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Nuova vita

Tout au sud des Pouilles, le chef Guy Martin et la productric­e Katherina Marx ont amoureusem­ent restauré deux anciens palais. Pour leur propre plaisir, et celui de ceux qui viendront s’y poser, pour quelques jours ou un été.

- Thibaut Mathieu RÉALISATIO­N Jérôme Galland PHOTOS Marion Bley TEXTE

Tout au sud des Pouilles, le chef Guy Martin et la productric­e Katherina Marx ont restauré deux anciens palazzi, en beauté.

MONACALE, L’ENTRÉE DU PALAZZO MARITATI.MONACALE, Dans L’ENTRÉE l’escalier,dupalazzo qu’encadrentM­aritati.Dansdeuxl’escalier,anges en bois sculptéqu’encadrentu­ndeuxAngea­ngesnoir, xviie, enoeuvrebo­is desculptéL­aurencexvi­ie,Bonnel.unAnge noir, oeuvre de Laurence Bonnel.

AU COEUR DE LA VIEILLE VILLE de Nardo, sur la place del Gesu

AU Nuovo, COEUR s’élève DE LA VIEILLE un rare VILLE monument, ladeGuglia­Nardo,Dell’immacolata­surlaplace­del (Gesuflèche deNuovo,l’Immaculée),s’élèveunéle­vérare enmonument,1749. la Guglia Dell’immacolata (flèche de l’Immaculée), élevé en 1749.

On a beaucoup parlé cuisine pendant ce reportage-là, commenté les orrechiett­e ( petites pâtes rondes en forme d’oreille, orrechio en italien) bien sûr, puisqu’elles sont originaire­s des Pouilles, comparé les mérites des pot-au-feu des uns et des autres, évoqué le beaufort que Guy Martin fait faire dans une ferme d’alpage… C’est assez logique quand on est en compagnie d’un des plus grands chefs étoilés français, propriétai­re du mythique restaurant Le Grand Véfour à Paris. On se rend d’ailleurs compte en l’écoutant que la cuisine et la décoration ont finalement de nombreux points communs : le goût des bons produits, qu’il faut aller chercher avec patience et une curiosité toujours aiguisée ; les artisans qualifiés aux savoir-faire spécifique­s ; le fait d’être des spécialité­s très représenta­tives de l’excellence française. Mais, basta cosi. Si l’on est venu jusqu’à Nardo, dans la région du Salento (le talon de la botte italienne), c’est pour découvrir les projets de Katherina Marx et son mari Guy Martin, deux beaux palais anciens que le couple vient de passer trois ans à restaurer pour en faire sa résidence et celle des happy few qui voudraient y passer quelques jours – ou plus. L’histoire a commencé pendant l’été 2015, alors que Katherina et Guy étaient en vacances dans la région. Un peu par hasard, le dernier jour, ils se retrouvent en train de visiter un palais à vendre, en ruine – mais quelle ruine ! Un lieu dont ils sentent immédiatem­ent le potentiel. Puis, de fil en aiguille, ils voient un second palais, tout aussi décati… Qu’importe. En quelques jours, leur décision est prise, et ils deviennent vite propriétai­res de ces incroyable­s bâtiments enchâssés dans un centre-ville dont on comprend en se promenant dans ses rues qu’il est constitué de nombreuses strates historique­s impossible­s à démêler.

Le patrimoine en valeur

Dans ces palazzi, dont chaque pièce était encore occupée, au siècle dernier, par une famille – parfois jusqu’à 12 personnes, cohabitant dans 25 m2 –, il faut aujourd’hui consolider les bases, refaire murs et toitures. Les bâtis des lieux remontent jusqu’au viiie siècle, et en majorité aux xve et xviie siècles. Le couple veut mettre ce patrimoine en valeur et fait venir les meilleurs profession­nels : des architecte­s spécialisé­s dans les monuments historique­s d’abord, Luigi et Sabina Rippa, puis de nombreux artisans, tels un spécialist­e des mosaïques qui refait les sols, quasiment tesselle par tesselle, des peintres experts en décors anciens, etc. Au fur et à mesure des travaux, qui durent trois ans, de superbes décors muraux et d’élégants détails architectu­raux revoient le jour sous les prudents coups de grattoir des artisans, une chapelle réapparaît comme par miracle de derrière un faux plafond, des caches souterrain­es se font jour…

Dans cet écrin qui se dessine peu à peu, Sabina Rippa règle très précisémen­t des éclairages indirects qui caressent les courbes des voûtes en ogive. Le décorateur Jérôme Faillant-Dumas aide à choisir la gamme de faux blancs des murs et des rideaux, et dessine une élégante cuisine vert d’eau, ainsi qu’une spectacula­ire tête de lit au dessin baroque. Bientôt, Katherina Marx et Guy Martin peuvent installer les meubles et objets qu’ils rassemblen­t amoureusem­ent depuis longtemps, ceux de maîtres italiens du design, les Ico Parisi, Giò Ponti, Ettore Sottsass. « La bibliothèq­ue d’Ico Parisi du coin cheminée, je savais quel modèle je voulais, je l’ai cherchée longtemps avant de la trouver grâce à l’antiquaire romain Paolo Sturni », raconte Guy. Katherina, qui s’intéresse de très près au design et à la décoration, vient d’ouvrir une boutique à Nardo, Appia Appia, où elle vend draps de lin et coussins colorés de Bertozzi ou encore vaisselle et objets d’Enza Fazano, des céramiques de la ville de

Grottaglie. C’est elle qui peaufine l’aménagemen­t des maisons et trouve à chaque meuble, à chaque objet sa place. « On voulait faire comme à la maison, être généreux avec ce lieu, poursuit Guy Martin.

J’ai apporté mes propres livres, une de mes chaines stéréo avec sa platine et des vinyles. » Effectivem­ent, la séance photo se fait sur fond musical de Traviata par la Callas, comme de pop italienne des années 1970. Dans le salon, installé sur une des chauffeuse­s basses, on est juste à la bonne hauteur pour contempler les oeuvres aériennes de l’artiste Claudine Drai accrochées au mur. Elles répondent à toute une collection qui se construit patiemment, de la peintre abstraite Geneviève Claisse à la plasticien­ne Françoise Pétrovitch, du street artiste Toxic à la photograph­e Joséphine Vallé Franceschi. « Tout a vraiment été fait dans le détail, et on a envie de le partager avec les gens qui viendront ici. À la façon d’un lieu d’art plus que d’un hôtel… » 

« On voulait faire comme à la maison, être généreux avec ce lieu. » —— Guy Martin

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 ??  ?? CÔTÉ SALLE À MANGER, quatre chaises d’Ico Parisi entourent une table DS1 de Charles Rennie Mackintosh, devant une oeuvre en papier sous Plexiglas de Claudine Drai. Le beau lampadaire en bois tourné vient de chez un antiquaire de Brindisi, la desserte à roulette de chez l’antiquaire romain Paolo Sturni.
CÔTÉ SALLE À MANGER, quatre chaises d’Ico Parisi entourent une table DS1 de Charles Rennie Mackintosh, devant une oeuvre en papier sous Plexiglas de Claudine Drai. Le beau lampadaire en bois tourné vient de chez un antiquaire de Brindisi, la desserte à roulette de chez l’antiquaire romain Paolo Sturni.
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 ??  ?? UNE CHAMBRE ONIRIQUE, sous les arches peintes du palazzo Muci. Au fond, le bloc en laiton patiné abrite la salle de bains. Au bout du lit, une table basse faite avec une laque chinoise xviiie. Au premier plan, une table basse ovale en laiton martelé de Davide Caprioli. Tête de lit Celia (Sika Design), linge de lit (Bertozzi), plaid ( Vivaraise), coussin (Les Ottomans chez Appia Appia).
UNE CHAMBRE ONIRIQUE, sous les arches peintes du palazzo Muci. Au fond, le bloc en laiton patiné abrite la salle de bains. Au bout du lit, une table basse faite avec une laque chinoise xviiie. Au premier plan, une table basse ovale en laiton martelé de Davide Caprioli. Tête de lit Celia (Sika Design), linge de lit (Bertozzi), plaid ( Vivaraise), coussin (Les Ottomans chez Appia Appia).
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 ??  ?? LUMINEUSE, LA CUISINE dessinée sur mesure par Jérôme Faillant Dumas accueille une table et des chaises en bois 1950 de Paolo Buffa sous une suspension années 1950 en verre dépoli de l’architecte danois Bent Karlby pour Lyfa. Le sol est en dalles de pierre de Lecce.
LUMINEUSE, LA CUISINE dessinée sur mesure par Jérôme Faillant Dumas accueille une table et des chaises en bois 1950 de Paolo Buffa sous une suspension années 1950 en verre dépoli de l’architecte danois Bent Karlby pour Lyfa. Le sol est en dalles de pierre de Lecce.
 ??  ?? AUTOUR DE LA CHEMINÉE, une bibliothèq­ue d’Ico Parisi trouvée chez l’antiquaire romain Paolo Sturni, une table basse en laiton et verre chinée, et un divan Princesse (Caravane). Au mur, trois céramiques années 1950 de Guerrino Tramonti.
AUTOUR DE LA CHEMINÉE, une bibliothèq­ue d’Ico Parisi trouvée chez l’antiquaire romain Paolo Sturni, une table basse en laiton et verre chinée, et un divan Princesse (Caravane). Au mur, trois céramiques années 1950 de Guerrino Tramonti.
 ??  ?? AVEC SA TÊTE BAROQUE dessinée par Jérôme Faillant- Dumas, le lit trône dans la suite principale du palazzo Maritati. Lampes de chevet, appliques et céramiques amphores (Enzo Fazano), linge de lit (Bertozzi).
AVEC SA TÊTE BAROQUE dessinée par Jérôme Faillant- Dumas, le lit trône dans la suite principale du palazzo Maritati. Lampes de chevet, appliques et céramiques amphores (Enzo Fazano), linge de lit (Bertozzi).
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DANS LA SALLE DE BAINS comme presque partout dans le palazzo Maritati, le sol est en mosaïque patiemment assemblée par un artisan local. À côté de la baignoire, une chaise Superlegge­ra de Giò Ponti tapissée d’un tissu de Fornasetti.

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