Les Rencontres de la photographie
Divers lieux / 6 juillet - 20 septembre 2015 Cette 46e édition des Rencontres d’Arles ouvre une nouvelle ère, avec l’arrivée d’un nouveau binôme : Hubert Védrine, président (qui succède à Jean-Noël Jeanneney) et Sam Stourdzé, directeur (précédemment à la tête du musée de l’Élysée à Lausanne). L’identité de « festival » est particulièrement mise en exergue par son nouveau directeur qui insiste sur son rôle de laboratoire. Il le différencie en cela autant du musée et de sa fonction de conservation que de la foire d’art et de son état des lieux (du marché) de la photographie. Pour Sam Stourdzé, un festival doit donc « constamment réaffirmer sa liberté, assurer la pluralité et la simultanéité de ses projets et de ses expositions et, enfin, avoir pour mot d’ordre le décloisonnement ». Il sera donc question « d’hybridation, de contamination, de confrontation, de friction », soit, pour ces deux derniers termes, ce qui a caractérisé ces dernières années les relations entre la précédente direction et la Fondation Luma. Si un des enjeux de la nouvelle direction était de renouer le lien avec Luma, on peut dire que c’est en bonne voie. La programmation de la Fondation est en effet intégrée à celle des Rencontres, tout en s’en différenciant fortement, à l’instar de la présentation de la collection des Impondérables de Tony Oursler qui fait suite à celle de Philippe Parreno en 2014. Au vu du chantier de la future fondation et de la rénovation spectaculaire et réussie de l’Atelier des Forges qui accueille précisément Oursler et la copieuse exposition sur les pochettes de disques photographiques, le fossé va immanquablement se creuser entre les friches industrielles ou les églises désaffectées utilisées par les Rencontres et les espaces rénovés que va proposer la Fondation Luma. Sous l’impulsion de cette dernière, Arles se voit ainsi inéluctablement engagé à s’ouvrir à l’art contemporain et à abolir les frontières entre les disciplines. Une nouvelle direction ne signifie cependant pas faire table rase du passé. Les visiteurs ne perdront pas leurs points de repères, car ce sont les mêmes lieux qui sont investis par les images. En revanche, et à l’inverse des éditions précédentes, ils bénéficient, cette année, d’un double parcours rétrospectif sur l‘histoire de la photographie de la seconde moitié du 20e siècle, soit une contextualisation bienvenue par rapport à la création plus contemporaine présentée ailleurs. On le doit à un double anniversaire : les 50 ans de la collection photographique du musée Réattu à Arles (basée en partie sur des dons de photographes ayant participé aux Rencontres) et les 30 ans de l’excellente collection de la MEP (Paris), déployée au Méjan et au Capitole. Outre le fait que les deux collections soient complémentaires, elles permettent des résonances avec le reste de la programmation. Ainsi le fonds japonais de la MEP entre-t-il en écho avec Another Language, une plongée dans la photographie japonaise, tandis que les images de Joel Sternfeld renvoient implicitement à la remarquable rétrospective de Stephen Shore présentée à l’Espace Van Gogh. Le décloisonnement prôné cette année concerne trois domaines : le cinéma, la musique (outre les pochettes de disques, une peu convaincante collaboration entre Matthieu Chedid et l’inévitable Martin Parr) et surtout l’architecture, avec deux expositions majeures. L’exceptionnel ensemble d’archives photographiques de Robert Venturi et Denise Scott Brown du début des années 1970, et le monumental travail de Markus Brunetti sur les façades des cathédrales européennes, renouvelant spectaculairement le genre de la photographie d’architecture. L’ouverture aux autres civilisations se fait quant à elle par le biais du reportage ethnographique réalisé par l’Allemand Martin Gusinde en Terre de Feu au début du 20e siècle, alors que le Congo contemporain est exploré de maîtresse façon par Alex Majoli et Paolo Pellegrin. Ce dernier travail relève du documentaire qui prend, lui, la forme d’enquêtes très développées avec Paolo Woods et Gabriele Galimberti. Ceux-ci se sont attaqués aux paradis fiscaux. Le semblant de neutralité de leurs photographies cachant une réalité aussi sombre qu’opaque. Cette série touche un des enjeux de la photographie contemporaine : s’inscrire dans le réel pour en dévoiler les véritables facettes et nous confronter aux incohérences du monde qui nous entoure. Bref, une édition qui tient ses promesses. Thus year’s forty-sixth Rencontres d’Arles opens a new era with the arrival of a new leadership team, chairman Hubert Védrine (succeeding Jean-Noël Jeanneret) and director Sam Stourdzé (formerly director of the Musée de l’Élysée in Lausanne). Stourdzé is giving special emphasis to what he considers the role of a festival as a laboratory, in contrast to a museum, whose function is conservation, or an art fair, which is supposed to take the market’s temperature. Stourdzé argues that a festival “should constantly reaffirm its freedom, ensure the variety and synchronicity of its projects and exhibitions, and above all seek to break down walls.” He likes to use buzzwords such as “hybridization, contamination, confrontation and friction.” Certainly the last two terms could be applied to the fractious relationship between its previous management and the Luma foundation over the last few years. If the new administration wants to mend this relationship, so much the better. The Luma presents installations as part of the festival, while at the same time strongly differentiating itself from the Rencontres. This was clear in the Luma’s presentation of the Tony Oursler project The Imponderables, following the Philippe Parreno collection featured the previous year. Looking at the foundation’s future facilities now under construction and its spectacularly suc-