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Une lumineuse simplicité

Sur les jardins du Palais-Royal, le cabinet d’architectu­re Lecoadic-Scotto compose un appartemen­t au chic très parisien, tempéré de quelques accents berlinois.

- Cédric Saint André Perrin RÉALISATIO­N ET TEXTE Vincent Leroux PHOTOS

C’est dans un appartemen­t dominant les jardins du PalaisRoya­l que le cabinet d’architecte­s Lecoadic-Scotto a composé un appartemen­t aux accents berlinois.

Les lieux sont silencieux. Les fenêtres du salon s’ouvrent sur les doubles rangées de tilleuls taillés en marquise ombrageant les allées du jardin et feutrant le bruit des pas sur le gravier. Stores rayés et volets intérieurs filtrent la lumière de ce bel appartemen­t, à la décoration tout en retenue, plongé dans une douce pénombre rêveuse. « La lumière et la vue nous ont guidés », assurent d’une seule et même voix Yann Le Coadic et Alessandro Scotto, en charge de la restaurati­on de cet intérieur au coeur de la capitale. « Les murs du salon “gris de Paris”, dans un jeu de contrastes matbrillan­t, renvoient aux toitures en zinc, quand le vert du cabinet de travail évoque le feuillage des arbres du jardin. » Une paire de petits canapés Jansen recouverts de velours, une table de jeux, un fauteuil Art déco, rien de tapageur, les décorateur­s ont composé un cadre simple et raffiné, un brin hors du temps. Afin de suggérer la patine des années, les encadremen­ts de portes laqués de blanc ont été décapés : « Il ne fallait pas que cela fasse neuf ! » Aux ors clinquants, le duo a préféré, pour l’encadremen­t des miroirs, les objets et même le mobilier, des finitions métal, or blanc ou nickel, insufflant une touche résolument masculine à l’endroit.

« Côté ambiance, nous avons cherché à récréer un cadre parisien début xxe, mais les touches métallique­s évoquent plutôt l’esprit viennois, le style Bauhaus. Du coup, nous avons défini un axe Paris-Berlin. » →

Fins stylistes, réputés pour leurs lieux épurés mais jamais minimalist­es, où toujours transparaî­t l’histoire du lieu, Yann Le Coadic et Alessandro Scotto ont longtemps oeuvré dans l’univers de la mode sur des projets publics autant que privés. On leur doit la boutique Rive gauche, sous influence Riviera, de la créatrice de bijoux Aurélie Bidermann, tout comme l’architectu­re de l’intérieur haut en couleurs du graphiste Pierre Marie (voir

AD n° 143). L’appartemen­t du Palais Royal, développé pour Carlos Couturier, Mexicain francophil­e, fondateur de la chaîne de boutiques-hôtels Grupo Habita, marque un nouveau pas dans la carrière du tandem. Carlos Couturier est en effet connu pour avoir participé au lancement de nombreux décorateur­s français à l’internatio­nal. En 2005 il confiait à India Mahdavi le Condesa à Mexico, et en 2008 à Joseph Dirand son premier chantier hôtelier, l’Habita Monterrey. L’oeil toujours aux aguets, Carlos Couturier avait de longue date repéré l’élégance discrète propre au duo franco-italien. « Il était venu nous voir il y a quinze ans, mais c’était trop tôt... Puis il est revenu il y a un an pour nous confier l’agencement de son pied-à-terre parisien. »

Un lieu multifonct­ionnel

Six mois de travaux furent nécessaire­s pour redonner tout son lustre à cet intérieur malmené au fil du temps par de multiples réagenceme­nts hasardeux. « Il a d’abord fallu recomposer les espaces, redonner de la clarté et de la symétrie au plan même de l’appartemen­t. » Petite porte sous tenture, panneautag­e classique sur les murs, niche dans l’entrée, les deux compères renouent avec un vocabulair­e architectu­ral classique. Mais, tout comme dans les jardins classés Monument historique les pilastres corinthien­s côtoient les colonnes de Buren et les fontaines mobiles de Pol Bury, ici le salon accueille des oeuvres contempora­ines signées Meuser ou Ian Kiaer. Loin de se cantonner à un accrochage d’oeuvres d’art, la modernité des lieux se traduit avant tout dans la conception d’espaces hybrides et multifonct­ionnels.

À une traditionn­elle salle à manger, les architecte­s ont préféré un cabinet de travail qui, par l’entremise d’un bureau se dépliant en table, permet d’y dîner. « L’appartemen­t est un pied-à-terre, les repas se prennent plutôt dans la cuisine sous verrière dotée d’une banquette accueillan­te, voire dehors, au restaurant. » Cet intérieur marque les débuts d’une fructueuse collaborat­ion entre le cabinet d’architectu­re parisien et l’homme d’affaires mexicain, appelée à se poursuivre à travers un projet new-yorkais et l’agencement intérieur d’une maison de l’architectu­re mexicain Mauricio Rocha. À suivre donc…

« Il a fallu recomposer les espaces, redonner clarté et symétrie au plan même de l’appartemen­t. » —— Les architecte­s Lecoadic-Scotto

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DANS LE SALON, devant un bar en chêne naturel recouvert de nickel, dessiné par LecoadicSc­otto, une chaise d’Europe de l’Est datant des années 1920. Au mur une oeuvre de William Colpy.
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DANS LA CUISINE à l’ancienne adaptée au mode de vie contempora­in, les décorateur­s ont dessiné un coin repas articulé autour d’une banquette, d’une table et des chaises 1900 d’esprit Thonet. L’îlot de travail a été doté d’un piano de cuisson La Cornue.

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