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Retour à l’essentiel

Face à l’océan Pacifique, au Chili, l’architecte Alejandro Aravena a bâti une oeuvre radicale en béton. Une démonstrat­ion quelque peu rugueuse de ce qui, dans une maison, est primordial – ou pas.

- LES TROIS ÉLÉMENTS

Au Chili, l’architecte Alejandro Aravena a bâti, face au Pacifique, une villa en béton, radicale et spectacula­ire.

Certaines maisons nécessiten­t des pages de descriptio­n pour expliquer leur plan, comme autant de bavardages inutiles dissimulan­t le discours incertain de l’architecte qui en est à l’origine. Pour la Casa OchoQuebra­das – du nom du site sur lequel elle est située, dans le nord du Chili –, ce n’est nullement le cas, Alejandro Aravena, l’architecte qui l’a dessinée, n’étant pas connu pour se prêter à ce genre de jeux. Lui qui, avec son agence baptisée Elemental, s’est distingué en repensant le logement social dans son pays, et a remporté le prix Pritzker en 2016, l’équivalent du prix Nobel pour les architecte­s. Il n’avait pas encore 50 ans, dans une discipline où l’on est considéré comme jeune à 40 ans.

La Casa OchoQuebra­s, c’est donc l’histoire de trois volumes de béton posés l’un contre l’autre sur un caillou face à l’océan Pacifique. Ou comment faire plus avec moins, dans un paysage aussi somptueux que spectacula­ire, sculpté par des éléments sans cesse déchaînés qui cisèlent depuis toujours cette côte longée par la mythique route panamérica­ine. Un morceau de roche sur lequel l’architecte chilien est venu compléter un programme immobilier dispersé

dans la région. Baptisé Ochoalcubo, il réunit les meilleurs architecte­s chiliens et japonais afin de bâtir un ensemble de villas de vacances, dans ce coin reculé du monde, comme autant de démonstrat­ions architectu­rales radicales. Des cartes blanches qui sonnent souvent comme des manifestes contre une architectu­re contempora­ine que certains considèren­t à la dérive. La Casa OchoQuebra­s revendique ainsi un retour à l’essentiel, à travers une compositio­n simple, quasi primitive, qui vient heurter cette époque où « la soif de nouveauté menace la discipline de devenir immédiatem­ent obsolète », selon Alejandro Aravena, et que seule l’intemporal­ité pourrait venir contrer. Pour cela, l’architecte et son équipe ont choisi de revenir en arrière, « non pas comme une évasion nostalgiqu­e mais comme un filtre naturel contre les clichés de l’innovation », à travers trois blocs se répartissa­nt en pièce de vie, partie nuit et pièce de feu.

Le bloc de la pièce de vie sert en partie de socle pour accueillir le second, celui des chambres et des salles de bains. Il s’ouvre en son centre sur un vaste patio, appelé la « pièce de feu », surmonté d’un large foyer qui dessine, vu de l’extérieur, le troisième bloc. Incliné, c’est le plus important du projet finalement, celui qui met en valeur le feu, soit l’élément essentiel du quotidien de l’homme à l’époque primitive. Ne reste plus aux traces de banchage du béton qu’à vieillir à présent, pour effacer de cette oeuvre aussi brutale que radicale toute datation possible. Retour à l’âge du feu, le temps des vacances.

Une maison où le béton est à la fois brutaliste et doux pour ses habitants.

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LA CASA OCHOQEBRAD­AS est composée de trois blocs semblant reposer en équilibre les uns sur les autres.
SE DÉCOUPANT SUR LE CIEL, la silhouette de la Casa OchoQuebra­das, dont le brutalisme renvoie à celui du paysage de lande et de cactées qu’elle domine. LA CASA OCHOQEBRAD­AS est composée de trois blocs semblant reposer en équilibre les uns sur les autres.
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Cristobal Palma PHOTOS Sophie Pinet TEXTE
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TOUT EN BÉTON, la pièce principale concentre le minimum nécessaire pour subvenir aux besoins du quotidien, soit un coin cuisine et une table entourée de chaises Panton ( Vitra) orientés vers le foyer, situé au centre de la maison et au coeur du projet de l’architecte Alejandro Aravena.
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LA PIÈCE DE FEU, comme aime à l’appeler Alejandro Aravena, se situe au coeur de la maison, Ce patio est surmonté d’un vaste foyer qui, vu de l’extérieur, apparaît comme le troisième volume en béton du projet.
 ??  ?? SUR LE TOIT TERRASSE, l’architecte s’est servi du bois utilisé lors du banchage des murs durant la constructi­on pour habiller le sol.
SUR LE TOIT TERRASSE, l’architecte s’est servi du bois utilisé lors du banchage des murs durant la constructi­on pour habiller le sol.
 ??  ?? de la maison qui domine l’océan. Le socle est la pièce de vie, le bloc penché est la cheminée du foyer, à droite, le bloc le plus vertical abrite les chambres.
de la maison qui domine l’océan. Le socle est la pièce de vie, le bloc penché est la cheminée du foyer, à droite, le bloc le plus vertical abrite les chambres.
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 ??  ?? LE VOLUME DE BÉTON qui accueille les chambres et les salles de bains s’ouvre sur un côté par des fenêtres protégées par de grands volets en bois.
LE VOLUME DE BÉTON qui accueille les chambres et les salles de bains s’ouvre sur un côté par des fenêtres protégées par de grands volets en bois.
 ??  ?? LA CHAMBRE PRINCIPALE, ouverte sur l’océan Pacifique et son front de mer déchiqueté.
LA CHAMBRE PRINCIPALE, ouverte sur l’océan Pacifique et son front de mer déchiqueté.
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