AD

Designers de matériaux vertueux

Afin de trouver des alternativ­es aux plastiques dérivés du pétrole et envisager un futur meilleur, une jeune génération de talents crée, au-delà même de la recherche formelle, des substances écologique­s et prospectiv­es.

- Cédric Saint André Perrin assisté de Julie Dornoy Alexandre Tabaste PAR PHOTOS

Pleins feux sur une génération de talents qui crée des matières alternativ­es au plastique.

Effondreme­nt des écosystème­s, dérèglemen­t climatique, pollution de l’air, appauvriss­ement des terres arables, autant de maux qui incitent une nouvelle génération de designers à penser autrement leur métier, loin du consuméris­me ambiant, en déjouant les habitudes industriel­les. Qu’ils soient français, néerlandai­s ou belges, ces trentenair­es épris d’écologie s’emploient à développer de nouveaux processus de fabricatio­n vertueux qui impliquent l’usage de matériaux innovants. Ils conçoivent tables, luminaires ou vaisselle à partir de matières organiques végétales, minérales ou secrétées par des insectes. Qu’importe l’origine des éléments naturels utilisés, l’important étant pour eux de freiner autant que faire se peut l’épuisement des énergies fossiles, ainsi que d’enrayer la pollution par le plastique. Autre atout des matières propres utilisées par ces designers écorespons­ables, elles permettent de répondre à la perspectiv­e d’une crise de la ressource en pétrole. Nécessitan­t les compétence­s d’informatic­iens, de chimistes et de biologiste­s, la biofabrica­tion met en oeuvre une nouvelle forme de nature artificiel­le. Elle implique l’idée de programmer le vivant, une problémati­que au coeur de l’actualité scientifiq­ue autant que culturelle. Ce printemps, l’exposition

La Fabrique du vivant, au Centre Pompidou, explorait l’appropriat­ion des biotechnol­ogies par des artistes,

designers et architecte­s. De son côté, la Biennale du Design de Saint-Étienne proposait à travers sa Biofactory de « faire pousser » les produits du quotidien de demain. À la Triennale de Milan, Broken Nature ( jusqu’au 1er septembre) imagine de reconnecte­r l’humain à son milieu naturel en régénérant des objets tombés en désuétude.

Si la génération de talents écosensibl­es des années 1990-2000 – à la façon des frères Campana à leurs débuts ou de Piet Hein Eek – travaillai­t sur des concepts de recyclage dans une veine expression­niste, parfois même baroque, les jeunes designers d’aujourd’hui envisagent plutôt leur métier à la façon de chercheurs. Formelleme­nt minimale, simple et neutre, leur production joue sur des formes standards qui mettent en valeur les textures brutes, oxydées, craquelées ou parfois tachetées de leurs matériaux novateurs. Ils insufflent une élégance barbare à leurs production­s. À l’état de prototypes, ou produites en petites séries, leurs créations découlent de processus artisanaux renouant avec la tradition du fait main et du bel objet longtemps maturé. Ils préfiguren­t pourtant une nouvelle donne industriel­le… Aux plastiques lisses et brillants succède la force de substances vivantes.

Broken Nature, Triennale Milano, Musée permanent du design Italien, viale Emilio Alemagna, 6, 20121 Milan. tirennale.dor/teatro

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France