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Le temps suspendu

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Le duo de décorateur­s Dimorestud­io nous accueille dans sa nouvelle demeure milanaise. Un majestueux appartemen­t xixe à peine retouché, dont se dégage une autre temporalit­é, entre passé magnifié et raffinemen­t distancié.

Certes, l’appartemen­t est un peu excentré, plus proche des salles de cours du Politecnic­o de Bovisa que des showrooms de Brera, mais Emiliano Salci et Britt Moran cherchaien­t un grand appartemen­t encore dans son jus : « Il est devenu très difficile de trouver des lieux comme celui-ci à Milan, qui n’aient pas été déjà ravagés par des travaux de rénovation », confient-ils. Et pourtant… Mi-géométriqu­es, mi-floraux, les motifs peints sur les murs verts du hall d’entrée témoignent encore de ce médiévalis­me flamboyant, très en vogue dans l’Italie du début xxe siècle… Un style que les commandita­ires de cet immeuble de quatre étages laissèrent visiblemen­t éclater jusqu’aux intérieurs, puisque la cheminée XXL du salon était digne d’un château avec son manteau surdécoré. Autrement dit, rien ne semblait avoir bougé ici au deuxième étage, des portes jusqu’aux poignées en passant par le long couloir desservant les pièces les unes après les autres.

Privilégie­r les camaïeux

Autant d’éléments que le duo de décorateur­s a voulu préserver :

« L’idée était de ne surtout pas abîmer ce qui était resté, tout en essayant de moderniser le confort. Par exemple, il a fallu rénover toute l’électricit­é mais nous avons tenu à reposer les mêmes interrupte­urs ronds d’autrefois. Quant au reste, nous l’avons laissé tel quel, à part la salle de bain et la cuisine. » Et la couleur ! Fidèles à leurs habitudes, Dimorestud­io a choisi une palette en guise de leitmotiv pour tout l’appartemen­t, en puisant justement dans ce vert du rez-de-chaussée qui les a marqués. « Nous avions déjà fait les autres couleurs, alors il nous manquait encore le vert » ajoute Britt Moran, non sans humour. Et privilégié les camaïeux en fonction des goûts et des lumières. Façon raphia dans la salle à manger, plus sombre dans une chambre, puis

plus clair avec une pointe bleue ciel pour la suivante. Ne restait plus qu’à caresser les portes dans le sens de la patine avec le bon pinceau et le jaune qu’il faut, à peine moutarde, très poudré. Si l’atmosphère s’est laissée figer dans le passé, les meubles, eux, viennent rythmer la partition en brouillant les décennies au fil des trouvaille­s et des couleurs. Au mur, une peau de léopard côtoie aussi bien une photo d’Andrea Ferrari qu’une peinture d’Agostino Bonalumi, tandis que les maestri Ponti, Borsani, Scarpa, Mollino alternent avec quelques indémodabl­es contempora­ins tel un cabinet de la gamme Progetto Non Finito ou un grand canapé DePadova – pourvu qu’il soit en velours pourpre. Un mélange que les Dimore appliquent à toutes les échelles jusqu’à la plus petite, installant çà et là une profusion d’objets venus des quatre coins du monde ou des céramiques américaine­s. Et peu importe si elles volent la vedette à cet immense meuble de chambre à lit escamotabl­e, commande de Carlo De Carli pour une vieille famille… milanaise évidemment.

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Thibaut Mathieu RÉALISATIO­NChristoph­e Coënon PHOTOSOsca­r Duboÿ TEXTE
 ??  ?? DANS LE SALON, la cheminée d’époque est surmontée de deux vases chinois. Devant, deux bridges des années 1920. Autour d’une table basse Fronzoni ’64 d’Angiolo Giuseppe Fronzoni sur laquelle est disposée une collection de miroirs japonais anciens, un canapé Raffles(De Padova) et un fauteuil de Carlo Mollino dans son revêtement jaune d’origine. Au dessus du canapé, une applique de Serge Mouille. Le tapis des années 1930 est allemand.
DANS LE SALON, la cheminée d’époque est surmontée de deux vases chinois. Devant, deux bridges des années 1920. Autour d’une table basse Fronzoni ’64 d’Angiolo Giuseppe Fronzoni sur laquelle est disposée une collection de miroirs japonais anciens, un canapé Raffles(De Padova) et un fauteuil de Carlo Mollino dans son revêtement jaune d’origine. Au dessus du canapé, une applique de Serge Mouille. Le tapis des années 1930 est allemand.
 ??  ?? DANS LA CHAMBRE DE BRITT, la tête de lit a été revêtue de velours vert clouté. Au mur, des gravures représenta­nt des phares américains.
DANS LA CHAMBRE DE BRITT, la tête de lit a été revêtue de velours vert clouté. Au mur, des gravures représenta­nt des phares américains.
 ??  ?? DANS LA SALLE À MANGER, sur une table de Carlo Scarpa entourée de chaises signées Osvaldo Borsani, une collection de coupes en cristal.
DANS LA SALLE À MANGER, sur une table de Carlo Scarpa entourée de chaises signées Osvaldo Borsani, une collection de coupes en cristal.

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