Fenêtres sur la ville
Christian Astuguevieille, créateur aux multiples talents, s’est aménagé loin de l’agitation parisienne une maison de ville dans le coeur historique de Bayonne. Un lieu pensé comme une oeuvre, où il vient pour se reposer et dessiner.
Dans le coeur historique de Bayonne, le créateur Christian Astuguevieille a repensé sa maison de ville comme une oeuvre totale.
Le rendez-vous était donné sur la place des Gascons, là où le coeur de Bayonne, bordé par la Nive, bat au rythme de son marché couvert. On est loin de la galerie Vivienne où il n’est pas rare de croiser l’élégante silhouette de Christian Astuguevieille, souvent toute de noir vêtue. Et presque tout le temps signée Comme des Garçons, tel un clin d’oeil à cette maison dont il crée les parfums depuis toujours. Directeur de création pour la maison donc, mais créateur polymorphe surtout. Notamment de mobilier, exposé dans sa galerie du passage du IIe arrondissement parisien, que les collectionneurs s’arrachent dans le monde entier, et qu’il vient souvent dessiner ici, dans la capitale du pays Basque. Comme convenu, Christian Astuguevieille apparaît au premier coup d’oeil, nous attendant pile à l’heure du rendez-vous à l’une des fenêtres qui rythment les façades élevées des immeubles du centre historique de la ville du Sud-Ouest et témoignant d’un type d’habitat unique en son genre : le logement sous deux clés.
Soit des logements bâtis au xviiie siècle sur des parcelles longues et étroites, dans lesquelles on trouvait un premier logement côté rue, et, derrière un puits de lumière éclairant un vaste escalier, un deuxième logement. Une architecture singulière que Christian Astuguevieille va découvrir par hasard. Plus habitué aux
charmes balnéaires de Biarritz, c’est à la recherche d’un lieu de villégiature qu’il visite cet immeuble envahi par les plantes, qui accueillait jadis un grainetier. Il tombe immédiatement sous le charme des volumes atypiques qu’il découvre derrière la façade discrète, et de cet escalier monumental, transformé au xixe siècle, qui occupe les deux-tiers de la maison.
À l’aide d’artisans expérimentés, il va alors s’atteler à un vaste chantier de 19 mois. « Au départ, je voulais habiller les murs de différentes essences de bois, sur les quatre étages. » Finalement, seul le salon est habillé de planches de châtaignier non délignées, « à la manière d’une grange », tandis que son écriture imaginaire à l’encre de Chine habille d’autres murs, dont ceux de la cage d’escalier.
« J’ai travaillé dessus chaque jour de la semaine, pendant quatre mois.
Je ne savais pas où j’allais. » Une écriture qui ressemble à une gestuelle disciplinée, créant parfois des répétitions, et dont le résultat le surprend encore lorsqu’il pose ses bagages ici, pour de courts ou de longs séjours, bercé par le rythme de ce centre historique, qu’il a appris à connaître, puis à aimer. Aujourd’hui plus que jamais.
« L’écriture imaginaire » inventée par Christian Astuguevieille recouvre un pan de mur de la chambre.