La durée de vie des étuis
Une cartouche, c’est de la poudre, une balle, une amorce et un étui. Si le rechargeur accorde beaucoup d’attention aux trois premiers composants, il néglige parfois l’étui. Or c’est l’élément le plus cher de la cartouche, une pièce maîtresse qu’il faut fa
Jusqu’où les tirer sans tirer sur la corde ?
De retour d’une belle journée de chasse ou d’entraînement au stand, vous déballez vos étuis métalliques, que vous avez consciencieusement ramassés après les tirs pour faire place nette. Bravo. Mais la « récup » n’est pas seulement vertueuse pour l’environnement, elle l’est aussi pour votre budget : ces étuis, après les avoir désamorcés, recalibrés, nettoyés, vous allez pouvoir les réutiliser. C’est là un volet essentiel du rechargement si l’on songe qu’un des principaux intérêts de celui-ci est économique et que les étuis sont les composants les plus chers des cartouches. Leur réutilisation permet de fabriquer des cartouches à moindre coût parfaites pour s’entraî- ner régulièrement sans se ruiner. Bien sûr à cet avantage comptable s’ajoute la possibilité de pouvoir fabriquer des cartouches uniques ou de jouer sur le type et la charge de poudre pour améliorer la précision de l’arme. Sans parler de la satisfaction de ramener le trophée de sa vie tiré avec une cartouche montée par nos soins avec des composants choisis un à un, dont bien sûr un étui parfait. Tout cela est bel et bon, à condition de ne pas dépasser le nombre de tirs que nos précieux étuis vont pouvoir supporter en toute sécurité. Car non, leur durée de vie n’est pas infinie ! Les étuis étant soumis à des causes de mortalité multiples, il convient de commencer par sortir les candidats inaptes avant de débuter toute opération de recyclage.
D’abord, on fait le tri
Tout étui fendu verticalement au collet ou le long du corps est à éliminer. Si vous constatez que plusieurs étuis ont subi cette infortune, ce peut être le signe que le lot complet a atteint sa fin de vie. La longueur de l’étui doit être contrôlée et si nécessaire passée au raccourcisseur de douille. Le logement d’amorce peut avoir été élargi. Si vous ne sentez aucune résistance lors de la mise en place d’une nouvelle amorce dans son logement, une fuite des gaz est susceptible de se produire sur le pourtour de l’amorce, l’étui n’est plus utilisable. Au tir, le métal de l’étui flue vers l’épaulement et le collet. Cet épais-
sissement laisse à ce dernier de moins en moins de place pour s’expandre dans la chambre et libérer la balle. Une balle présentée sur le collet de l’étui avant recalibrage doit pouvoir s’y glisser sans effort. Dans le cas contraire, le collet est devenu trop épais, le fluage du métal va provoquer un affaiblissement de l’étui audessus du culot qui peut aller jusqu’à une rupture et toutes les conséquences que cela implique. Là encore, l’étui doit être éliminé. L’apparition d’une zone claire au- dessus de la partie pleine de l’étui doit vous alerter sur un début d’affaiblissement. Maintenant que le ménage est fait, voyons comment procéder avec les candidats rescapés. Un étui tiré s’est conformé à la chambre et il s’agit de ne pas redescendre l’épaulement nouvellement créé à sa position d’origine. Barbouillez le collet de feutre indélébile. Vissez l’outil de recalibrage sur la presse en laissant un espace libre de 2 mm entre la base et le support d’étui en position haute. Une fois l’étui recalibré, observez l’effacement de la couche de feutre et descendez l’outil jusqu’à un effacement total.
On passe à la cuisson
Un recuit, sur un étui désamorcé et vide bien sûr, va vous permettre de redonner de la souplesse à un collet rendu dur et cassant par les reca - librages successifs. Nul besoin d’un outillage coûteux pour réaliser cette opération, une gamelle en fer à fond plat et un chalumeau, type Campingaz, font l’affaire. Remplissez la gamelle d’eau froide et positionnez l’étui à recuire. Tout en tournant la gamelle, chauffez le collet jusqu’à obtenir une décoloration du collet et de l’épaulement. L’étui, qui barbotant dans son bain a gardé le cul au frais, peut alors être basculé dans l’eau pour bloquer la montée en température. La température optimale est atteinte lorsque le collet prend une couleur rouge sombre. Si le culot a subi un coup de chaud, l’étui est devenu dangereux à utiliser, détruisez-le. Avec un peu de pratique, vous arriverez à un recuit régulier. Les lots d’étuis homogènes obtenus assureront une retenue du projectile dans le collet et une montée en pression régulières d’une cartouche à l’autre. Le recuit prolonge la vie des étuis de cinq ou six tirs en moyenne et peut être recommencé lorsque le besoin s’en fait sentir. Quelle durée de vie peut-on espérer de ces bons soins ? Très difficile de répondre tant il est vrai qu’il existe autant de méthodes de fabrication que d’encartoucheurs, avec des contrôles plus ou moins stricts. Ensuite chaque arme et chaque lot de cartouches possèdent des dimensions différentes. Les armes à canon rayé sont fabriquées selon des normes
édictées par la CIP en Europe et la SAAMI aux Etats- Unis, avec des tolérances des chambres et des cartouches pas toujours identiques. Les alésoirs utilisés pour le chambrage des canons sont employés jusqu’à la limite d’usure, donnant lieu à des chambres aux cotes maxi si elles ont été alésées avec un outil neuf ou au contraire aux cotes mini si elle l’ont été avec un outil en fin de vie. Il en est de même pour les outils d’étirage des étuis, et les dimensions variables qui en résultent compliquent quelque peu notre travail. Il nous faut ajuster le réglage de nos outils afin de ne pas changer la géométrie des étuis obtenue après le premier tir – sur la photo p. 112 (au centre), vous voyez que les étuis sont recalibrés sans rabaisser le nouvel épaulement créé.
Durée limite de consommation
Dans ces conditions, il est hautement délicat d’établir une généralité. Disons que la durée de vie d’un étui dépend déjà de l’arme dans laquelle il a été utilisé. Avec leur alimentation et de leur éjection viriles, leur charge de poudre importante, les semi- automatiques font beaucoup plus souffrir les étuis que des armes à réarmement manuel. Dans une arme à verrou ou basculante, on peut compter sept ou huit rechargements pour un calibre standard et cinq ou six pour un calibre magnum, les calibres à vitesse initiale élevée tendant à fatiguer davantage les étuis. Dans une semi-auto, on passe à trois ou quatre. Vous rencontrerez des tireurs qui vous diront recharger des étuis des dizaines de fois. C’est possible, et je l’ai fait, mais uniquement avec des rechargements très soft sans commune mesure avec la puissance des cartouches utilisées à la chasse.