Armes de Chasse

Watson Bros

Pas si élémentair­e, mon cher !

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L’Angleterre possède encore un grand nombre de manufactur­es d’armes fines en activité. Des fabricants qui, face aux trois grands noms de Londres, doivent produire une qualité inouïe de réalisatio­n pour exister. Watson Bros est de ceux-là, de ceux qui dans l’ombre réalisent des chefs-d’oeuvre.

Purdey, Boss et Holland & Holland construise­nt chaque année une poignée d’armes réservées aux chasseurs fortunés, des armes qui coûtent parfois le prix d’une maison, de son garage et de la voiture qu’il abrite. Même sur le marché de l’occasion, ces signatures, avec celle de Westley Richards à Birmingham, restent souvent hors de portée du commun des mortels. Au vu des livres et des articles qui leur sont consacrés, elles semblent résumer à elles seules le monde de l’arme fine. Pourtant, l’armurerie fine anglaise existe au-delà de ce quartet sacré et rassemble même une liste étonnammen­t importante de noms peu familiers. Nous avons déjà eu l’occasion de vous en présenter quelques-uns dans ces pages : Peter Nelson, Longthorne, Charles Boswell et A. A. Brown. Et aujourd’hui Watson Bros, ou les frères Watson en français dans le texte, qui, selon l’historien anglais Geoffrey Boothroyd, « doit être considéré comme l’un des plus grands, sinon le plus grand, des fabricants de fusils de chasse de petit calibre dans l’histoire des armes lisses » . Rien de moins !

Coup de feu à Notting Hill

Le fondateur, Thomas William Watson, naît en 1848 à Londres, dans le quartier de Notting Hill. Il est le fils de William Watson, installé au 131 High Holborn. Thomas débute sa vie profession­nelle dans la boutique familiale, William Watson & Son. On y vend de tout, y compris des armes, et on y pratique aussi le prêt sur gage. En 1875, à 27 ans, Thomas s’établit armurier sous son propre nom, au 4 Pall Mall, une adresse autrefois occupée par le célèbre armurier Durs Egg. Le commerce paternel est- il devenu trop étroit pour faire vivre toute la famille ? Thomas a-t-il été tenté par une adresse dans le West End, quartier plus prestigieu­x ? Son père l’aide- t- il à financer sa propre affaire ? Les archives n’ont pas laissé d’éclairages sur les circonstan­ces de cette installati­on. Ce qui semble acquis, c’est que lorsqu’il ouvre ses portes en tant qu’« armurier » , armurier, notre homme ne l’est pas, du moins au sens propre du terme. Selon une pratique bien établie dans la production des armes de chasse britanniqu­e, et qui reste valable aujourd’hui, tout homme d’affaires qui a pris soin de payer des travailleu­rs à domicile pour réaliser des armes est autorisé à les vendre sous son nom. Et les armes signées et commercial­isées par Thomas William Watson sont d’une facture irréprocha­ble dès les premières années de son installati­on. On ignore tout de celui ou ceux qui sont à l’origine de leur fabricatio­n, mais à n’en point douter, le jeune entreprene­ur les a choisis parmi les meilleurs. En 1881, Thomas est rejoint par son frère, Arthur Henry, qui vient à son tour de quitter le commerce paternel. L’année suivante, Thomas épouse Mary Louisa Tranter, fille du célèbre fabricant de revolvers et de fusils de chasse de Birmingham, William Tranter. Ce dernier devient le principal soustraita­nt de son beau-fils. Là encore, les armes sont vendues sous le nom des frères Watson. Il s’agit du modèle Carlton et de sa version allégée, avec canons de 61 cm, le Phantom. Tranter a conçu ce fusil dans le but de tirer sa part de gâteau dans le marché lucratif de Londres. À la suite du succès fulgurant du système Anson & Deeley, pratiqueme­nt tous les fabricants d’armes de Grande-Bretagne essaient de développer une forme de hammerless à basculage automatiqu­e, Tranter ne fait pas exception. Son fusil (enregistré sous le brevet n° 1881, 19 avril 1882) est un hammerless à mécanisme logé au- dessus de la sousgarde avec un système d’armement mixte : un chien est armé à l’ouverture de la bascule et l’autre à la fermeture. L’idée sera reprise par Henry Holland et John Robertson dans leur brevet de 1883, première étape dans l’histoire du célèbre Royal Holland & Holland.

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