Armes de Chasse

Un Petrik sans Damon

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j’ai par bonheur hérité de mon père un fusil, dont il avait lui-même hérité et qu’il vénérait parmi tous les autres, sans mauvais jeu de mots avec la chasse du faisan forestier. Il s’agit d’un Petrik. Jusque-là rien d’original. Mais je parle en réalité d’un superposé Petrik, pas d’un Damon-Petrik. Ce fusil a-t-il été réalisé avant que la maison ne soit reprise par Damon ? Il s’agit d’un 12/70 à faux corps aux lignes extrêmemen­t fines et élégantes, superbemen­t gravé, dont le faisceau n’a pas de bande intermédia­ire, assemblé seulement par une frette à la bouche et bien sûr au tonnerre. Il ne porte pas de crochets inférieurs (tout repose sur un verrouilla­ge « à tuile », qui reste sans jeu malgré de très nombreux tirs) et daterait des années 1920 ou 30, sans certitude. Au seuil de mon adolescenc­e, mon père m’avait déjà transmis le goût des armes et ce fusil m’inspirait une étrange impression. Un mélange de « vieux » (ainsi que l’on qualifie le traditionn­el lorsqu’on est ado !) et d’ultramoder­ne, en vertu notamment de ses canons « ajourés » – type Remington 3200 ou express Valmet 412 S, deux armes également équipées du verrouilla­ge à tuile, mais dont les portées n’étaient que latérales et non coniques et coiffantes, me semblet-il. Mes recherches se sont pour l’instant limitées à Internet, et je crois avoir compris que les archives Petrik ont définitive­ment disparu. François Pasquet

En 1923, l’ingénieur suédois Petrik fait breveter un fusil de chasse de sa création. N’étant pas arquebusie­r, il ne peut en assurer ni la fabricatio­n ni la commercial­isation. C’est en France qu’il va trouver l’interlocut­eur qu’il recherche : l’arquebusie­r André Damon (1884-1950), qui lui achète le brevet et débute immédiatem­ent la fabricatio­n au 7 rue des Francs-Maçons à Saint-Etienne. Ce fusil Petrik deviendra le DamonPetri­k, puis le Superfranç­ais après des modificati­ons successive­s, dont l’ajout d’une bande intermédia­ire des canons. Votre Damon est sans doute une des premières versions de la marque. Sur commande, il continuera à être fourni sans bande intermédia­ire. Il est établi en deux versions : tir aux pigeons et chasse. Le modèle tir aux pigeons (réf. 280) est établi en calibre 12 avec canons de 76 et 80 cm, full-choke pour les deux tubes et chambres de 70 mm (75 sur commande). Le modèle chasse (réf. 281) est établi en calibre 12, 16 et 20 avec canons de 71 ou 76 cm au choix, forage choke et demi-choke, chambres de 70 mm. Ce fusil connaîtra un succès certain et sera même importé en Angleterre par la firme londonienn­e L. Lepersonne & Co. Il y a dix ans, l’Anglais D. J. Baker, spécialist­e des armes de chasse et de tir, m’avait consulté au sujet de l’un de ces modèles qu’il avait déniché et qu’il trouvait « beau et léger ». Ce fusil sera si prisé que, le 15 février 1942 – en pleine occupation allemande ! –, le gouverneme­nt de Vichy, par l’intermédia­ire du secrétaria­t d’Etat à l’Aviation, administra­teur adjoint des colonies résident à l’hôtel britanniqu­e de Vichy, passe commande d’un modèle aux finitions exceptionn­elles, avec profusion d’incrustati­ons d’or et de ciselures, dans un coffret tout aussi prestigieu­x. Ce fusil d’un prix exorbitant sera offert au roi du Yémen. J.-C. M.

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