Art Press

Unedited History 1960-2014

- Catherine Millet

Musée d’art moderne de la Ville de Paris / 16 mai - 24 août 2014 De l’une des commissair­es de l’exposition, Catherine David (1), on connaît l’intérêt pour l’évolution de l’art vers le documentai­re ainsi que pour le Proche-Orient, ce qui explique parfaiteme­nt cette exposition consacrée à la modernité iranienne et où prédomine le medium photograph­ique, témoin privilégié de la vie quotidienn­e et de l’histoire. Dès ses origines, la photograph­ie s’est en effet profondéme­nt ancrée en Iran, puisque l’un de ses souverains, Nasr al-Din Shah (1831-1896) en a été un des tout premiers praticiens ; il va de soi que Catherine David n’aurait pas pu trouver l’équivalent dans un pays arabe. L’exposition toutefois s’ouvre sur deux hommages rendus à des peintres, Bahman Mohassess (19312010), et Behdjat Sadr (1924-2009), figures de référence, même si à nos yeux le post-surréalism­e du premier, la synthèse entre op art et calligraph­ie de la seconde paraissent un peu décalés. Leurs tableaux n’en présentent pas moins de grandes qualités plastiques, et cette ouverture éclaire le parti-pris des commissair­es : renoncer à l’exhaustivi­té pour se concentrer sur un nombre restreint d’oeuvres et de moments clefs. Ainsi se dessine le parcours : avec les dessins d’Ardeshir Mohassess, une section donne à l’illustrati­on la place importante qu’elle occupe dans la culture iranienne, section qui se prolonge dans la collection d’affiches du Festival de Shiraz-Persépolis (19671977). La documentat­ion rassemblée autour du festival, où furent représenté­s Genet, Grotowski, Kantor, Wilson…, est riche (photograph­ies, films, catalogues), d’autant plus précieuse qu’il n’existe pas d’archive constituée du festival, symbole de l’internatio­nalisme du règne de Mohammad Reza Shah Pahlavi, condamné et enfoui à l’avènement de l’État islamique en 1979. De la même façon, une large section, dominée par les photograph­ies de Kaveh Golestan(1950-2003 [2]), est consacrée à Shahr-e No, le quartiergh­etto des prostituée­s à Téhéran, saccagé et incendié en 1979. Elles sont complétées par de rares documents retrouvés par une universita­ire iranienne. C’est ensuite la guerre consécutiv­e à l’agression de l’Iran par l’Irak (1980-1990) qui est documentée à travers les peintures de Kazem Chalipa et les photograph­ies de Bahman Jalali. Chapila incarne une autre composante importante de la culture iranienne : les peintures murales dans l’espace urbain. En dépit du re-

Maxxi, Rome / 12 décembre 2014 - 29 mars 2015 flet qu’en donnent également les dessins numériques d’un artiste de la jeune génération, Arash Hanaei, ce n’est pas l’aspect le mieux traité dans l’exposition qui insiste sur l’idéologie islamique et oublie ce qu’avait été l’influence marxiste. Mais c’est la partie contempora­ine surtout qui déçoit. Non que les artistes retenus (surtout des femmes, Mitra Farahani, Chohreh Feyzdjou, Narmine Sadeg) ne soient pas bons, mais parce que nous ne les découvrons pas. Sous prétexte « d’ignorer les spéculatio­ns financière­s », les artistes contempora­ins iraniens, célèbres en Occident, ont été laissés de côté. Soit, mais alors pourquoi n’avoir retenu que des artistes moins connus mais vivant néanmoins pour une grande part à Paris et ne rien montrer de ceux qui assument, en dépit des difficulté­s, de travailler en Iran ? Est-ce que la distance mentale qu’ils doivent maintenir et l’humour qui en découle n’en font pas des témoins stricts de l’histoire ? Catherine David, one of the curators of this show about modern Iran,(1) is well known for her interest in art’s evolution towards documentar­y forms, and in the Near East. It’s no surprise, then, to see that it is dominated by photograph­y, that major means of bearing witness to both everyday reality and history. The medium goes back a long way in Iran, where a shah, Nasr al-Din (1831– 1896), was one of its earliest adopters. It goes without saying that David would never have found an equivalent in an Arab country. That being said, the show opens with homages to two painters, Bahman Mohassess (1931-2010), and Behdjat Sadr (1924-2009). Even if the work of these two major figures—post-Surrealism for the first and a synthesis of Pop and calligraph­y for the latter—may strike us as a little quaint, its plastic qualities are undeniable. This overture illustrate­s the curators’ rejection of exhaustive­ness in favor of a concentrat­ion on a limited number of key works and moments. Next come the drawings of Ardeshir Mohassess and a section illustrati­ng the importance of this medium in Iranian culture, segueing into the collection of posters for the Shiraz-Persepolis Festival (1967–1977), which featured people like Genet, Grotowski, Kantor, and Wilson. This rich documentat­ion is all the more valuable in that there is no constitute­d archive of the festival, which symbolized the internatio­nalism of Mohammad Reza Shah Pahlavi’s reign, and did not survive the coming of the Islamic state in 1979. In the same way, a large section dominated by the photos of Kaveh Golestan(1950-2003 [2]), focuses on Shahr-e No, the ghetto neighborho­od inhabited by the prostitute­s of Tehran, which was sacked and burned down in 1979. These are accompanie­d by rare documents unearthed by an Iranian academic. The war against Iraq (1980–90), which started with the latter’s invasion, is documented by the paintings of Kazem Chalipa and the photograph­s of Bahman Jalali. Chapila stands for another important aspect of Iranian visual art: urban wall paintings. Although also illustrate­d by the digital drawings of Arash Hanaei, an artist from the younger generation, this dimension is not what the show does best, and the emphasis on Islamic ideology forgets the original Marxist influence. The real disappoint­ment, though, is the contempora­ry part. Not that the artists selected—Mitra Farahani, Chohreh Feyzdjou, Narmine Sadeg: a majority of women—are not good, but because there is no sense of discovery. We can accept the exclusion of artists who are already famous in the West, in order to “be free of financial speculatio­n,” but why choose people who, if little known, are in the majority based in Paris, rather than those who are soldiering on in Iran? Could it be because the mental detachment they are obliged to maintain and the humor that results don’t make them obvious witnesses to history?

Translatio­n, C. Penwarden

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