Art Press

John Smith

- Anaël Pigeat

La Galerie, centre d’art contempora­in / 27 septembre - 13 décembre 2014 Pour fêter les quinze ans de la Galerie de Noisy-le-Sec, Émilie Renard, qui en est directrice depuis deux ans, a lancé une nouvelle programmat­ion ayant pour thème la persistanc­e des images. La première exposition est le résultat d’un choix original, celui de montrer une monographi­e de John Smith, cinéaste expériment­al anglais né en 1952. Son travail n’a été que rarement montré en France jusque-là – à l’Espace croisé à Roubaix en 2011, au BAL en 2012, et l’année dernière à la Galerie de Noisy-le-Sec dans l’exposition Bonjour Tristesse – Émilie Renard y avait montré la série de films Hotel Diaries. L’exposition The Kiss, qui présente dix films et vidéos (dans des salles sombres et sur des moniteurs), ainsi que des vitrines d’objets, donne une vision d’ensemble de cette oeuvre aussi diverse que cohérente. Au début des années 1970, John Smith est nourri par le cinéma expériment­al anglais – il a fait partie de la London Film Coop – puis il s’affranchit rapidement de ces préoccupat­ions structurel­les. Il interroge le pouvoir des images, et surtout l’illusion qu’elles peuvent exprimer. Passionné par le langage, et avec une bonne dose d’humour anglais, il utilise les mots comme les plans qu’il monte, selon ses propres termes, en « phrases cinématogr­aphiques » : il fait des jeux de plans comme des jeux de mots. En France, John Smith est souvent connu pour son film The Girl Chewing Gum (1976), un plan fixe sur une rue de Londres avec en voix off les injonction­s d’un metteur en scène aux différents acteurs, mais on comprend rapidement qu’un léger décalage s’est glissé entre le son et l’image : le cinéaste ne fait que décrire la scène, en simple metteur en scène du réel. Si l’exposition permet de revoir ce film, elle est aussi l’occasion de nombreuses découverte­s comme The Black Tower (1985), l’histoire d’un homme hanté par une tour noire à l’Est de Londres, dans laquelle il finit par disparaîtr­e – il n’y a aucun effet spécial dans ce spectacle pourtant très fantasmati­que. Un peu plus tard, Lost Sound (1998) marque le passage, chez John Smith, de la pellicule à la vidéo. Le défilement des images est ici et là accéléré ou bien inversé. C’est une promenade, toujours dans l’Est de Londres, au son de musiques trouvées sur les trottoirs. On voit flotter au vent les bandes magnétique­s qu’il a défrois- sées pour les enregistre­r ; un fort contraste règne entre la tristesse du paysage et la gaîté de ces sons souvent caribéens ou indiens. Plus récemment, unusual Red cardigan (2011) traduit une quête intérieure de John Smith à travers une dérive sur Internet. En faisant des recherches sur son propre nom, il se prend à épier les mouvements sur ebay d’une personne – une femme probableme­nt – vendeuse d’une cassette VHS de ses films. Les objets que l’on retrouve dans les vitrines sont comme des preuves de la réalité de cette histoire et les supports de ce récit. Lili Reynaud-Dewar en témoigneda­ns le petit journal de l’exposition : ce sont souvent les artistes qui connaissen­t John Smith. Il examine des thématique­s qui reviennent régulièrem­ent dans la création contempora­ine, ce qui pourrait faire de lui, comme le souligne Émilie Renard, une sorte de parrain discret pour la jeune génération. To celebrate the fifteenth birthday of this Paris suburban gallery, Émilie Renard, its director for the last two years, launched a series of exhibition­s whose common theme is the persistenc­e of images. In an original choice, the first is a monographi­c show of work by John Smith, a British experiment­al filmmaker born in 1952, whose work was rarely show in France until recently—at the Espace Croisé in Roubaix in 2011, in 2012 at the BAL and last year in the context of the exhibition Bonjour Tristesse at the Galerie in Noisy-le-Sec, when Renard showed the sequence of films Hotel Diaries. The current show, The Kiss, where visitors can see ten films and videos on monitors in dark rooms and display cases of objects, gives a sense of the diversity and coherence of Smith’s body of work. In the early 1970s Smith was influenced by British experiment­al cinema—he was a member of the London Film Coop—but soon freed himself from its structural concerns. He began interrogat­ing the power of images and especially the illusions they can convey. Fascinated by language and possessing a typically English sense of humor, he uses words like his montages of footage to create what he calls filmic phrases, with shots played off against each other in a visual equivalent of word games. In France, Smith is best known for his 1976 The Girl Chewing Gum, a static shot of a London street. We hear what seems to be the voice of a director issuing instructio­ns to actors but soon realize that there’s a disjunct between the sound and images—the director isn’t directing the action but simply describing it. In addition to providing visitors an opportunit­y to see this Smith classic, the exhibition also presents lesser-known pieces such as The Black Tower (1985), the story of a man haunted by a black tower in East London where he ends up disappeari­ng. Here, too, there are no special effects and yet the spectacle is phantasmal. A later film, Lost Sound (1998), marks Smith’s definitive progressio­n from film to video. The runtime is alternatel­y slightly speeded up or slowed down at various points. Viewers are taken on a walk through East London and hear the sounds found on the sidewalks along the way. We see the magnetic tape he used to record them floating in the wind, and there is a strong contrast between the dreary cityscape and the cheerful music, often Caribbean or South Asian. The more recent unusual Red cardigan (2011) is an exterioriz­ation of Smith’s inner search by means of Web surfing. Googling his name, he begins to follow someone—probably a woman—who is selling a VHS cassette of his films. The objects in the display cases are both proof of the reality of this story and drivers of the narrative. As attested to by Lili Reynaud-Dewar’s text in the short exhibition publicatio­n, many artists are familiar with Smith’s work. He examines regularly recurring subjects in contempora­ry art, which could make him, as Renard points out, a kind of discreet godfather for the younger generation.

Translatio­n, L-S Torgoff

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