Norbert Hillaire
Festival Bains numériques / 29 avril - 28 juin 2014 Norbert Hillaire, comme il aime à le dire, « ouvre le monde » avec des appareillages mobilographiques. Et ses assemblages de fragments d’existence, en triptyque, répondent à une géométrie secrète. Mais il n’est point de règle rigoureusement établie, ni dans les compositions, ni dans les perspectives, ni dans les échelles, ni dans les cadres. Pas même dans le choix des sujets. Ce sont les situations qui déclenchent l’appareil, jamais l’inverse. Et l’oeuvre de rester inachevée, jusqu’à ce que cette « connaissance par le montage », dont parle Georges Didi-Huberman, lui permette d’atteindre l’équilibre, le plus souvent en respectant la règle des trois. Mais alors qu’en est-il des diptyques ? De ces histoires que l’artiste théoricien se refuse de poursuivre ou de clore ! Il n’a de toute façon qu’une idée en tête : « Le futur reste ouvert, même quand tout est devenu calculable. » Et dans le grain qui est inhérent aux limites de l’appareil mobile qu’il utilise, résonnent les sels d’argent ou canevas de toile de toutes les oeuvres photographiques ou picturales qu’il a observées. Norbert Hillaire aime se faire surprendre par ce qui est là, au recoin d’une pièce, à la lisière d’une forêt, dans la galerie d’un musée. Quand plus rien ne dissocie, alors que le cadre est posé, les fragments de réel du souvenir des oeuvres d’autrui. Dans un jeu qui consiste à observer pour oublier et enfin réactiver, autrement. Des jours entiers, il s’est déplacé avec son appareil mobile entre la poche et la main, « échappant toutefois à tout formatage du sensible ». Des nuits entières, l’oeil a observé les signes photographiques qui composent ce qu’il qualifie aussi de « haïku ».
Dominique Moulon Norbert Hillaire “opens the world,” as he likes to put it, with “mobilographic” devices. His assemblages of fragments of existence, presented in triptych format, have a secret geometry. But there is no rigorously established rule either in the compositions or in the perspectives, or in the scale or frames. Not even in the choice of subjects. It is situations that trigger the machine, never the opposite. And the work remains incomplete, until the coming of “knowledge through montage” described by Georges Didi-Huberman, which allows it to attain equilibrium, usually by respecting the rule of three. But what about the diptychs? These stories that the artist and theoretician refuses either to continue or close! In any case, he is obsessed with one idea: “the future is open, even when everything can be calculated.” And in the grain inherent in the limits of the mobile apparatus that he uses we hear the echo of the silver salts and canvases in all the photographs that he has observed in the past. Hillaire loves to be surprised by what is there, in the corner of a room, on the edge of a forest, in a gallery or museum. When, with the frame in place, there is nothing to separate fragments of the real from the memory of other people’s works. Observation leads to forgetting leads to reactivation in a different mode. He spent days traveling round with his mobile apparatus, now in his pocket, now in his hand, “escaping any kind of formatting of the sensible.” For nights on end, the eye observed the photographic signs that compose what he also calls haikus.
Translation, C. Penwarden