David Lespiau
Équilibre libellule niveau P.O.L, 112 p., 11 euros
La clef de ce livre est dans son titre. Le mot « libellule » vient du latin libella qui signifie « niveau », par allusion au vol horizontal de l’insecte. Libella est dérivé de libra qui désigne un instrument permettant de mettre en équilibre, de comparer. Cette clef donne ainsi accès à différentes opérations de mesure, de dosage et d’accord. David Lespiau rassemble, agence des décors, des motifs, des corps, des fictions, des rêves, des attentes, des accélérations, des conditions atmosphériques et des réactions chimiques. Ce principe de composition prend aussi bien en charge des préoccupations mécaniques liées à l’ajustage de pièces variées, des expositions archéologiques du réel que des expériences de perception plus flottantes, plus abstraites ou des substances réfléchissantes d’un univers plus imaginaire. Les divers usages de cette matière convergent pourtant tous vers une transparence nervurée, comme les ailes de la libellule, qui s’apparente au verre par sa capacité de montrer les étapes de ce processus transformant la compacité en fluidité, l’opacité en limpidité. Équilibre libellule niveau est un ensemble de flux qui se propagent et s’entrelacent. David Lespiau puise à la fois dans les ressources de la prose et du vers, de la suspension et de la reprise, de l’articulation et de la confrontation. Il développe ainsi une écriture qui trouve son régime dans l’émergence de notations et de sensations extraites de contextes éloignés ou proches, identifiables ou énigmatiques. Elle est porteuse d’une « aventure mentale ». La pensée la pénètre de part en part. Le lecteur est convié à la suivre dans le mouvement spécifique de sa trajectoire : « Un mode d’avancée imprévisible, dans un temps de la pensée devenu un présent permanent. »