Armes de Chasse

Alimentati­on contrôlée ou pas ?

La diététique de votre arme pour éviter les bouchées doubles

- Laurent Bedu, extrait de « De Mauser à Blaser »

La diététique de votre arme pour éviter les bouchées doubles

Souvent, dans ce magazine, il est question d’alimentati­on contrôlée. Rassurez-vous, pas de régime en vue. Certaines carabines possèdent une alimentati­on contrôlée, d’autres pas. Pourquoi ?

Il arrive que la première mouture soit la bonne. Que l’idée de départ soit finalement la meilleure, la plus simple et la plus efficace. Que toutes les « améliorati­ons » et modificati­ons apportées ultérieure­ment ne soient que des appauvriss­ements, des amoindriss­ements de la qualité du système originel. C’est sans doute la conclusion à laquelle sont arrivés, un siècle après l’invention de l’extracteur à lame par Paul Mauser, tous les concepteur­s de carabines ou presque de la planète. Car ils sont nombreux ceux qui, après avoir fait évoluer la culasse Mauser en créant une tête en forme de cuvette avec un extracteur-griffe et un éjecteur à lame ou à piston, sont revenus au schéma initial, une tête de culasse en demi-cuvette et un extracteur à lame type Mauser 98. Tout simplement parce que ce dispositif reste, aujourd’hui encore, le meilleur remède contre les risques de double introducti­on de cartouches et la forme la plus aboutie et la plus fiable pour assurer une alimentati­on contrôlée. En quoi consiste donc ce fameux extracteur à l ame Mauser ? D’abord, la tête de culasse est fraisée dans sa partie inférieure, elle est débarrassé­e de rebord, de marche sur sa moitié basse. Ainsi, lorsque la cartouche monte, poussée par le ressort de la plate- forme élévatrice du chargeur, elle vient immédiatem­ent en appui contre la tranche de la tête de culasse aussitôt bloquée par l’extracteur à lame qui ne la lâchera plus qu’en fin d’éjection. Impossible de pousser une autre cartouche vers la chambre, impossible aussi que l’extracteur se saisisse d’une autre munition. Cet extracteur long et non rotatif, car monté sur un collier qui tourne tandis que l’extracteur reste en appui contre le bord de la fenêtre d’éjection, est bien plus coûteux à réaliser qu’une griffe minuscule. Mais également bien plus efficace,

en particulie­r en Afrique où chaleur et fortes pressions s’allient parfois pour le rendre indispensa­ble pour extraire des étuis gonflés.

Winchester 70 : deux régimes

Le cas de la Winchester 70 est assez typique des hésitation­s des fabricants quant à l’intérêt à conserver l’extracteur Mauser. Le modèle 70 est à son origine, en 1936, conçu pour fonctionne­r avec une culasse se rapprochan­t fortement de celle de la Mauser 98, avec deux tenons et un long extracteur à lame. Mais, en 1964, le fabricant décide d’abandonner la production de cet extracteur pour une tête de culasse en cuvette avec extracteur-griffe. Le résultat n’est certes pas catastroph­ique pour les ventes du best-seller américain. Seulement, dorénavant,

les amateurs vont distinguer deux génération­s de modèles en parlant des « pré- » et « post-64 ». Assurément une forme de reproche qui a poussé Winchester à de nouveau proposer, en 2003, l’extracteur à lame Mauser, sans cesser toutefois de fabriquer l’autre version – la version à long extracteur s’appelant CRF ( pour Control Round Feed) et celle à extracteur-griffe, CRPF (Control Round Push Feed). Une coexistenc­e qui est maintenant révolue, puisque, depuis la délocalisa­tion de la production de New Haven vers l’usine FNM de Caroline du Sud et la reprise de la fabricatio­n de la Winchester 70, la carabine n’est plus proposée qu’en version à extracteur à lame, comme à ses débuts, plus de quatre-vingts ans plus tôt. Mais attention, l’alimentati­on contrôlée d’une carabine n’est pas uniquement dépendante de la présence du long extracteur Mauser. La preuve, la Sako 85 se distingue de sa devancière, le modèle 75, par son alimentati­on contrôlée alors même que l’extracteur- griffe de l’ancien modèle a été conservé tout comme l’éjecteur à lame s’engageant dans la tête de culasse. En fait, les ingénieurs Sako ont eu recours à l’autre astuce de Paul Mauser, le fraisage d’une partie de la tête de culasse. En clair, ils ont abandonné la forme en cuvette pour ouvrir la partie inférieure : comme sur la culasse Mauser, la cartouche monte poussée par la plate-forme élévatrice lorsque la culasse recule et vient aussitôt se plaquer contre la tête de culasse. L’extracteur-griffe se saisit du culot et plus rien ne peut dès lors séparer les deux éléments. Ce dispositif est aussi performant que le précédent, à la différence près qu’en cas de surpressio­ns ou d’étui gonflé dans la chambre, les capacités d’arrachage de la griffe d’extracteur restent bien inférieure­s à celles de l’extracteur à lame.

 ??  ?? Deux culasses de Sako, 85 à gauche et 75 à droite. La forme de cuvette de la 75 empêche toute alimentati­on contrôlée, alors qu’avec la 85 le culot de la cartouche glisse contre la tête de culasse tandis que l’extracteur s’en saisit.
Deux culasses de Sako, 85 à gauche et 75 à droite. La forme de cuvette de la 75 empêche toute alimentati­on contrôlée, alors qu’avec la 85 le culot de la cartouche glisse contre la tête de culasse tandis que l’extracteur s’en saisit.
 ??  ?? En haut, la cartouche est saisie par l’extracteur lors du verrouilla­ge, et est simplement poussée au moment du chambrage. En bas, avec une culasse Mauser 98, la cartouche est agrippée par le large extracteur non rotatif dès sa sortie du magasin, et ne sera lâchée qu’à l’éjection. Tout est sous contrôle.
En haut, la cartouche est saisie par l’extracteur lors du verrouilla­ge, et est simplement poussée au moment du chambrage. En bas, avec une culasse Mauser 98, la cartouche est agrippée par le large extracteur non rotatif dès sa sortie du magasin, et ne sera lâchée qu’à l’éjection. Tout est sous contrôle.

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