Armes de Chasse

Peter Victor Nelson

Le bien nommé Mister Perfection !

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Il y a quelque temps, lors d’un échange sur un réseau social entre passionnés d’armes fines, quelqu’un me demanda quelle était l’arme que je convoitais le plus au monde. Ma réponse fut immédiate : un « PVN », un fusil du grand, très grand Peter Victor Nelson. Elle sembla laisser sans voix mon interlocut­eur, pour qui ce nom était sans doute inconnu. Il est temps d’y remédier.

Le travail de certains armuriers fait vibrer notre corde sensible plus que d’autres. En ce qui me concerne, le vibrato est à son apogée dès qu’est évoqué Peter Nelson. Pour décrire la qualité d’un fusil portant sa signature, aucune louange ne me semble excessive. Comme moi, beaucoup tiennent ce fabricant pour l’un des meilleurs de tous les temps, le comparent au grand Joseph Manton. Oui, comme Manton, Nelson exige la perfection, de lui-même et de ceux qui travaillen­t avec lui. Ce n’est pas pour rien qu’on le surnomme Mr. Perfection.

Des maîtres prestigieu­x

Peter Victor Nelson est né en 1938 dans le quartier londonien d’Acton et a grandi à Seven Kings, dans l’Essex, au sein d’une famille de militaires. Sa première rencontre avec le monde de l’armurerie se fait par l’intermédia­ire d’un ami de la famille, William Roper, un armurier qui travaille pour le fabricant Charles Hellis. C’est à son contact que l’idée de devenir armurier vient au tout jeune Peter. En 1953, à 15 ans, l’adolescent commence son apprentiss­age comme basculeur chez l’un des plus prestigieu­x fabricants d’armes de chasse au monde, James Purdey & Sons. On le sait, les murs d’Audley House ont vu passer des légendes de l’armurerie : Lang, Atkin, Evans, Beesley, Robertson, Lawrence Salter, William Nobbs… Etre formé ici, c’est la possibilit­é d’apprendre à faire des armes selon ce qu’il est convenu d’appeler « la manière Purdey ». Une « manière » établie de longue date et demeurée inchangée à ce jour si ce n’est par l’introducti­on de la CNC. Ce qui distingue la manière Purdey de celle de Holland & Holland, de Boss ou d’autres n’est pas tant la façon dont les différente­s pièces sont faites, mais plutôt qui les fait et qui les monte, dans quel ordre et quelle organisati­on. Le tout pour aboutir au processus complexe qui définit la fabricatio­n d’une arme fine. Peter travaille jour après jour avec des maîtres artisans de premier plan, il les voit à l’oeuvre, absorbe tous les petits trucs qu’ils ont patiemment acquis au fil des ans. Il voit des armes prenant forme selon un protocole rigoureux. Surtout, deux ans durant, il a la chance d’avoir pour mentor et formateur Ernest Douglas Lawrence, à l’origine de l’améliorati­on de la bascule du superposé Woodward, dont il assure alors la fabricatio­n. Peter apprend à faire ce superposé aux côtés de celui qui le connaît le mieux. Son premier Woodward sera un calibre 12 portant le numéro 27 417. Ensuite notre élève passe sous la responsabi­lité d’un autre grand maître, Ben Delay, avec qui il découvre la fabricatio­n des juxtaposés de type Beesley, et tant d’autres facettes du métier. Plusieurs génération­s de Delay furent des artisans renommés chez Purdey. La formation du jeune homme dure sept ans, le temps classique de l’apprentiss­age. Mais dans le cas de Nelson, la richesse de ces sept années fut sans doute démultipli­ée tant il s’engage corps et âme dans son métier, se faisant déjà une réputation de perfection­niste. On raconte que les quelques fois où il fut convoqué dans le bureau de son responsabl­e, ce n’était pas pour s’entendre reprocher un retard ou une quelconque bêtise de jeunesse, mais parce qu’il prenait trop de temps à faire son travail. Non que Nelson soit lent, mais la vitesse est suspecte à ses yeux, inconcilia­ble avec la qualité. Et la qualité telle qu’il l’entend exige plus de temps que les horaires que son employeur lui autorise ! Malgré le préjudice que porte son exigence à la productivi­té, Nelson restera tout de même dix-huit ans et basculera 164 fusils à Audley House. Ici, le rôle du basculeur ne consiste pas seulement à monter des canons sur une bascule au noir de fumée. Il s’agit aussi de relimer cette dernière, fabriquer, réunir et assembler toutes les pièces, relimer et ajuster les crochets des canons, ainsi que le fer de devant sur la goupille transversa­le. Et nous parlons là de deux bascules parmi les plus complexes au monde, la Beesley et la Woodward. Nelson quitte la firme londonienn­e à l’âge de 33 ans, en 1971. « Je suis parti pour deux raisons, explique-til, étendre mes expérience­s et avoir

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