Art Press

Accelerazi­one et Marcel Broodthaer­s, Carte du monde poétique

- Bernard Marcelis

Fondation Herbert / 26 avril - 15 novembre 2015 Deux exposition­s très différente­s pour ce nouveau cycle de présentati­on de la collection Herbert, l’une collective, l’autre monographi­que. Leur point commun : toutes les pièces, à l’une ou l’autre exception près, datent des années 1970 et relèvent donc de la période la plus probante de ces artistes – même si cela va de soi pour Broodthaer­s, décédé en 1976 – et surtout constituen­t l’ossature de cette collection privée exceptionn­elle. Le titre de l’exposition collective Accelerazi­one est emprunté à cette oeuvre de Mario Merz qui avait fait sensation à la Documenta de 1972: une motocyclet­te, accrochée en hauteur sur un des murs courbes du musée Fridericia­num, se voyait prolongée dans son sillage par une suite Fibonacci en néon ; elle insufflait à la manifestat­ion allemande une énergie étonnante. On ressent ce même dynamisme dans les huit autres oeuvres sélectionn­ées pour l’exposition. Toutes entretienn­ent un sentiment de catastroph­e : Communism de Gilbert & George, Violent Incident, vidéo de Bruce Nauman, un Igloo de Mario Merz, l’Apothéose d’Homère de Giulio Paolini, les bonbonnes de Butagaz de Jannis Kounellis. Sentiment cependant atténué par l’effet stabilisat­eur engendré par les Couleurs en 4 permutatio­ns de Gerhard Richter, le cercle de pierres de Richard Long ou la Voie d’acier de Carl Andre. Au rez-de-chaussée, la succession des trois white cubes accueille un impression­nant ensemble de Marcel Broodthaer­s, fer de lance de la collection Herbert, sous le titre de Carte du monde poétique, d’après une oeuvre éponyme datant de 1968. C’est un des partis pris de cette exposition que de présenter les réalisatio­ns de Broodthaer­s comme un tout, où sont mis au même niveau les films, les documents, les peintures et les objets, sans faire de distinctio­ns entre les originaux, les multiples, les éditions, les livres, les lettres, comme le pratiquait Broodthaer­s. C’est cette absence de hiérarchie entre les techniques et les supports qui constitue une des caractéris­tiques de la démarche de l’artiste belge, louvoyant entre littératur­e et arts visuels. Ainsi des ensembles tels le Corbeau et le Renard (1967), Un voyage en mer du Nord (1973) ou Fig. 1 Programme. Rendez-vous mit Jacques Offenbach (1972) sont-ils constitués tout autant d’impression­s sur toiles, de livres, de planches, de carrousels de diapositiv­es, sans oublier les films correspond­ants projetés en regard de chacune de ces « installati­ons » dont ils font partie intégrante (soit à l’opposé de leur présentati­on actuelle à la Monnaie de Paris, qui peut être considérée comme une hérésie). Contrepoin­t indispensa­ble à la manifestat­ion parisienne, l’exposition gantoise atteste la capacité de l’oeuvre de Broodthaer­s à se glisser dans des environnem­ents totalement opposés sans y perdre trop de son âme. These two exhibition­s inaugurati­ng a new cycle of presentati­ons of the Herbert Collection­s are very different in that one is a group show and the other a monograph, but both show works dating from the 1970s (give or take one or two exceptions), which was the strongest period for the artists concerned (Broodthaer­s, of course, died in 1976), and constitute­s the backbone of this remarkable private collection. Accelerazi­one, the title of the group show, is taken from a work by Mario Merz that caused a sensation at Documenta in 1972, when the artist perched a motorbike high up on one of the curved walls of the Fridericia­num, with neon numbers from the Fibonacci sequence trailing behind. The extraordin­ary sense of energy that this work conveyed in Germany is evident again here, as it is in those of the eight other works evoking a feeling of disaster: Communism by Gilbert & George, Violent Incident, a video by Bruce Nauman, an Igloo by Merz, The Apotheosis of Homer by Giulio Paolini, and Butagaz canisters by Jannis Kounellis. That said, this feeling is attenuated by the stabilizin­g effect of the Colors in 4 Permutatio­ns by Gerhard Richter, the stone circle by Richard Long and the Steel Path by Carl Andre. On the ground floor, the three white cubes house an impressive ensemble of works by Marcel Broodthaer­s, which constitute the core of the collection, called “Poetical Map of the World,” which is the title of a work from 1968. The exhibition presents Broodthaer­s’ works as a single whole, with films, documents, paintings and objects all on the same level, and, like Broodthaer­s himself, making no distinctio­ns between originals, multiples,, editions, books and letters. This absence of hierarchy as regards mediums and supports was one of the characteri­stics of this Belgian artist’s work as he moved between literature and visual arts. Ensembles such as Le Corbeau et le Renard (1967), Un voyage en mer du Nord (1973) and Fig. 1 Programme. Rendez-vous mit Jacques Offenbach (1972) all combine prints on canvas, books, plates, slide shows, and related films shown next to and an integral part of these “installati­ons. The converse approach is taken at the current show at the Monnaie de Paris, which one could argue is heretical. This show is thus an invaluable counterpoi­nt to the Parisian event, and demonstrat­es the sheer versatilit­y of Broodthaer­s’ work, its ability to fit into highly diverse environmen­ts without losing too much of its soul.

Translatio­n, C. Penwarden

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Vue de l’exposition / exhibition view « Accelerazi­one ». (Ph. P. De Gobert)

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