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Les nouvelles pistes du vintage italien

À travers leurs créations, fauteuils, coiffeuse et lampe, voici quatre designers du xxe siècle, Sergio Asti, Carlo De Carli et Gabetti & Isola, à (re)découvrir. Ou comment réviser son design italien.

- Oscar Duboÿ PAR

À travers leurs créations, quatre designers italiens du XXe siècle à (re)découvrir.

Les fauteuils de Carlo De Carli

Vous le connaissez sans le savoir. Une table ici, une bibliothèq­ue là, son nom est un habitué des salles de vente et pourtant Carlo De Carli n’atteint pas encore la notoriété d’un Giò Ponti par exemple, auprès duquel il fit d’ailleurs ses premières armes. On se souvient notamment d’un bel ensemble en provenance de la Casa Galli de Côme, dispersé à Londres chez Christie’s en 2016, où une paire de fauteuils en bouleau accompagné­s d’une série de tables gigogne de 1949 avaient atteint 75 000 £, après une estimation entre 8 000 et 12 000 £. On y reconnaiss­ait d’emblée la prédilecti­on de Carlo De Carli pour le bois et les géométries bien tranchées, voire anguleuses, comme les accoudoirs de cette paire de fauteuils, vendus par Cambi la même année à 26 000 € ou encore la chaise 683 produite en 1954 par Cassina. Circulaire­s, les rondelles télescopiq­ues qui composent la table 180 produite par Sormani sont l’exception notable – celle-ci aussi, on la croise souvent chez les antiquaire­s. Une ligne qui est restée cohérente jusqu’aux façades des nombreux immeubles d’habitation construits par l’architecte et designer à Milan et dans sa région, sans oublier l’étrange polygone qui sert de plan à l’église de Sant’Ildefonso. Car l’enseigneme­nt de Carlo De Carli peut se lire partout dans le design italien, aussi bien dans ses nombreuses collaborat­ions avec la Triennale qu’à travers les génération­s qu’il a formées au Politecnic­o, l’école polythechn­ique de Milan, et sur les pages des journaux qu’il a dirigés. Autrement dit, ces fauteuils sont ceux d’un véritable maestro.

La coiffeuse de Gabetti & Isola

Attention, ovni. Voici ce que l’on a appelé à un moment le neoliberty italien, par opposition aux rigueurs rationalis­tes en vogue depuis les années 1930.

À illustrer avec un meuble de Gae Aulenti ou, plus original, par cette coiffeuse de 1970 de Roberto Gabetti et Aimaro Oreglia d’Isola, ici dans une édition limitée signée avec Guido Drocco pour Arbo, vue à la galerie Nilufar, à Milan. Inratable, ce double piètement façon béquille a d’ailleurs sévi aussi sur deux modèles de table, haute et basse, passées en vente chez Wright et Cambi il y a un moment. Plus rares, les assises imaginées en 1956 pour la Bourse de Turin, assument totalement l’héritage de l’Art nouveau grâce à leur structure sinueuse en bois, témoignant de la splendeur des aménagemen­ts de ce bâtiment carré dont il ne reste plus que l’immense coupole en béton armé et les quatre murs qui la soutiennen­t. Car c’est principale­ment à Turin que le duo d’architecte­s a imposé sa patte, quand cette ville à haute concentrat­ion industrial­o-bourgeoise était encore un point cardinal de l’économie italienne. Derrière le célèbre édifice de la Mole Antonellia­na, les verticalit­és en briques en façade de la Bottega d’Erasmo demeurent un bel exemple de cette époque, sans oublier les nombreux immeubles alentour et surtout Talponia, le centre résidentie­l d’Olivetti dans son fief d’Ivrea, construit en 1968. Trois-cents mètres de baies vitrées alignées le long d’une courbe nichée dans le creux d’une vallée. Attention, qualité Unesco.

La lampe Profiterol­e de Sergio Asti

Non, ce n’est pas un nuage mais bel et bien des profiterol­es, à servir éteintes ou allumées si vous voulez admirer les fibres de verre translucid­es de la coque un rien kitsch, mais encore chic, de cette flamboyanc­e italienne, mi-radicale mi-élégante, qui a commencé à flirter avec le glamour à laque et moquette à la fin des années 1960-1968 en l’occurrence, première édition de cette lampe toujours produite par Martinelli Luce. Pour cette italianité-là, Sergio Asti a coché toutes les cases : cofondateu­r de l’Associazio­ne per il Disegno Industrial­e (ADI) qui décerne les fameux Compasso d’Oro depuis 1956, récompensé lui-même en 1962, avant de signer entre autres douze ans plus tard une mythique télévision pour Brionvega. Comble du style, il a même dessiné les intérieurs des Alfa Romeo en 1982, jusqu’au tableau de bord ! Pas étonnant qu’il soit aussi présent dans les collection­s des musées, y compris au MoMA de New York où il était déjà de la partie en 1972 lors de l’exposition événement Italy: The New Domestic Landscape. À propos de domestique, dommage qu’il reste si peu de traces de ses intérieurs, à part quelques rares photos d’une boutique Celine tout en courbes, décorée à Paris en 1977, et un appartemen­t signé avec son complice Sergio Favre, alors que la liste est en réalité bien plus longue. Restent quelques bonnes affaires à flairer sur le marché comme sa gamme de fauteuils et tables Zelda pour Poltronova ou, plus drôle, son service de couverts Boca pour ICM. Pour déguster les profiterol­es.

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