Ouverture du musée Soulages
30 mai 2014 Vision saisissante à l’approche du coeur de Rodez, les volumes cubiques en acier Corten du musée Soulages dominent le paysage ruthénois. Inscrit dans une vaste esplanade reliée à la cathédrale par une promenade, le bâtiment de l’agence catalane RCR Arquitectes métamorphose le quartier. D’un aspect métallique brut, aux murs a priori aveugles et aux formes massives, le musée évoque la rudesse des causses environnants et le caractère monolithique de ces pierres levées que Pierre Soulages a admirées dans sa jeunesse. Le projet architectural affiche l’audace de ceux qui ont assimilé l’oeuvre du peintre. La lumière constitue ainsi une matière à part entière : fractionnée par des brise-soleil, tamisée par une fine résine, réfléchie par des parois claires, voire reconstituée par des leds, elle sert avec la plus grande justesse les pièces exposées et s’invite dans des percées inattendues et des vues panoramiques sur le paysage. Deux mois après son inauguration, le musée affiche une belle réussite : visiteurs de la région et d’ailleurs se pressent pour découvrir le travail de l’enfant du pays, né en 1919. Le musée Soulages a été conçu pour accueillir deux donations de plus de 500 pièces consenties par Pierre et Colette Soulages en 2005 et en 2012. La richesse de ce fonds permet une rotation de l’accrochage, et encourage même le directeur de l’établissement, Benoît Decron, à solliciter des dépôts de particuliers et d’institutions pour dialoguer avec une collection permanente qui se veut en mouvement. Comment aborder une telle oeuvre sans tomber dans l’écueil du musée monographique ? Misant sur la pédagogie, le parcours a été composé autour des techniques employées par l’artiste. Les travaux au brou de noix font ainsi l’objet d’une salle, précédant un cabinet d’arts graphiques tout en clair-obscur où se déploie un important fonds d’oeuvres assorties de leurs matrices. On découvre ensuite des collages et de délicates gouaches sur papier, moins connues, puis des toiles de grand format avant d’aboutir à une véritable nef dédiée aux cartons préparatoires des vitraux de l’abbatiale de Sainte-Foy de Conques. L’accrochage s’avère toujours précis, le rythme juste, alternant parois blanches et murs de métal sombre pour jouer avec la lumière, toujours. On peut toutefois s’étonner de la proximité formelle entre les irrégularités de l’acier dégraissé des murs et les tableaux qu’ils accueillent, au risque d’interférer parfois dans l’appréhension des oeuvres. Un plateau de 500m2, souhaité par Pierre Soulages pour ouvrir le musée à d’autres artistes, complète les espaces d’exposition. La première proposition, Outrenoir en Europe (jusqu’au 5 octobre) permet exceptionnellement de prolonger la visite en faisant l’expérience du noirlumière face à des toiles monumentales issues de grandes collec- tions européennes. Par la suite, le musée, qui aspire à devenir la référence internationale sur l’oeuvre de Soulages, aura à coeur d’y défendre une programmation ambitieuse d’art moderne et contemporain. A striking vision emerges as you approach downtown Rodez. The Musée Soulages’s Corten steel cubes dominate the surrounding landscape. Notched into a long esplanade linked to the local cathedral by a walkway, this building designed by the Catalan RCR Arquitectes has transformed the neighborhood. With its raw metal surfaces, windowless walls and massive volumes, the museum echoes the severity of the surrounding Causses plateau and the monolithic character of the standing stones Pierre Soulages admired when he was young. This architecture reflects the museum’s audacious assimilation of Soulage’s work. Light constitutes a structural element in itself. Whether fragmented by the sunscreens, filtered through a fine resin, reflected by the pale walls or reconstituted by LEDs, it is very appropriate for the work on view and fills the unexpected openings and panoramic views of the landscape. Two months after its inauguration, this museum has proved a great success, with visitors from the surrounding region and far and wide eager to see the work of this hometown hero, born in 1919. The Musée Soulages was designed to house the donations made by Pierre and Colette Soulages in 2005 and 2012 totaling more than 500 paintings and other works. The collection is robust enough so that its contents can be shown in rotation, and its director Benoît Decron has asked other museums and private col- lectors to lend pieces that can dialogue with the constantly moving permanent collection. The planners carefully considered the problems that sometimes bedevil museums devoted to one artist’s body of work. Opting for an educational approach, they organized the exhibition layout around the various techniques Soulages has employed. The walnut stain on paper pieces are arranged in one room, preceded by a smaller room for his prints and the plates they were made with. Then come his lesser-known collages and delicate gouaches on paper, followed by large format paintings, and finally, a vaulted room with the preparatory sketches for the stained glass windows of the Sainte-Foy de Conques abbey. The positioning of the pieces is judicious and the rhythm always just right, with alternating white and dark metal walls in interplay with the light. Yet it’s sometimes surprising to note the formal similarities between the irregularities in the de-greased steel of the walls and the paintings hung on them, which sometimes interfere with visitors’ apprehension of the works. The museum includes a 500 square meter exhibition space Soulages requested so as to be able to bring in work by other artists. The inaugural show Outrenoir en Europe features Soulages pieces on loan from other European venues to complement the permanent collection and allow visitors to experience the interaction of light and dark face to face with these large-format canvases. In the future, in addition to its aspiration to become the museum of reference internationally for Soulages’ work, it will also devote attention to an ambitious program of exhibitions of modern and contemporary art.
Translation, L-S Torgoff