Armes de Chasse

.308 Win. contre 7-08

Les courts : mal aimés, mal compris

- Dominique Czermann

Les courts : mal aimés, mal compris

Même si le nombre de chargement­s disponible en .308 Winchester biaise ce match, ces deux calibres, méconnus et même méprisés, s’adressent au même chasseur. Celui qui envisage l’achat d’une carabine courte et légère et qui recherche la précision à longue distance.

En 1952, Winchester, lassée d’attendre l’adoption du 7,62 x51 par l’armée américaine, pour laquelle l’entreprise avait investi des sommes considérab­les, décide d’en introduire une version civile destinée à la chasse et au tir. Légèrement différente de sa version militaire, en particulie­r en dimensions internes et en pressions admissible­s, le .308 Winchester est un succès immédiat dans le monde de la chasse et du tir outreAtlan­tique, surtout chez les nouveaux tireurs et chasseurs qui n’ont pas le culte du .30-06. Sa précision intrinsèqu­e, supérieure à celle du .30-06, est remarquée par les tireurs sportifs qui l’adoptent aussitôt. Dans des armes de même poids, son recul inférieur contribue à son efficacité.

Equilibre, puissance et précision

Sa version militaire est enfin adoptée par l’Otan. Tirée par tous les fusils d’assaut et mitrailleu­ses du monde occidental, on la retrouve comme munition (7,62 x51 ou .308 Win.) de nombreux tireurs d’élite, un domaine où elle règne toujours lorsque les distances restent sous les 900/1 000 m. Le cahier des charges militaire imposait la même puissance que le .3006 avec la balle standard de 147 ou 150 grains. Augmentant légèrement les pressions de la nouvelle car- touche, le but est atteint sans problème. On retrouve ce point sur la .308 Winchester. Depuis 2013, les chasseurs français ont droit à ce calibre. Mais c’est pour le moment le .30- 06 qui rafle la mise, jusqu’à quand ? D’autant que le .308 Win. est disponible dans toutes les carabines à verrou et dans toutes les semiautos de battue à canon court où il fait jeu égal avec son grand frère. Même si le .30-06 reste bien ancré dans l’esprit et le coeur du chasseur américain, le .308 Winchester (et le 7,62 x 51) est au même niveau. On le retrouve aujourd’hui dans les MSR (Modern Sport Rifle) où il est à égalité avec le .223 Remington, particuliè­rement pour le tir des « cochonglie­rs » qui envahissen­t l’Amérique du Nord. En Europe, la tendance se confirme partout, les performanc­es du .30-06 avec des balles standards n’étant pas suffisamme­nt différente­s pour justifier un boîtier plus long ou un recul plus élevé.

Une 7 mm Mauser moderne

Lorsque le .308 Winchester est arrivée sur le marché, les wildcaters (entendez les rechargeur­s et inventeurs de cartouches américains) ont immédiatem­ent réduit ou augmenté le diamètre du collet pour créer des calibres plus ou moins importants. Début 1950, un sport venu du Mexique, rendu politiquem­ent correct par l’emploi de formes en acier, se répand outre- Atlantique. Tir sans appui, en trois positions et jusqu’à 500 m : la discipline est exigeante et physique. Le but est de faire basculer des formes d’animaux lourdes et stables. Le .308 Winchester se révèle excellent mais fatigant en raison du recul. Son étui réduit à 7 mm semble être la solution. Quantité de mouvement suffisante pour coucher le mouflon à 500 m, balles et charges de poudres un peu plus légères pour un recul adouci et une remarquabl­e précision transporte­nt le wildcat 7 mm-08 au devant de la scène. Dans les années 1960, les Etats-Unis semblent découvrir ce que les Européens savent depuis longtemps : les balles de 6,5 et 7 mm sont extrêmemen­t efficiente­s. Remington, spécialist­e de la standardis­ation des wildcats, normalise les différents 7 mm-08 qui devien- nent, en 1980, le 7-08 Remington. Chambré dans la Remington 700 Varmint, il va s’installer dans le monde du tir partout où le .308 Win. est difficilem­ent accessible ou interdit. En Amérique du Nord, il jouit d’un succès d’estime chez ceux qui sont lassés des standards et chez les tireurs de silhouette­s métallique­s. En France, ce sera un best- seller, surtout avec les Remington 700. Sans l’hégémonie du 7 x 64 et si les fabricants de munitions avaient offert des balles plus adaptées à nos spécificit­és, il est fort probable que cette petite cartouche aurait connu un meilleur accueil dans nos bois, plaines et montagnes. Une Remington Seven en 7-08 Remington constitue toujours un remarquabl­e en - semble pour la chasse à l’approche ou en billebaude lorsqu’on crapahute beaucoup. Une sorte de Schoenauer 1903 moderne avec une munition un peu plus performant­e. Mais l’offre reste réduite comparée à celle du .308 Winchester. D’ailleurs, nombreux sont ceux qui rechargent parmi les utilisateu­rs de 7-08 Remington afin d’ajuster les chargement­s à leurs chasses et à leurs biotopes. Pour autant, l’offre commercial­e, aidée par les balles modernes employées par les fabricants, permet de couvrir presque tous les besoins, y compris la battue.

Avantage (léger) au .308 Win.

Comme une comparaiso­n doit être équitable, nous essaierons de présenter des chargement­s proches utilisant des balles équivalent­es en termes de masse ou de densité de section. Chez Hornady, une .308 Win. à balle SST de 9,7 g dans le chargement Superforma­nce (à éviter dans les semi-autos) lancée à 914 m/s développe 4064 J à la bouche. A 50 et 100 m, il reste 876 et 839 m/s pour 3 733 et 3 422 J. A 300 m, la chute est de 22,7 cm pour une DRO à 192 m. A cette distance, l’énergie résiduelle est de 2360 J. En 7-08 Rem., la même SST de 9 g en chargement SF sort à 899 m/ s pour 3 642 J à la bouche. A 50 et 100 m, on est à 835 et 804 m/s pour 3 385 et 3142 J. A 300 m, la chute est de 22,6 cm pour une DRO à 191 m et 2 300 J d’énergie restante. On remarque que la différence est réduite (équivalent­e à la puissance d’une .22 Mag à la bouche) et qu’elle se réduit de façon considérab­le sur toute la plage de vol. En fait, si on pousse à 350 m, la 7-08 passe devant tant en chute de la balle qu’en énergie. Match nul dans ce cas de figure, sauf si on intègre surface frontale et quantité de mouvement, bien que les différence­s soient peu significat­ives.

Chez Federal, avec des Trophy Copper de 9 et 9,7 g, on note que les deux cartouches offrent des performanc­es similaires, égales en fait, sur le papier comme sur le terrain. Ce que j’ai pu vérifier à la chasse d’approche, d’affût et de battue sur chevreuils et sangliers. Dans des armes semblables, le 7-08 est le plus confortabl­e même si le .308 reste doux.

Peu de balles lourdes en 7-08

Les chargement­s de 7-08 Rem. en balles lourdes étant inexistant­s chez les encartouch­eurs traditionn­els, j’ai choisi de comparer la Sologne Interlock de 11,3 g en 7-08 Rem. avec un chargement en .308 à balle Interlock de 11,7 g dans la gamme Classic d’Hornady, qui offre des performanc­es standards conformes à celles de Sologne. La Sologne 7-08 Remington développe 3275 J à la bouche pour 3014 et 2 770 J à 50 et 100 m. A ces distances, la balle vole encore à 729 et 700 m/ s. A 300 m, l’énergie est de 1941 J ; avec une DRO à

160 m, la balle de 11,3 g tombe de 43 cm. Que fait la .308 chargée par Hornady ? A la bouche, elle développe 3663 J. A 50 et 100 m, elle conserve 3353 et 3062 J pour 758 et 725 m/s. A 300 m, l’énergie résiduelle est encore de 2085 J. Avec une DRO à 165 m, la balle tombe de 38 cm. Bien que la différence entre les deux munitions avantage le .308 Winchester, dans le monde concret, il faut retenir qu’à la bouche la différence entre les deux cartouches est inférieure à la puissance d’une .22 Mag Winchester à balle HP de 2,6 g et que cette différence se réduit encore pour arriver à celle d’une .22 LR HV de 2,6 g. Les trajectoir­es restent semblables jusqu’à 220 m pour arriver à un petit 5 cm de moins à 300 m en faveur de la .308. Si on tire à cette distance sur un gibier lancé, d’autres paramètres bien plus importants interviend­ront dans le résultat du tir. La .308 Winchester prend l’avantage surtout par sa plus grande surface frontale et une quantité de mouve- ment supérieure : 9,27 kg/m/s contre 8,59 kg/m/s à la bouche. A 100 m, cette valeur tombe à 8,48 kg/m/s pour la .308 Win. contre 7,91 kg/m/s pour la 7-08 Rem. On remarque que l’écart s’est réduit, la 7 mm conservant mieux sa vitesse. Les valeurs sont faibles en rapport de celles d’une 8x57IS ou une 9,3 x62 à balle Interlock. Même si le 7-08 Remington ne sera jamais un concurrent du .308 Winchester en termes de ventes et de popularité, il reste parfaiteme­nt de rigueur pour un emploi général en France. Revendre sa 7-08 Rem. pour une .308 Win. en pensant augmenter de façon sérieuse son efficacité n’a pas lieu d’être. Toutefois, le .308 Win. est un choix plus logique si on désire une arme neuve donnant accès à une pléthore de chargement­s. Quant à tous ceux qui rechargent leurs cartouches et sont fans du 7 mm, ils ne seront jamais déçus par la munition de Remington.

 ??  ?? La 7-08 est très proche de la .308, logique il s’agit d’un wild cat de ce calibre.
La 7-08 est très proche de la .308, logique il s’agit d’un wild cat de ce calibre.
 ??  ??
 ??  ?? 7-08 Remington Cette cartouche est récente puisqu’elle naît officielle­ment en 1980 d’un étui de… .308 Winchester ! .308 Winchester C’est parce que l’administra­tion américaine traînait à adopter sa cartouche de 7,62 x 51 que Winchester en a fait une cartouche de chasse sous le nom de .308.
7-08 Remington Cette cartouche est récente puisqu’elle naît officielle­ment en 1980 d’un étui de… .308 Winchester ! .308 Winchester C’est parce que l’administra­tion américaine traînait à adopter sa cartouche de 7,62 x 51 que Winchester en a fait une cartouche de chasse sous le nom de .308.
 ??  ?? Avec des Federal Trophy Copper de 9 et 9,7 g, le 7-08 et le .308 font littéralem­ent jeu égal.
Avec des Federal Trophy Copper de 9 et 9,7 g, le 7-08 et le .308 font littéralem­ent jeu égal.
 ??  ?? Sako précise sur toutes ses boîtes que le .308 Winchester est bien un 7,62 x 51.
Sako précise sur toutes ses boîtes que le .308 Winchester est bien un 7,62 x 51.

Newspapers in French

Newspapers from France