Le vert est notre ennemi
Du nettoyage des cartouches et des étuis
Du nettoyage des cartouches et des étuis
Chaque début de saison, vous retrouvez votre bonne vieille carabine toujours aussi belle, rutilante même, après quelques mois de repos. Par contre, les munitions oubliées dans la cartouchière en cuir sont recouvertes d’une oxydation aussi verte que collante… Que faire ?
Achaque retour de chasse, il est indispensable d’essuyer et de nettoyer son matériel, tout son matériel. Si la plupart d’entre nous pensent effectivement à nettoyer leur arme, certains négligent de vérifier que les cartouches non tirées sont propres et sèches – je reconnais volontiers que je suis le premier à avoir commis cette erreur. Des cartouches trimballées au fond d’une poche ou demeurées longtemps dans une cartouchière en cuir ou en tissu attirent la poussière et les résidus de toutes sortes. Les étuis peuvent être sales, ternis, décolorés ou oxydés. Or le soin avec lequel nous nettoyons le canon et la chambre d’une arme peut être réduit à néant par ces cartouches pas au mieux de leur forme. Un étui et une balle sales et oxydés peuvent déposer des résidus susceptibles de marquer les surfaces internes du canon et de la chambre ou même de s’y imbriquer. Et une chambre marquée ou rayée rendra plus difficile l’extraction d’un étui tiré. Des cartouches conservées dans leur boîte d’origine ou dans une boîte de rangement en plastique et entreposées dans un endroit sec et frais ne courent pas de risque d’altération, quelle que soit la durée du stockage. Il en va tout autrement avec des munitions qui ont voyagé dans une cartouchière. Il n’est qu’à voir l’état de certains étuis en cuir gorgés d’humidité, ils vont inévitablement ternir les cartouches. Certains produits utilisés pour le tannage du cuir provoquent même l’apparition de vert-de-gris. Vider la cartouchière après chaque sortie, la laisser respirer à l’air libre, essuyer les cartouches et les ranger dans leur boîte sont des réflexes à acquérir au même titre que l’entretien de notre arme.
Tout doux avec les cartouches !
Le procédé choisi pour nettoyer les cartouches ne doit pas risquer d’altérer les poudres et les amorces, ce qui rendrait la cartouche non seulement inopérante, mais surtout dangereuse. Une cartouche ne doit être trempée dans aucune solution que ce soit, du liquide pouvant pénétrer par l’amorce ou le collet. Les bols vibrants ne sont pas adaptés non plus. Comme cela est précisé dans le mode d’emploi de ces machines, il ne faut jamais y introduire d’étuis amorcés, encore moins de cartouches complètes. La pointe d’une cartouche ballottée dans le bol pourrait percuter l’amorce d’un autre étui et provoquer la mise à feu. Les vibrations continues de l’appareil risquent également de fragmenter les grains de poudre contenus dans l’étui, ce qui entraînerait une modification de la granulométrie et de là le coefficient d’inflammabilité. La composition
d’amorçage peut elle aussi pâtir de ce traitement. L’entretien des cartouches passe forcément par un procédé plus doux et minutieux. J’ai vite renoncé au chiffon imbibé d’ammoniac, l’odeur est insupportable et les effluves irritent les bronches. L’eau japonaise destinée à l’entretien des bronzes et des vernis donne un bon résultat. Mais le produit contenant de l’acide sulfurique, les consignes d’utilisation sont à respecter à la lettre et l’application doit être suivie d’un rinçage soigneux. J’ai finalement adopté au fil du temps une méthode qui me semble être la plus simple et la moins contraignante : un chiffon ou de la laine d’acier très fine (triple zéro) imprégné d’une lichette de pâte de nettoyage destinée au bronze ou à l’argenterie ( Simichrome, Buehler, Iosso…). Je passe ensuite un chiffon propre ou un essuie-tout pour éliminer le produit, légèrement abrasif. N’allez pas vous compliquer la vie avec les quelques taches qui peuvent subsister après ce traitement, qui ne sont en rien gênantes, sauf pour les yeux des plus maniaques d’entre nous. La manipulation et l’entretien des étuis vides (avec ou sans l’amorce percutée) sont moins problémati- ques. Un bon nettoyage doit impérativement précéder le passage des étuis dans le calibreur, qui est un outil de précision et doit le demeurer. Pour cela, sa surface interne finement polie et glacée doit être préservée de toute intrusion de corps étranger. Si vous introduisez des étuis non nettoyés, une partie des résidus de poudre que les gaz de combustion ont fait refluer autour des collets viendra se coller à la graisse de recalibrage qui se dépose au fil des utilisations dans le corps de l’outil. Avec le risque que ces résidus rayent les étuis et surtout se logent dans le corps du recalibreur. Pour éviter que trop de graisse ne s’accumule dans ce dernier, nettoyez-le régulièrement. Commencez par démonter le porte-aiguille de désamorçage, puis, à l’aide d’un écouvillon en nylon et de quelques gouttes de pétrole désodorisé, nettoyez l’intérieur de l’outil. Une fois les étuis débarrassés de leurs débris de combustion, il reste à graisser l’intérieur de leurs collets (pâte Hornady, Unique ou graisse RCBS) pour faciliter le mouvement dans le recalibreur. Pour cette opération, je conserve, à l’abri de la poussière, quelques écouvillons en laine de différents calibres.
A leur sortie du recalibreur, les étuis devront être dégraissés avant d’être versés dans le bol vibrant. Pour cela, vous pouvez simplement les essuyer ou, mieux, les faire tremper dans un bac d’eau avec une giclée de liquide vaisselle, puis les rincer. Cette seconde solution permet une meilleure élimination de la graisse déposée à l’intérieur du collet. Pour sécher les étuis, je les dépose dans un plat métallique téfloné ou dans un lèchefrite et je les passe au four à une température de 90 à 100 ° C pendant une heure. J’obtiens ainsi un parfait séchage sans risque de surchauffe du laiton, ce qui modifierait sa structure et pourrait être dangereux.
Hop ! Au bol
Les étuis ont maintenant retrouvé une partie de leur brillant d’origine. Les quelques taches qui peuvent subsister disparaîtront lors de l’étape suivante, le passage dans le bol vibrant (ou tumbler).
La vertu du bol vibrant n’est pas tant de rendre les étuis encore plus beaux et brillants qu’ils ne le sont après cette première étape que de les nettoyer en profondeur, y compris à l’intérieur et au niveau du logement d’amorce. Vous prolongez ainsi la santé de la chambre et de l’âme du canon de votre arme en évitant d’y introduire des résidus, même les plus minuscules. Un étui parfaitement propre a aussi le mérite de rendre plus repérables d’éventuelles criques, fentes et inclusions. Pour cette étape, vous remplissez la cuve du bol avec du média, produit granuleux à base de rafle de maïs ou de coquilles de noix concassés, vous y déposez les étuis, refermez le couvercle et mettez la machine en route. Sous l’effet de la vibration, les étuis sont brassés dans le produit, ce qui les nettoie parfaitement et les polit. Après une à deux heures à ce régime ( durant lesquelles vous aurez contrôlé régulièrement l’avancée du nettoyage en soulevant le couvercle), les étuis sortent brillants comme des sous neufs.
Le choix des produits
Une fois que le résultat vous satisfait, il reste à séparer le média des étuis. Pour ce faire, vous pouvez les « repêcher » à la main ou utiliser un séparateur d’étuis, dont la conception se rapproche de l’essoreuse à salade. Une troisième solution a ma préférence : un bol vibrant équipé d’une valve. En ôtant celle-ci, appareil en marche, vous libérez l’ouverture de la cuve et le média s’écoule. Vous n’avez plus qu’à sortir à la main les éventuels étuis trop grands pour passer à travers la trémie. Pensez à placer un récipient sous la valve pour recueillir le média. Le média peut contenir différents additifs, notamment pour favoriser le brillantage, et colorants, le plus couramment rouge ou vert – ce dernier me donne de meilleurs résultats et a ma préférence. Il existe aussi des recettes sans additifs, mais je n’en vois pas l’utilité dès lors que l’on veille à un essuyage soigneux des étuis. La durée de vie du média dépend de l’état des étuis que vous lui donnez à traiter, elle sera proportionnelle à leur propreté. Moins les grains ont de résidus et de crasse à absorber, moins vite ils sont saturés. Lorsque le cycle de nettoyage dépasse trois heures pour obtenir des étuis propres et brillants, il est temps de renouveler le produit. Certains fournisseurs vous proposent une solution régénérante à ajouter au média pour en prolonger la durée de vie. J’ai essayé, ça fonctionne, mais l’idée de faire tourner des étuis dans un produit saturé de crasse et de débris ne me satisfait pas. De plus, l’action de ce régénérant me semble être de courte durée. On trouve désormais sur le marché des pins en inox sensés remplacer le rafle de maïs ou les coquilles de noix. Ils sont efficaces, mais leur poids élevé doit certainement faire chauffer plus qu’il se doit le petit moteur du
tumbler et en affecter la longévité. Si d’aventure il vous arrive de laisser tourner le bol toute une nuit, c’est sans conséquence, les étuis n’en souffriront pas, l’additif légèrement abrasif n’étant pas assez puissant pour attaquer le laiton. Il vous reste à vérifier que l’évent d’amorce de chaque étui n’est pas obstrué par un grain de média. Dans ce cas, chassez-le à l’aide d’un outil suffisamment fin et long pour passer par le collet – sens dans lequel vous y parviendrez le plus facilement. J’utilise pour cette opération une tige métallique qu’un ami tourneur a fabriqué spécifiquement ou bien une tige de désamorçage pourvue de son aiguille provenant de ma boîte de pièces de rechange pour jeux d’outils. Le protocole de nettoyage que je viens de vous décrire a le mérite de la simplicité et surtout de l’efficacité. Je l’applique depuis des dizaines d’années, mes armes n’en ont jamais eu à s’en plaindre.