La Manipulation des images dans l’art contemporain
Regard Dans son dernier essai, Catherine Grenier attribue le vif intérêt actuel des artistes pour l’image « non pas à son autorité et à son statut de vérité, mais à sa vulnérabilité et à sa polysémie ». Propice à la manipulation, elle permettrait ainsi de multiples « mystifications démystificatrices » qui seraient devenues un détour privilégié pour dire le réel et le vrai. Sans se tenir à une définition de l’image comme stricte représentation, l’auteur distingue trois stratégies de manipulation : la falsification, la théâtralisation et la mythologisation de l’image. Si les deux premières jouent notamment sur l’indétermination entre le réel et la fiction, la troisième désigne un retour à l’essentiel. Traitées successivement, analysées en détail, déclinées en de multiples exemples souvent fort proches, ces trois stratégies font à plusieurs reprises glisser l’ouvrage vers un inventaire dont la lecture n’est, en outre, pas facilitée par une écriture parfois imprécise et une relecture par l’éditeur de toute évidence hâtive. Si bien que plus qu’un essai serré développant une thèse, ce livre est un très instructif panorama d’une large part de la création actuelle. Il la recontextualise en faisant appel à bon escient à des interprétations extérieures au champs de l’art ; l’essai Énigmes et Complots du sociologue Luc Boltanski éclairant par exemple la « culture du mystère » partagée par nombre de ces artistes. Surtout, il souligne combien ces pratiques souvent très référencées contribuent aussi à relire des oeuvres du passé sous un angle spécifique (la manducation chez Dalí, figure de référence du « cannibalisme » artistique contemporain), voire à en sortir d’autres de l’oubli (l’importance de Guy de Cointet pour les recherches actuelles, entre art et théâtre, sur l’image performée).