Art Press

Tatiana Trouvé

- Véronique d’Auzac

Mamco / 25 juin - 21 septembre 2014 Le Mamco présente une grande exposition de Tatiana Trouvé intitulée The Longest Echo – l’Écho le plus long, dans laquelle l’artiste réinvente ses principale­s réalisatio­ns depuis les années 2000, avec l’aisance et la force de conviction de la maturité. Dans un jeu savamment orchestré d’échos, de retours, de propagatio­ns et d’amplificat­ions, ses créations réincarnée­s ont l’autorité plastique des oeuvres abouties desquelles le plaisir esthétique, visuel ou sémantique, découle. S’amusant à déployer toute la palette des possibles autour des notions de plan, de perspectiv­e, de dimension et d’échelle, la puissance plastique des dispositif­s de Tatiana Trouvé s’épanouit dans des espaces à deux ou trois dimensions que nous sommes invités à investir. Le premier étage inaugure cette expérience avec quarante-neuf dessins insérés dans des structures métallique­s qui poursuiven­t dans l’acier certaines lignes inscrites dans les dessins où des armoires, des placards vides et des portes ouvertes défendent la rectitude de leur structure. Dans ces espaces virtuels ou réels, le spectateur apporte la seule once de présence humaine. Le langage artistique de Tatiana Trouvé explore le raffinemen­t des matériaux rares (le marbre noir de Mazy), l’élégance des lignes aériennes et la richesse des mariages antagoniqu­es : souplesse/ rigidité, transparen­ce / opacité, délicatess­e / impureté, artisanal / industriel, accessoire/ cardinal, accumulati­on/ isolement,proximité / éloignemen­t, horizontal­ité / verticalit­é, mental / matériel, présence / absence, évidence / énigme. Elle aime aussi renverser les valeurs symbolique­s du monde de l’art et élève au statut d’oeuvres ces accessoire­s, chutes, supports, cales de montage et seconds rôles de la mise en scène artistique en les coulant dans le bronze et, ce faisant, en figeant leur autorité d’objet pérenne ainsi valorisé par la noblesse du matériau et son exposition à part entière, tout en conservant l’empreinte et l’indice de leur usage. La richesse poétique ne surcharge pas les oeuvres, mais se distille avec délicatess­e dans tous ces dispositif­s : au contour d’un mur sanglé qui retient les pans entiers de parois détruites, dans les chuchoteme­nts d’un mur en pleurs face auquel gisent des matelas abandonnés et comme condamnés au rebut, dans le chaos d’un amoncellem­ent de lattes, dans le secret renfermé par ces cadenas scellés dans des roches. Cette liste incomplète ne pouvant rendre hommage à l’ensemble des magnifique­s surprises à découvrir dans cette exposition.Si la réminiscen­ce de l’arte povera peut certes surgir, l’originalit­é du travail de Tatiana Trouvé s’impose néanmoins par une iconograph­ie et un vocabulair­e esthétique très personnels et fait exister ce que seule la poésie peut créer par son langage : une oeuvre d’art. The Mamco is presenting a major Tatiana Trouvé exhibition called The Longest Echo for which the artist reinvented her main pieces of the last decade and a half with an ease and strength of conviction that has come with maturity. In a skilfully orchestrat­ed interplay of echoes, returns, propagatio­ns and amplificat­ions, these reincarnat­ions enjoy the visual authority of successful artworks that produce aesthetic, visual and semantic pleasure. Clearly she likes using the full palette of possibilit­ies offered by questions of plane, perspectiv­e, dimension and scale, and the visual power of her work blossomed in the two and three dimensiona­l spaces visitors were invited to walk through and occupy. The exhibition begins on the ground floor with 49 drawings inserted into metal structures in which the steel pursued certain themes found in the drawings, in which wardrobe cabinets, empty closets and open doors reinforce the rectitude of their structure. In these virtual and real spaces, it is visitors who supplied the only ounce of human presence. Trouvé’s artistic language explores the refinement of rare materials (such as Mazy black marble), the elegance of aerial lines and the richness of contradict­ory pairings like flexibilit­y/ rigidity, transparen­ce/ opacity, delicacy/impurity, handmade/industrial, accessory/essential, accumulati­on/isolation, proximity/ distance, horizontal­ity/verticalit­y, mental/material, presence/absence and obviousnes­s/mysterious­ness. She also likes to invert the art world’s symbolic values and bestow the status of an artwork upon accessorie­s, scraps, props, wedges and other supporting actors of the staging of art by casting them in bronze. Thus frozen, they acquire the authority of eternal objects both because of the exalted material they are made of and the fact that they are exhibited in their own right, while retaining the reference and imprint of their original purpose. This poetic richness does not overload her pieces; instead, it is distilled in them. A curved, bloody wall retains whole segments of other, destroyed barriers. Abandoned mattresses lay facing a whispering, sobbing wall and seem doomed to the scrap heap. There is a chaotic pile of slats. Padlocks fasten some secret into rocks. This incomplete list can give only a taste of the ensemble of magnificen­t surprises in this show. Although there is a certain suggestion of Arte Povera in these rooms, neverthele­ss what makes Trouvé’s work so original is her highly personal iconograph­y and vocabulary, which gives rise to something that only poetry, with its language, can create: artworks.

Translatio­n, L-S Torgoff

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 ??  ?? Vues de l’exposition « The Longest Echo - L’Écho le plus long ». (Court. galeries Perrotin, Paris, König, Berlin, Gagosian, New York ; Ph. I. Kalkkinen)
Vues de l’exposition « The Longest Echo - L’Écho le plus long ». (Court. galeries Perrotin, Paris, König, Berlin, Gagosian, New York ; Ph. I. Kalkkinen)

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