry, se sont rencontrés. Elle travaillai­t pour un syndicat, lui pour l’Alliance internatio­nale des employés de la scène, du théâtre et du cinéma. C’était en 1946, dans les premiers temps du maccarthys­me. Un exemplaire de la photo a été envoyé aux intéressés, un autre au FBI, qui se méfiait… et pour cause : Henry et Barbara Shire oeuvraient bel et bien dans un cercle de communiste­s et autres artistes tendance bohémo-gauchiste ! Les jeunes parents, ostracisés et à court de travail, furent obligés de choisir un quartier bon marché, sur les collines d’Echo Park, à Los Angeles, pour se faire construire une maison, dont la conception fut confiée un ami, l’architecte activiste Josef van der Kar. Un demi-siècle plus tard, Peter Shire s’y installait avec son épouse. La maison, classée monument historique en 2010, est emblématiq­ue du style californie­n des années 1950, avec son salon ouvrant sur la salle à manger aux larges baies vitrées et son jardin luxuriant conçu par le paysagiste Garrett Eckbo – celui-là même qui avait voulait doter chaque maison d’un jardin.

1. L’ENTRÉE,

avec son sol de carreaux de terre cuite, accueille deux chaises de Peter Shire : Seggiolino, à gauche, et Lo-tone Crimson Gold, dessinées toutes deux en 2007. 2. DANS LE LIVING ROOM, des chaises Superlegge­ra de Giò Ponti entourent la table, « une interpréta­tion, faite par mon père, d’un modèle de Van Keppel Green » , célèbre marque de design californie­nne. Au- dessus, la photo de la première rencontre entre les parents de Peter Shire. De chaque côté se trouvent les « réponses postmodern­es » de Peter Shire aux chaises de Charles et Ray Eames que possédaien­t ses parents – sur lesquelles il a remplacé les embouts de caoutchouc d’origine par des pièces en aluminium. La télévision, où passe Mon oncle de Jacques Tati, est mise en scène dans un petit théâtre à baldaquin.

À l’intérieur, les murs sont recouverts de panneaux de bouleau, qui répondent au bardage de séquoia qui habille la maison à l’extérieur. Peter Shire a apporté au lieu sa touche personnell­e avec un choix de couleurs vives. Ces mêmes couleurs qui firent la renommée de ses sculptures, de ses meubles et céramiques et attirèrent l’attention du groupe Memphis – ce mouvement de design et d’architectu­re créé en Italie dans les années 1980 – auquel Peter Shire fut associé en 1977. Mais, pour leur maison, Peter et Dona Shire n’ont pas opté pour un total look Memphis. Et lui ont préféré un mélange des genres, en combinant par exemple le siège Bel Air, création de l’artiste, avec des masques africains, des portraits en cartes à gratter… Ce qui a forcé le couple à apprendre le compromis, non seulement entre eux deux mais aussi avec leurs trois chats. « Le tout réside dans mon désir d’intégrer un message, de l’émotion, de l’enthousias­me dans mon travail et dans ma demeure, explique l’artiste. Alors oui, ça dépend des gens que l’on rencontre, de ces petites choses qui apportent chaleur et humanité à ce qui nous entoure. Les Italiens diraient “tant qu’on peut imaginer la vie qui va avec”. » Traduction et adaptation de l’anglais Chantal Bloom.

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1. SUR UNE ÉTAGÈRE, la théière Anchorage, dessinée par Peter Shire en 1982 pour Memphis, exposée depuis au L. A. County Museum. Derrière, un portrait de l’artiste réalisé par son père.
1 1. SUR UNE ÉTAGÈRE, la théière Anchorage, dessinée par Peter Shire en 1982 pour Memphis, exposée depuis au L. A. County Museum. Derrière, un portrait de l’artiste réalisé par son père.
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2. LA TERRASSE affiche les couleurs chères à Peter Shire. Celui- ci décrit la sculpture verte comme une « horrible chose Tiki » ( l’inspiratio­n polynésien­ne à la mode dans les années cinquante aux États- Unis) qu’il a faite lui- même pour son frère,...
2 2. LA TERRASSE affiche les couleurs chères à Peter Shire. Celui- ci décrit la sculpture verte comme une « horrible chose Tiki » ( l’inspiratio­n polynésien­ne à la mode dans les années cinquante aux États- Unis) qu’il a faite lui- même pour son frère,...
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