Des cartouches pleine bourre !
Trois types de bourres comparés
Bourre grasse, à jupe ou Bior ? Quelles différences pour le chasseur ? Où et comment les utiliser à bon escient ? Nous les avons testées, avec des chokes différents, pour que vous trouviez votre cartouche de la prochaine saison.
Vous êtes nombreux à vous et à nous interroger sur les différents composants de la cartouche, sur leurs rôles et effets respectifs. Au premier rang de vos questionnements : la bourre. Ou plus exactement les bourres. Quelles sont les meilleures, lesquelles choisir pour la plaine, le sousbois ? Lesquelles dispersent le plus ? Lesquelles utiliser selon le choke ? N’en jetez plus ! Vous nous avez convaincus, nous avons décidé de répondre à ces questions. Comment ? En comparant trois bourres, logées dans des cartouches identiques en calibre, charge et vitesse de gerbe. L’idée étant de les confronter à des situations courantes à la chasse et d’établir des conclusions pratiques. Avant de découvrir les résultats de ce comparatif, voyons ce qui ca - ractérise nos trois grandes familles de bourre. La bourre grasse – fautil la présenter ? – est la bourre traditionnelle, celle des cartouches de nos parents et grands-parents. Une rondelle de feutre ou de liège, parfois constituée de plusieurs rondelles d’épaisseurs et de duretés variables, empilées et collées pour former un cylindre de 10 mm ou plus. La bourre à jupe, plus moderne, est réalisée en plastique. On l’appelle aussi bourre godet, cela parce que le plastique en question a la forme d’un godet prédécoupé dans lequel les plombs sont logés. Au tir, la bourre s’ouvre en marguerite, selon les prédécoupes, et les plombs sont libérés. Le godet assure une meilleure cohé- sion de la charge dans le canon et évite aux plombs de se déformer en frottant contre la paroi d’acier. Cette bourre comporte souvent un pied amortisseur, destiné à réduire le recul en absorbant une partie de la pression, et un socle assez large qui va jouer le rôle d’obturateur entre la poudre et la bourre évitant ainsi toute déperdition de gaz et donc de vitesse au départ du coup. La bourre Bior est à mi-chemin entre les deux premières. Elle est réalisée en plastique et, avec sa forme de diabolo, possède la particularité d’être symétrique. La partie inférieure joue le rôle d’obturateur tandis que la partie supérieure va se comporter comme un mini-godet. La charge étant, pour le reste et comme avec une bourre grasse, au contact du canon lors du tir.
La bourre grasse
Comme pour la plupart de nos essais de cartouches dites de plaine, nous tirons nos munitions sur une cible circulaire de 76 cm de côté placée sur un support papier carré de 91 x 91 cm. Nous utilisons deux chokages différents, demi et full. Sont retenues pour la rencontre trois cartouches Fob chargées de 34 g de plombs n°6. La première est une bourre grasse : une bourre fibre avec obturateur plastique. Le poids de plomb mesuré est de 34,43 g, soit 302 plombs n° 6. La pression est de 584 bars et la vitesse mesurée à 2,50 m de 388 m/s. Le premier tir est effectué avec le canon demi- choke. Le cercle de
76 cm est marqué par 203 impacts, soit 67,2 % des plombs de la cartouche ; c’est un bon groupement pour une bourre grasse, surtout à cette distance. La concentration est de 47,3%, avec 96 perforations dans le cercle central de 35 cm de diamètre, et 75,2 % de la charge atteignent la cible de 91cm. On relève 13 vides de 8 cm de diamètre dont 2 dans le cercle central de 35 cm. On peut se demander ce qu’il va advenir de cette bourre grasse avec un canon plus choké, en l’occurrence le full-choke. Il est rare que les deux soient associés, pour beaucoup de chasseurs, ce type de bourre constitue une cartouche de premier coup et une bourre à jupe convient mieux au tube le plus choké. Nous dénombrons avec le canon full-choke 200 perforations dans le cercle de 76 cm, soit 66,2 % des plombs de la cartouche, un score légèrement inférieur au tir avec le demi- choke. La concentration est quant à elle sensiblement supérieure, avec 98 impacts (49 % des plombs)
dans la cible de 91 cm, soit 2 plombs de plus qu’avec le demi-choke. La répartition est un peu plus homogène, nous trouvons 12 vides de 8 cm de diamètre dont un seul dans le cercle de 35 cm. Comme on pouvait s’y attendre au vu de leur utilisation traditionnelle en premier coup, le full- choke n’apporte pas d’amélioration réelle aux performances des cartou ches à bourre grasse. Il est même probable que le resserrage du choke perturbe la gerbe en sortie de bouche du canon, provoquant une répartition un peu plus aléatoire. La bourre grasse est bien une cartouche de canons peu chokés. Ces essais et nombre des précédents déjà réalisés montrent qu’au- delà du demi- choke, un rétreint plus important n’apporte rien aux performances de la gerbe.
La bourre à jupe
Nous passons maintenant au chargement avec une bourre à jupe et godet de 34 g de plombs n° 6 sur le papier. Le poids mesuré est de 34,3 g avec 288 plombs n° 6. La pression atteint 606 bars et la vitesse à 2,50 m 404 m/s. Avec le demi- choke, 215 plombs frappent la cible de 76 cm, soit 74,7 % des plombs contenus dans la cartouche. Sans trop de surprise, ce groupement est supérieur de plus de 7 % à celui de la bourre grasse. L’effet de concentration de la jupe se fait sentir. De même, la concentration en cible de 35 cm est de 51,2%, avec 110 perforations. 81,6% de la charge frappent le carré de 91 cm de côté, avec 235 impacts dénombrés. On relève 13 vides de 8 cm de diamètre dont un dans le cercle de 35 cm. Pour autant, la qualité de la gerbe n’est pas meilleure que celle de la bourre grasse. Passons au full-choke, le domaine de prédilection de cette cartouche, du moins dans l’esprit de nombre d’entre nous. La qualité de la gerbe va-t-elle bien être de meilleure facture que celle de la bourre grasse, avec un groupement et une concentration supérieurs ? Eh bien oui : 240 plombs viennent se loger dans le cercle de 76 cm, soit 83,3% de la charge de la cartouche, un score de presque 10 % supérieur au tir effectué avec le demi-choke. La concentration est de 50,4 %, avec 121 impacts, et 253 plombs frappent la cible de 91 cm de côté, presque 88% des plombs de la cartouche. La couverture de gerbe est excellente, avec 8 vides de 8 cm de diamètre relevés. Le full-choke joue donc plei-
nement son rôle avec une bourre à jupe, le godet évite de retrouver la perturbation que nous avions établie avec la bourre grasse.
La bourre Bior
Notre essai se termine avec la cartouche à bourre Bior, comportant un petit godet où se logent environ 20% de la charge. Le poids réel mesuré de cette autre 34 g est de 33,9 g avec 318 plombs n° 6. Un petit diamètre pour du n° 6, la norme Afnor étant de 7 à 9 plombs au gramme – ici nous en dénombrons 9,27, on pourrait presque parler de n° 6,5. La vitesse à 2,50 m est de 385 m/s et la pression de 608 bars. Avec le demi- choke, 237 plombs trouvent le chemin de notre cible de 76 cm, soit 74,5 % des plombs de la cartouche. Ce groupement est équivalent à celui constaté avec la bourre à jupe, autrement dit le chargement Bior obtient un très bon résultat avec le demi-choke. La concentration est de 40,1 % avec 95 perforations dans le cercle central de 35 cm de diamè- tre. Plus de 86,5 % des plombs sont retrouvés dans le carré de 91 cm de côté avec 275 impacts dénombrés, un résultat qui est même supérieur à celui obtenu avec la bourre à jupe. Le nombre de vides de 8 cm de diamètre est de 10, la répartition de la gerbe est là encore meilleure qu’avec la bourre à jupe dans le demi-choke. Voyons si ce chargement confirme sa supériorité avec le full-choke ou bien, comme avec la bourre grasse, si le rétreint perturbe la sortie des plombs qui ne sont pas protégés par un godet. Le nombre de plombs dans le cercle de 76 cm est de 243, soit 76,4% de ceux contenus dans la cartouche, un score identique au tir de cette cartouche dans le demi-choke. La concentration est de 41,2 % avec 100 impacts centrés. Dans la cible de 91 cm, on relève 286 im pacts, presque 90 % de la charge. La couverture de gerbe est bonne, avec 11 vides de 8 cm de diamètre. Ces résultats du chargement avec la bourre Bior viennent donc se classer entre ceux de la bourre à jupe et ceux de la bourre grasse.
La saison sera changeante
Les caractéristiques annoncées par les encartoucheurs se vérifient, nos trois chargements ont bien chacun leur utilité. Le chargement avec une bourre grasse est idéal en premier coup jusqu’à 30 m dans un canon demi-choke. On pourra encore l’employer dans un trois quarts de choke, ce qui évitera de trop resserrer et ainsi de perturber la gerbe en sortie de canon. La bourre à jupe quant à elle s’exprime parfaitement à 35 m et plus dans le full-choke, avec plus de 50% de concentration dans les deux canons, demi et full. Elle prouve sur le terrain qu’elle a été conçue pour des tirs lointains en conservant une concentration et une énergie qui foudroient les gibiers les plus coriaces. Enfin, le chargement avec la bourre Bior, la plus récente des trois bourres, donne une couverture de gerbe à 35 m de meilleure qualité que le chargement à bourre grasse et, dans le demi-choke, fait jeu égal avec le chargement à bourre à jupe. La concentration est en revanche inférieure aux deux autres avec à peine un peu plus de 40%. Pour autant, nous ne pouvons pas parler de « mauvaise » concentration puisque la répartition des plombs est parfaite, aucun vide n’est relevé dans le cercle de 35 cm. Le mini- godet doit avoir un léger effet de dégarnissage du centre de la gerbe mais une plus belle répartition dans la cible de 76 cm de diamètre est du coup réalisée. Un détail qui peut avoir son importance si vous devez tirer à des distances variables et parfois courtes. En conclusion, pour l’ouverture, quand le gibier est moins farouche, la bourre grasse reste le chargement idéal. Même à 35 m avec un fullchoke, ce sont presque 50 % des plombs que nous retrouvons dans le cercle de 35 cm de diamètre. Mais attention, ce chargement ne voit pas ses résultats s’améliorer avec un cho-
kage plus fort, tenez-en compte si votre fusil est trois quarts/ full par exemple. Et pensez à faire vérifier vos chokes, on ne sait jamais. Ensuite, en avançant dans la saison, la bourre Bior, avec plus de 75 % de groupement en demi comme en fullchoke, constituera un excellent choix. Elle est paradoxalement la moins connue des chasseurs, sans doute du fait de son arrivée relativement récente sur le marché, et est surtout utilisée par les tireurs de parcours de chasse avec des charges de 28 g pour des plateaux à distance intermédiaire. Mais elle mérite de devenir pour nous une cartouche polyvalente tout au long de la saison. La bourre à jupe reste la reine des coups de longueur, la cartouche de la fin de saison, pour les pigeons ou les faisans bien en plume et méfiants qui décollent loin ou passent très haut dans le ciel. Sans forcément arrêter un planning bien carré qui cantonnerait la bourre grasse au mois de septembre, la Bior à octobre et novembre et la bourre à jupe à décembre et janvier, ces essais nous prouvent que nous aurions beaucoup à gagner à ne pas tirer le même type de cartouches tout au long de la saison. Ne dit-on pas que l’ennui naquit un jour de trop grande uniformité ?