R. Cuir et É. Mangion (dir.)
La performance. Vie de l’archive et actualité
Les presses du réel Au sein de la production artistique contemporaine qui tend à approcher et considérer toujours plus de formes et de matériaux nouveaux, la performance pose par essence problème au regard de la définition classique du musée. La conservation nécessite ainsi, elle aussi, d’être en constante recherche afin d’assurer un mouvement matériel et intellectuel en adéquation avec la création. Entre acte esthétique et spectacle, la performance soulève une question de statut autour de la notion d’« oeuvre », et de son rapport avec le public souvent dépositaire d’une expérience esthétique prenant les traits sévères de l’archive. Cet objet brut est pourtant éloquent dans les expositions, où il est présenté de plus en plus souvent. À la fois artefact historique et fragment de l’aura benjaminienne, quel intérêt l’archive de la performance doit susciter en nous ? C’est à cette interrogation que ce recueil propose de répondre pour redéfinir les lignes historiques et esthétiques de la performance, dont l’expérience réside autant dans ses spectateurs directs, qui deviennent des témoins actifs, que dans le document qui en résulte, archive écrite, photographie ou film. Quant à lui, le reenactment (reconstitution) apparaît, par son décalage avec l’action première à un moment et dans un lieu précis, comme une « trace » ambiguë. En invoquant Allan Kaprow, Tino Sehgal ou Gina Pane, les auteurs ré-engagent la performance dans l’espace sociopolitique, faisant de ce véritable matériau un champ durable de création multivoque. Ainsi la performance, dans ses dimensions esthétiques, philosophiques et historiques, semble un parfait écho à la maxime de Robert Filliou affirmant que « l’art est ce qui rend la vie plus intéressante que l’art ».